Roland marche dans le « couloir entre les mondes », à la recherche de l’huis menant au lieu nommé MOOC, il l’a déjà empruntée. Il se souvient la première fois, la toile avait vibré à la naissance de celui-ci. Cette fois, la vibration en annonce la fin. Peut-on sauver ce monde ?

Roland arrive devant la porte, de toutes celles que recèlent les replis du couloir, c’est la seule équipée de lucarnes. S’il regardait dans le hublot de l’ouvrant gauche, Roland verrait son reflet, l’observant circonspect. Dans celui du vantail droit règne le néant. Il ne s’agit pas de noir, ni de gris, ni même d’une absence de couleur, mais du « Néant », celui que l’on ne peut percevoir avec les yeux, mais qui dévaste l’âme.

Il franchit le pas, il demande à son shaed de le dissimuler dans l’ombre et se glisse entre les deux battants. Roland sait que, contrairement aux autres portes qui donnent toutes sur des endroits isolés (caves, oubliettes, grottes, arbres creux), celle-ci ouvre sur un amphithéâtre immense, dans lequel se presse une foule encore plus cosmopolite qu’au saloon de l’Honnête John.

Il y a là plusieurs milliers de personnes. Des magiciens et magiciennes, des sorciers et sorcières, des pirates, des guerriers et guerrières, des mestres, des servants et servantes de diverses religions, des médecins, des infirmiers et infirmières, des guérisseurs et guérisseuses, des barbares, des explorateurs et exploratrices, des aventuriers et aventurières, des cartographes, et toutes sortes de gens, humains ou non, venus de nombreux mondes, de diverses époques.

Le brouhaha s’estompe doucement, une femme entre sur l’estrade et s’assied sur un fauteuil de cuir dans le plus complet des silences.

« Bienvenue dans cette troisième et dernière session de notre MOOC, à la découverte des royaumes imaginaires de la fantasy ! »

Roland connaît bien maintenant l’Érudite AB. Il se détend, l’ombre disparaît autour de lui, le shaed prend l’apparence d’un sweat à capuche. Roland sort d’une de ses nombreuses poches, son study-pad, un artefact qui n’attire pas l’attention dans cette sphère temporelle, puis le range. Comme d’habitude en ce monde, il n’enregistrera pas. Les Érudits n’ont pas besoin des Étudiants pour diffuser leurs savoirs, ils ne sont pas soumis aux guildes marchandes comme les conteurs, même s’ils sont parfois contraints par les tentacules du kraken ©.

Roland reste auprès de la porte, en haut des gradins. Quelques minutes plus tard, il en descend quelques degrés, écoute distraitement les conversations des uns et des autres et pense déjà à la prochaine étape de la quête : sera-t-il seul ou trouvera-t-il des compagnons ? Sans doute, rêve-t-il aussi un peu d’appartenir un jour au cercle des Érudits. L’hémicycle est également, une sorte de gare. Hormis la double porte qui donne sur le « couloir entre les mondes », elle-même protégée par un charme d’invisibilité, de nombreuses issues, menant à une multitude de mondes, se devinent.

Le sort de ce monde semble scellé, mais la possibilité d’en faire naître un nouveau, relativement proche, existe-t-elle ? Roland se dirige vers une faille, dissimulée dans un repli temporel, située à la droite de l’estrade. Il la franchit.