Lorsque j'ai réalisé ce que je devais faire au quotidien suite à ma mauvaise expérience, l'immensité de la ville, autrefois attrayante, n'était devenu qu'un ensemble de batiments trop haut à m'en couper le souffle. La foule qui me rendait vivante a fini par m'étouffer. Et les yeux. Le seul fait de me regarder dans les yeux, sans prétention, venait me glacer le sang.

 Avant, je n'avais pas grand choses à penser. Je me préparais, faisais mon trajet en transport en commun pour aller en cours, terminais ma journée, et profitais de mon temps. Après, il y a eu des étapes bien définis : Se préparer, sortir de l'immeuble, autrement dit passer l'ascenseur en espérant que personne ne prendrait le même que moi. Faire le trajet de chez moi à l'arrêt de bus. Toujours en surveillant mes arrières. Et je veillais à ne pas arriver trop en avance car il fallait attendre à l'arrêt de bus. Rester statique dans un abri transparent, pendant que les gens marchaient autour de toi. Prendre le bus. Tenir pendant tout le trajet en prenant les précautions nécessaires pour être tranquille. Sortir du bus. Faire le trajet entre l'arrêt et l'école. Et tout ça, ce n'était que le déroulement du début de ma matinée.

 Je voulais devenir invisible. Transparente. Silencieuse. Et pourtant, cette envie de solitude me faisait mal. Car je voulais vraiment profiter d'être avec des gens, du bruit, profiter de tout. Je voulais rire, sur un fond de musique, couverte par des voix trop fortes qui parlent en même temps. Rencontrer de nouvelles têtes et découvrir leurs histoires passionnantes. Je me suis battue contre ça. Et je me bats encore, comme tout le monde combat ses peurs.
 Aujourd'hui, je me rend compte de ce que je ne voyais pas avant. De cette hypervigilance qui me suivait comme mon ombre. Et il faut reconnaître que c'était effrayant.