15 – Marche ou crève, Richard Bachman (aka Stephen King)

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Un livre par jour, quand j'arrive à m'y tenir (désolé pour hier), la couverture en avatar pour jouer le jeu de l'image et un texte personnel pour m'affûter la plume – ça n'a rien de sexuel – et m'offrir un bol d'air dans un contexte saturé.


J'en ai causé aujourd'hui avec un ami proche et je comptais de toute façon t'en toucher quelques mots à l'occasion, alors pardon pour la redite un rien soudaine, mais revoici Stephen King, haut placé dans la liste des auteurs qui m'ont marqué dans ma vie de lecteur. Enfin, Stephen King... Un semblant de mauvaise foi m'incite à le présenter également sous son pseudonyme, Richard Bachman, auteur de romans noirs mêlant anticipation et critique sociale. « Running Man », que j'évoquais il y a quelques jours, parut également sous ce pseudonyme.


Les points communs entre les deux œuvres abondent : en toile de fond, un monde orwellien, où un totalitarisme qui ne dit pas son nom régente tous les aspects de la vie en société. Le culte du chef, l'embrigadement des esprits, la paupérisation des masses et les faux-semblants d'une culture axée sur la manipulation des images, autant de points de convergence entre deux romans jumeaux qui adoptent le principe de la dystopie pour développer une trame essentiellement basée sur l'action.


Dans les deux cas, les protagonistes se voient obligés de participer à un jeu. Seules leurs motivations diffèrent : là où le Ben Richards de « Running Man » se voyait contraint et forcé par une réalité économique et sociale, le Ray Garraty de « Marche ou crève » se soumet volontairement à la propagande d'Etat en s'inscrivant dans une sorte de discipline sportive qui tient à la fois du marathon-spectacle et du jeu de massacre : cent adolescents prennent part à une longue marche ininterrompue à travers plusieurs états. Celui qui s'arrête écope d'une balle dans la tête. Celui qui ralentit au-dessous d'un certain rythme a droit à un avertissement et la balle arrivera au bout du troisième. « Dix petits nègres » puissance dix à ceci près qu'on connaît l'assassin, un militaire, membre de l'escorte qui accompagne le troupeau sur la route.


De tous les candidats, il n'en restera qu'un. Pour la gloire, pour l'argent et pour un prix spécial qui s'apparente au vœu que t'accorde le génie des contes orientaux. Tout ce que désires, tu l'auras.


On peut y lire une métaphore du libéralisme économique et de cette foutue loi de la jungle censée codifier nos quotidiens de travailleurs actifs, de consommateurs béants, de chômeurs exploités, on peut aussi y déceler un regard sinistre sur nos destinées humaines, on peut se laisser simplement porter par tous ces personnages qui se croisent et se décroisent au rythme de la marche et de son décompte foutrement angoissant. Je ne sais pas trop ce que j'y vois mais en fait de livre de chevet, voilà clairement celui que j'ai le plus relu. Je l'ai offert à un excellent ami, il y a quelques années. Il quittait la région pour suivre la mère de sa fille – et donc l'enfant – dans une région où il avait tout à construire. Je ne suis pas sûr qu'il l'ait ne serait-ce qu'entrouvert mais je sais qu'il a pu lire des centaines de fois ces mots sur la couverture : « Marche ou crève ». Et il continue, le garçon, il continue.


Petit détail pour conclure. Il s'agit du premier roman finalisé par Stephen King, vers 1966-1967. Il était encore étudiant et le livre fut refusé un peu partout. A mon avis, son meilleur. Et de loin.

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