2.
Le lendemain matin, en entrant dans la salle des professeurs, j'entendis un brouhaha qui venait du bout du couloir.
Je m'approchai de mes collègues qui regardaient toutes et tous en direction du bureau du principal.
Derrière la vitre, tout ce que je pouvais apercevoir d'içi c'était une veste noir, des épaules carrées et des cheveux foncés légèrement bouclés.
- Qui est-ce ?
- Le nouveau professeur. Oh la la, regarde moi ces fesses bien rebondies Je pourrais les croquer ! , me répondit Francine, professeure d'anglais.
- Hum, je ferais sûrement plus que les croquer si tu veux tout savoir ! (ça c'était Jean-Michel, prof d'Eps et homosexuel totalement décompléxé). Franchement, Francine, que dirait ton mari s'il t'entendait ?
-Je suis certaine que Robert serait tout à fait d'accord avec moi.
Je riai en levant les yeux au ciel. C'était toujours la même rengaine quand un nouveau arrivait. Les femmes hétéros et Jean -Michel dégainaient leurs regards laser, à l'affût du moindre détail, et tombaient en pâmoison en priant pour qu'il soit célibataire.
La sonnerie retentit et, comme vous pouvez l'imaginer, mes chers collègues ne bougèrent pas d'un poil, s'extasiant encore et encore devant les muscles fessiers du nouveau.
- Il faudrait peut-être y aller là, non ?
Aucune réponse.
Bon…
Alors que je me détournai et allai prendre des photocopies dans mon casier, la porte du principal s'ouvrit.
Sur un ton bourru qu'on lui connaissait très bien, il nous fit clairement comprendre que notre place était dans nos classes et que nous aurions le temps de faire connaissance avec le nouveau professeur plus tard.
- Apparemment, vous êtes déjà au courant qu'il y a un nouveau membre dans l'équipe. Voilà Monsieur CONFITI , professeur de musique. Maintenant sortez-tous de là enfin ! Vos élèves vous attendent. Allez !
J'allais sortir moi aussi, quand je percutai quelqu'un. Surprise, je lâchai le paquet de photocopies et m'empressai de récuperer les feuilles étalées par terre.
- Mince ! Désolée, je n'ai pas fait attention...
Et c'est là que je le vis. Accroupis devant moi, m'aidant à ramasser les copies, un léger sourire aux lèvres.
- C'est plutôt à moi d'être désolé. Je ne voulais pas vous faire peur.
Oh. Mon. Dieu. Il avait levé ses yeux bleu nuit vers moi et je ressentis d'emblée une étrange impression de familiarité. Sa voix était rauque et basse. Presque lointaine. On aurait dit qu'elle venait d'un autre monde.
- Dali ?
- Quoi ?, demandai-je en fronçant les sourcils ?
- Vos photocopies ? Ce sont des tableaux de Dali, non ?, dit-il sans se départir de son sourire.
- Euh… Oui. Je donne un cours sur les artistes surréalistes. Ces tableaux doivent servir de support aux élèves, répondis-je en lui souriant timidement et en reprenant les feuilles qu'il me tendait.
- Je m'appelle Jules.
- Enchantée, moi c'est…
- Jana… C'est écrit.
- Quoi ?, murmurai-je.
- A coté des tableaux, c'est écrit. Votre Prénom, expliqua-t-il, une lueur de malice dans les yeux.
Je le regardais mordre sa lèvre inférieure, sûrement pour s'empêcher de rire devant mon air totalement déconnecté.
- Oui. Mon prénom. C'est parce que j'avais donné l'original à l'accuei. J' avais écrit mon prénom pour… Bref.
Je pris un grande inspiration pour essayer de me reprendre.
- En tout cas, bienvenue. Vous allez voir, c'est une super équipe içi. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à… Enfin voilà quoi, n'hésitez pas.
Il me remercia et on resta là à se fixer encore pendant d'interminables secondes. Son regard était si perçant qu'il me mettait légèrement mal à l'aise. Pourtant, je ne pouvais qu'admirer ses pupilles, qui scintillaient telles des étoiles sur une toile bleu nuit. Elles étaient si luisantes. Comme si on les avait peintes à l'huile.
Je me rappelai soudainement que j'avais des cours à donner et que j'étais très (très) en retard. Je me rendis à ma classe en quatrième vitesse avec une seule pensée en tête : Mais qu'est-ce-qui venait de se passer ?
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