CHAPITRE 2
Derrière les carreaux, un salon coquet baignait dans la lumière chaude et vacillante d’un feu de cheminée.
Face à l’âtre, assise dans un gros fauteuil rembourré, une vieille femme tricotait paisiblement, les yeux clos. Un gros chat roux dormait en rond sur ses genoux recouverts d’un plaid en laine.
Ses cheveux longs étaient gris comme la cendre.
Son visage, plissé comme la peau d’une vieille pomme.
Ses longs doigts maigres maniaient les aiguilles en bois avec adresse. Une maille à l’envers, une maille à l’endroit, au rythme de la pendule derrière elle.
Soudain, elle ouvrit les paupières et fixa droit devant elle, dans le vide.
Ses yeux étaient blancs comme le sel.
Gurvan s’écarta de la fenêtre, son coeur battait la chamade. Etait-ce une sorcière ? Ou une innocente grand-mère ? Avait-il été repéré ? Devait-il prendre ses jambes à son cou ? Ou lui rendre une petite visite, pour faire connaissance ? Il semblait faire si bon, à l’intérieur. Et ces petits biscuits dorés qu’il avait cru apercevoir, dans le pot en verre, sur le rebord de la cheminée ! “ Une femme capable de concocter des gâteaux aussi appétissants ne peut pas être dangereuse” , songea-t-il avant de se reprendre “Ou alors, justement, elle attire les petits enfants avec des sucreries pour mieux les dévorer !”
Le ventre de Gurvan gargouilla. L’évocation de nourriture sucrée avait éveillé son appétit. Au fond, que risquait-il à regarder de nouveau, histoire d’en savoir plus sur l’occupante de cette étrange maison ?
Il se replaça à son poste d’observation et constata que la buée de son souffle sur les vitres s’était transformée en givre.
Délicatement, il frotta la couche de glace du revers de sa manche pour y voir plus clair.
Lorsque le trou fut suffisamment grand, il colla son oeil à la vitre et poussa un cri de stupeur : juste derrière, le gros chat roux l'observait !
Le matou, aux yeux rouges comme des braises et aux moustaches pointues comme des épines, poussa un horrible feulement et dévoila ses canines pointues et sa langue râpeuse .
Gurvan tomba à la renverse sur le sol gelé, se releva et se mit à courir droit devant lui, sans réfléchir, sans se retourner.
Lorsqu'il estima avoir parcouru suffisamment de distance, il s'adossa à un arbre, souffla et tourna la tête timidement pour regarder dans son dos, craignant de se retrouver nez à nez avec le matou diabolique : heureusement, il était seul. La demeure de la sorcière au chat fou avait disparu derrière les arbres.
Il était temps de rentrer à la maison, ses parents devaient s’inquiéter.
Gurvan regarda autour de lui et dut se rendre à l’évidence. Il était perdu.
Soudain, une voix grave retentit derrière lui : “Bonjour, mon ami. Si tu le souhaites, je peux t’aider”.
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