Pâques [Par KagomeAohane]

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— Voilà ce qu'on va faire, annonça Sophie Dée triomphalement.

— Bouhouhou, mes *hic* z'amis... l'interrompit Paulette en serrant contre elle sa bouteille de rhum vide.

— Non mais écoutez-moi un peu, ça fait déjà deux épisodes que je dis la même chose et que personne ne m'écoute ! s'énerva Sophie.

Agacée par la fille qui squattait chez eux depuis quelques épisodes et voulait tout commander, Cacagomé l'assomma d'un coup de bouteille dans la tronche.

— Ras le cul de cette sale squatteuse ! Non mais sans blague quoi...

— Parce que toi, ce n'est pas du tout ce que tu fais depuis le début, squatter chez nous et inviter tous tes potes pendant qu'on est pas là... remarqua Maurice.

— Non ça compte pas d'abord, parce que je suis pas un PNJ mais un personnage principal !

— Ah oui, et depuis quand ? T'es même pas dans le premier tome, la nargua Maurice.

Cette attitude pas très galante lui valut le même sort que Sophie Dée.

— Bon, c'est pas tout ça mais qui va ranger tout ce bazar ? interrogea Alba en désignant les cadavres qui s'amoncelaient dans le salon.

— Eurk, y a du sang partout, je me sens pas bien... se plaignit Georgette.

— Moi non plus...

Georgette et Paulette se défièrent du regard, puis foncèrent toutes les deux vers les toilettes, chacune essayant d'arriver la première en faisant des croche-pieds à l'autre durant leur course effrénée. Celle-ci se solda par des bruits fort peu ragoûtants en provenance des sanitaires.

— Pff, bande de fragiles... fit Alba en haussant les épaules. Paulette, ça te dérange si je dissèque les cadavres qui traînent partout avant de les jeter ? C'est pour ma thèse !

La bouteille de rhum que Cacagomé avait gardée avec elle fusa depuis les toilettes à une vitesse supersonique, et Alba ne l'évita que de justesse. Cependant, malgré son agilité, elle trébucha sur le cadavre de l'italienne à l'accent russe, moulina des bras, perdit l'équilibre et tomba avec fracas sur Maurice. Un instant plus tard, les deux héroïnes parties répandre leur déjeuner dans la cuvette revinrent, livides, et se couvrirent les yeux des mains.

— Rho, mais ça va pas de faire ça maintenant ? Et parmi des cadavres en plus ! s'exclama Georgette, horrifiée, tout en matant entre ses doigts.

— Pff, et après c'est moi qui ai des mœurs bizarres dans ce groupe... Je suis peut-être un peu bizarre mais j'irai jamais faire ça au milieu des cadavres de mes amis ! renchérit Paulette.

— Moi je trouve que ça a un côté poétique, intervint Maurice, qui venait de se réveiller. Pas vrai, mon lapin en sucre glace que j'aime et que j'adore et qui est mignon à croquer, belle comme une fleur des champs, une primevère printanière poussant au milieu d'une verte prairie où butinent les abeilles, où coule un torrent à l'eau claire et où paissent paisiblement des vaches près d'un tas de fumier ?

— Tu es nul pour faire des métaphores, remarqua Alba. Ce surnom était ultra moche.

Georgette et Paulette hochèrent vigoureusement la tête en signe d'approbation.

— Espèce de nécrophile va... marmotta Paulette en soupirant. Bon allez, reprit-elle, on arrête les bisous en-dessous de la ceinture et on se met au boulot ! Georgette, tu seras mon assistante ! Va rassembler les cadavres en tas au milieu du salon !

— Assistante de quoi ? interrogea-t-elle.

— J'ai besoin d'une assistante, pose pas de questions. Alba et Maurice, faites ce que vous voulez mais restez pas comme ça, ça devient vraiment glauque !

Georgette s'exécuta et rassembla les cadavres habillés de façon diverses, blouse, combi licorne, uniforme russe...

— Stop ! Pas celui-là ! cria Paulette en désignant Sil Verre.

— Ok, répondit Georgette en le laissant tomber sans ménagement.

— J'ai besoin de sacrifices, maintenant. Alba, va me chercher un reste de pâtes à la cannelle, et toi Maurice, du rhum. Sale nécrophile, murmura-t-elle aimablement lorsqu'il ne fut plus à portée d'oreille.

Lorsque tout fut prêt, Paulette exécuta une danse étrange tout en psalmodiant à voix basse :

— C'eeeeeest l'apérobic, à elle la gym, à moi l'tonique ! C'eeeeeest l'apérobic, à elle la gym, à moi l'tonique !

— Mais qu'est-ce que tu fous ? demanda Maurice, éberlué devant tant de splendeur.

— Chut, le rituel ne doit pas être interrompu !

— Je sais pas ce qu'elle fait mais ça le donne soif cette chanson, murmura Alba.

Georgette commença à imiter Paulette mais sa danse ressemblait plus à du gangnam style qu'autre chose.

Enfin, l'alcoolo s'arrêta de danser. Et sous les yeux ébahis des autres guerriers, les cadavres reprirent vie. Ils se frottèrent les yeux, surpris, puis leurs visages s'éclairèrent en reconnaissant leur sauveuse et amie.

— Sardina ! s'exclama la fille à l'accent russe. Mia madre spirituale !

— Ma petite Chaussette Fine, ma Nectarine !

— Gracias, hermana menor ! renchérit le mec en blouse. Toma, ¿quieres morfina?

— Non merci, je suis allergique...

— Danke Paulette !

— Hoc vespere, gratias ago tibi, quia !

— Oh, qui son eles ? Autre amics ?

— Oui, euh, c'est compliqué... Bon, les amis, j'ai le regret de vous annoncer que la fête est déjà finie, après seulement une semaine de ripaille...

— Oooooh...

— Mais on remettra ça bientôt !

— Oooooh !

— Ouais par contre, ça sera pas chez nous, intervint Alba.

— Oooooh...

— Mais j'ai tout nettoyé ! protesta Paulette. Avant y avait des cadavres et maintenant y en à plus !

— Oui, mais il y a encore beaucoup trop de gens dans cette maison ! On les connais même pas en plus ! s'écria Georgette.

— Mais si, je vous les présente, il y a Ch...

— On s'en fout ! Allez, ouste, ça dégage !

Georgette dégaina Pedro et en moins de temps qu'il ne faut pour le dire, tous les amis de Paulette avaient déguerpi, laissant la brave fêtarde seule et ivre pour affronter le courroux de ses amis. Et pas un seul instant quelqu'un ne réalisa qu'elle était quand même trop forte de pouvoir ressusciter des gens décapités, tous étaient trop focalisés sur l'invention d'un châtiment disproportionné à sa faute.

Quand soudain, celle qui avait été mise hors-jeu au tout début du chapitre sortit des vapes et marmonna la phrase fatidique :

— Alors, voilà ce qu'on va faire...

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