15. Hésitation

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Non ! Non !!!

Ses mains me repoussent tandis que mes lèvres cherchent à garder les siennes. J’ouvre les yeux. Elle se lève. Mes doigts glissent le long de son corps jusqu’à ce qu’elle exécute un pas en arrière. Frustré, je chuchote, la voix cassée :

— Carly ! Ne me repousse pas.

Ses yeux brillent, une larme s’écoule. Je me redresse pour sécher la gouttelette qui roule sur sa joue mais elle secoue la tête en murmurant son refus, son regard triste posé sur moi.

— Va-t’en, Lukas, ordonne-t-elle avec fermeté. J’ai du travail. Je viendrais te chercher pour déjeuner, j’ignore encore à quelle heure.

Ma belle me tourne le dos, s’éloigne et pénètre dans son antre. Retombé mollement sur le canapé garni de coussins vert pâle, je tente de comprendre notre brève étreinte et son rejet. La force de notre baiser ne peut signifier qu’une chose : elle en avait envie autant que moi. Cette évocation soulève mon cœur et fait remonter la chaleur de mon corps. Peut-être n’a-t-elle pas retrouvé cette sensation d’osmose qui nous transportait, il y a quelques mois. J’espère que non ! Parce que moi, je l’ai bien reconnu, ce courant, ce désir profond, pressant de me fondre en elle pour ne plus faire qu’un.

Un bruit de verre brisé en provenance de l’intérieur me tire de ma torpeur. Je me précipite et reconnais le crépitement de l’eau dans un bac, dans la cuisine.

Carly, face à l’évier, ramasse des débris de porcelaine et s’approche de la poubelle quand elle me remarque, sous l’alcôve.

— Je peux t’aider ? proposé-je, désireux de lui montrer ma bonne volonté, et surtout de rester près d’elle.

— Lukas, ne racontes pas n’importe quoi ! maugrée-t-elle, faussement exaspérée. Tu sais faire la vaisselle ? Balayer ? Tondre la pelouse sous un soleil de plomb, avec plus de trente degrés ? Je ne pense pas. Alors retourne dans ton gîte, prends une douche, et détends-toi, ou connecte-toi à la wi-fi pour répondre à tes mails ou autres. Les codes se trouvent dans la panière sur la table de la cuisine.

Je ne suis pas d’accord. Je refuse d’être ainsi exclu.

— Je ne suis pas venu ici pour travailler, surtout dans un 60 mètres carrés, Carly, mais pour te voir, te parler, et te convier de me rejoindre à Las Vegas.

— Tu me demandes de tout abandonner ? me coupe-t-elle, incrédule.

— Non. Je veux que tu découvres mon univers. Je vous recevrai chez moi, tes enfants et toi.

Elle ne réagit pas, tapote nerveusement ses pouces l’un contre l’autre. Je reprends :

— J’ai beaucoup à me faire pardonner, mais je ne sais pas comment m’y prendre puisque tu me rejettes. Je suis prêt à brûler au soleil pour m’occuper de ton jardin si ça me permets de regagner ta confiance.

Ses doigts s’agrippent au bord de l’évier qui soutient déjà son dos tandis que, la tête légèrement baissée, elle fixe, immobile, une trace de confiture sur la table.

— Mon séjour ici sera très court, Carly. Des rendez-vous importants que je n’ai pas pu reporter, je préviens d’un ton pressant. Je repars mercredi matin à la première heure.

Elle reste de marbre, les lèvres pincées, les yeux égarés sur la gelée rouge. J’avance vers elle, mains tendues, paumes ouvertes :

— Laisse-nous une chance, s’il te plait.

Elle se détourne. Qu’importe. Je me colle à elle et l’entoure de mes bras avant de déposer un baiser sur son épaule dénudée.

— Je te promets que tu ne le regretteras pas, murmuré-je à son oreille, enivré par son parfum.

Elle gigote, de plus en plus fort, m’oblige à desserrer mon étreinte et parvient à me faire face. Je la serre avec douceur mais fermeté. La douceur de ses prunelles ambrées quand elles se posent sur moi m’oblige à partir à la recherche de ses lèvres. Entrouvertes. Elles m’attentent, m’appellent. La belle se ressaisit et tente encore une fois de s’écarter mais je tiens bon. Elle se dégage par la droite et s’arrête à deux pas de moi. Je soupire, désabusé, alors qu’elle me dévisage et prend une profonde inspiration.

— Je sais que tu fais de nombreux efforts, j’ai entendu tes aveux et je suis flattée, ravie de t’inspirer tous ces sentiments, heureuse que tu me les aies dévoilé, mais ça ne marchera pas tant que tu ne l’accepteras pas vraiment.

— Je ne comprends pas, Carly. Tu crois que j’aurais fait tout ça si je n’étais pas sûr de moi ? Qu’est-ce que tu veux de plus ?

— Qu’en pense Angie ? me défie-t-elle.

Elle cherche la dispute, c’est évident, et ma patience commence s’échapper :

— On s’en fout de ma sœur ! Le problème, ce n’était pas elle, mais moi !

— Tu te dis amoureux, mais tu n’es pas capable de lui dire la vérité ! Assume, Lukas !

— Arrête de chercher la petite bête et fais-moi confiance, grincé-je, les poings serrés derrière moi.

— Ça, ça va être plus compliqué, grimace-t-elle, le regard circonspect.

Je saisis ses poignets, plonge mes yeux dans les siens, expire profondément pour évacuer ma tension.

— Laisse-moi te prouver que tu te trompes sur mon compte, réclamé-je la voix chargé d’espoir.

Je ne lui permets pas d’hésiter plus longtemps et une seule enjambée me rapproche si près que ses seins me frôlent. Son souffle effleure ma bouche, et un long soupir m’échappe lorsqu’elle se jette sur moi pour m’embrasser avec fougue.

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