Bikers

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San Pedro, Los Angeles

Le chemin le plus direct pour rejoindre le port de Long Beach était de prendre l’I-110 plein sud, trente miles d’une autoroute toujours chargée. Nash opta pour l’accès par la 4e rue, plutôt que l’échangeur avec la I-101. Il engagea sa Harley dans le trafic en restant à vitesse modérée. Sa machine, totalement « custom », n’était pas trop adaptée à la circulation en zone urbaine et s’accommodait mieux des grands espaces de Mojave, mais il ne pouvait se résoudre à rouler en voiture quand il pouvait faire autrement.

Après leur rencontre avec Mike, Saka et Nash avaient décidé que leur priorité serait d’identifier la voiture mentionnée par le pianiste et par là de remonter à son propriétaire. Ils avaient choisi de travailler en parallèle, Mary se concentrant sur les concessionnaires et le fichier du DMV[1], Nash allant chercher des infos à la source, autour du port. Après quelques coups de fil, un indicateur avait accepté de le rencontrer dans un bar de San Pedro, à proximité de Long Beach Terminal Island.

Nash roula près d’une demi-heure avant de caler la moto sur sa béquille, devant un bâtiment bas, à la façade décorée d’enseignes de bières et de marques de lubrifiants. Une dizaine d’autres machines étaient soigneusement alignées, prêtes à reprendre la route. Le privé était trop indépendant pour avoir jamais adhéré à aucune fraternité de bikers, mais il entretenait des relations amicales avaient plusieurs d’entre elles, équilibrées par des échanges équitables d’informations et de services. Pas question toutefois de frayer avec les Hells Angels ou les Bandidos, ces organisations étant trop dangereuses à fréquenter.

L’homme avec qui il avait rendez-vous se faisait appeler Sam Feelgood. Il avait son quartier général à proximité du port et passait pour être bien informé sur tout ce qui entrait et sortait de la zone, surtout si les services des Douanes n’en avaient pas connaissance. Nash n’avait pas encore eu l’occasion de rencontrer Sam, mais son nom lui avait été communiqué par une relation commune, Bob Linker. L’homme derrière le bar leva les yeux de son smartphone quand Nash entra dans la salle commune.

« Je viens de la part de Linker, annonça Nash, en guise de présentation. J’ai rendez-vous avec Sam.

— Dans la salle au fond, répondit l’homme après avoir examiné le nouveau venu d’un regard suspicieux. »

En se rapprochant de la porte indiquée, Nash entendit les éclats de voix des hommes ainsi que le claquement des boules de billard. Une douzaine de types, portant pour la plupart de longues barbes, la tête couverte d’un bandana, le regardèrent entrer. Le silence se fit soudain. Une voix monta d’une table dans un angle de la pièce.

« Tu dois être Nash ! Bob m’a annoncé ta venue. Approche ! Qu’est-ce qui t’amène chez nous ?

— Je cherche une voiture, sur le port. Nash entendit des éclats de rire derrière lui.

— T’as pas remarqué les bécanes devant l’entrée ? Les bagnoles c’est pas trop notre truc !

— Moi non plus, en fait c’est le proprio qui m’intéresse, mais je n’ai pas grand-chose d’autre pour le retrouver.

— Et qu’est-ce qui te fait croire qu’on pourrait y arriver, nous ?

— Ce type conduit des caisses qui ne passent pas inaperçues. Ces derniers jours, il roulerait en Lamborghini et un peu avant il conduisait une Aston Martin. Ça change un peu des F150[2], non ? Je ne demande pas de me donner un nom tout de suite, mais si tu pouvais faire passer le mot à tes gars…

— Ouais, ça pourrait sûrement se faire, répondit Sam après quelques instants. Linker dit que t’es réglo, mais qu’est-ce que je gagne en échange ?

— Je connais pas mal de monde, des avocats, des intermédiaires, des négociants. Je peux te renvoyer l’ascenseur à la demande.

— T’es pas flic au moins ? Nouvel éclat de rire dans la salle.

— Je suis privé, répondit Nash en tendant une carte de visite. En fait, ce type cherche des noises à un de mes amis et j’ai promis de l’aider.

— Je garde ta carte, on ne sait jamais, à charge de revanche. Je vais voir ce que je peux trouver. Repasse demain à la même heure, je ne me sers jamais du téléphone pour les affaires. T’es de quel chapter[3] ?

— Free-lance, trop de sang indien pour entrer dans une organisation !

— Dommage, t’as l’air d’un type bien. Si tu changes d’avis, on peut en reparler. Tu veux une bière avant de partir ? »



[1] DMV : Department of Motor Vehicles

[2] F150 : le pick-up Ford le plus vendu aux USA

[3] Chapter : organisation locale de motards

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