50. Ailière américaine

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Le lendemain, nous avions dû suivre la course d’obstacle avec l’adjudant-chef Morvan et étions repassées sur le stand de tir piéton. Cela me plut bien de manipuler les armes après m’en être réellement servie, je vis les choses un peu différemment.

Après déjeuner, les filles quittèrent le vestiaire en tenues de pilotes pour aller s’exercer sur le parcours. Mercedes, Héloïse et moi nous retrouvâmes seules. l’Espagnole avait l’air anxieuse, peu encline à parler. Alors nous grimpâmes à la salle de briefing sans nous dire un mot. Lorsque nous fûmes à l’intérieur, Mercedes se plaça devant la baie d’observation pour perdre son regard vers la piste vide. Héloïse s’assit sur une des chaises, la jambe agitée.

— Stressée ? m’étonnai-je.

— Ben nouvelle fille.

— Ça s’est bien passé avec toutes celles que tu as eues.

— Toi, Mercedes et Dahlia. Mais peut-être que…

La porte s’ouvrit et Orinta Paksas entra, suivie d’une fille d’une beauté tout droit sortie d’un magazine. Elle avait de longs cheveux châtains, un visage fin, des yeux verts, et une taille de guêpe. Héloïse se leva comme un diable, pour saluer en même temps que nous. Le colonel nous introduisit :

— Caporal Varguas, je vous présente votre chef d’équipe, le Sergent Fontaine, votre ailier, le première-classe Muñoz et votre gynécienne, le caporal Carlier. Je vous présente le caporal Kylie Varguas qui était pilote dans l’armée impériale américaine. Prenez place.

Nous nous assîmes.

Le colonel nous présenta la stratégie à venir. Elle ne fit que répéter ce qui m’avait été présenté par le stratège lors de ma visite au siège de l’armée de terre. Le Caracal Caracal était un petit croiseur du même genre que le Gulo Gulo. Nous partagerions l’espace avec un équipage réduit, et avec les Carcajous Maudits, ce qui me rassurait. La mission ne serait pas facile car nous allions au-devant d’ennemis déjà retranchés. Et contrairement à mon attaque du bunker de communication, il n’y aurait ici aucune roche naturelle pour nous servir d’abri. L’idée d’un trio d’ESAO était mu par ce besoin d’une puissance de feu pouvant s’alterner. Plus de détails nous seraient fournis à bord, le colonel resta donc bref sur la présentation, et insista sur le fait qu’il fallait que nous apprenions très vite à nous connaître les unes les autres. Elle conclut rapidement à l’attention d’Héloïse :

— Carlier, conduisez vos pilotes à l’infirmerie et préparez-les. Sergent, j’aimerais ajouter un mot à votre attention.

Les trois autres filles quittèrent la pièce. La porte fermée, les épaules de Paksas s’affaissèrent un peu :

— Pour être honnête, vous devez faire connaissance en un temps record. Il va falloir que vous preniez des décisions sous stress, pour vous trois. Mettez-vous déjà bien en tête que vous êtes la chef de l’équipe, et que c’est vous qui décidez tout, y compris l’heure à laquelle elles dorment, mangent.

— Je pense que lieutenant Conti nous donnera ses ordres.

— Ce que je veux dire c’est qu’il faut que vous créiez une légère distance. Il faut que cela reste vos équipières, il faut que vous soyez intimes et en même temps que chacune sache quelle est sa place. Sur le terrain, si vous demandez quelque chose, il faut qu’elles répondent en un claquement de doigt.

— Je ne pense pas que Mercedes me désobéira. Je ne connais pas Kylie.

— Le caporal Varguas a l’expérience du terrain, la hiérarchie a été définie clairement, elle ne vous fera pas défaut. Cela peut être plus difficile de gérer une amie. Je suis tout de même confiante car votre talent de pilote est reconnu de toutes, tout comme votre intrépidité.

— Mercedes est stressée, c’est la seule chose qui m’inquiète.

— Parlez-lui. Si elle est tendue, vous n’en retirez rien sur le terrain. Mercedes est votre camarade avant tout, ne vous mettez pas la pression. Parlez-lui comme une équipière.

— D’accord.

— Je vous souhaite bonne chance, sergent. Dites-vous que la mission sur la lune de Cendrillon II est périlleuse. L’assaut final, si les Crustacés sont pris de court, devrait être bien plus aisé. Nous aurons le nombre, la marine, l’armée de l’air, tous nos ESAO réunis. Si c’est bien l’Etat-Major des Crustacés, nous allons apporter la paix sur bon nombre de nos colonies. On devrait pouvoir reprendre une activité économique florissante, renforcer les frontières entre nos systèmes stellaires. C’est une ère de paix qui s’annoncera.

— Je l’espère.

— Je vous retrouve après votre exercice.

Je la remerciai d’un regard, puis rejoignis l’infirmerie devant laquelle Mercedes attendait. Comme nous étions seules, j’avançai la discussion :

— C’est cool que tu viennes.

— Sans avoir fini ma formation ?

— J’ai survécu. Et puis tu trouveras peut-être l’âme sœur à bord.

— Peut-être.

— Kylie est jolie.

— Elle est super bien gaulée, sourit Mercedes, mais c’est peut-être une connasse.

— Peut-être.

— En quoi consiste la préparation ?

— La préparation ?

— Ben avec Héloïse.

— Elle vous met un implant de deuxième génération. Plus cher, mais plus sensible.

Mercedes grimaça :

— Chouette ! J’ai un tellement bon souvenir du premier.

Je haussai les épaules. Avec le temps, je n’en gardais pas un si mauvais souvenir. Nous attendîmes, puis Kylie sortit pour laisser la place à Mercedes. Ne sachant pas comment aborder la conversation je lui dis :

— Pas très agréable.

— Non. Mais c’est mieux que dans l’armée impériale d’Amérique, répondit-elle avec une voix légèrement nasillarde.

— Ah bon ?

— Gynécien n’est pas un métier qui existe. T’as d’un côté le médecin ou l’infirmier, et de l’autre le mécanicien. Moi, l’infirmier de mon régiment, ce n’était pas le genre à y aller avec douceur. Il t’enfonçait le speculum comme si c’était un concours de vitesse, et pas le petit modèle.

— Aïe ! Et vous n’aviez pas d’aide pour vous installer dans l’ESAO ?

— Non. On apprenait à s’installer toute seule.

— Tu as fait beaucoup d’opex ?

— J’ai fait deux missions de quatre mois.

— D’accord. Je peux compter sur ton expérience alors.

— J’espère. Et toi ?

Kylie était plutôt bavarde, loin de l’image de renégate qu’on pouvait s’en faire. Mon grade ne la rendait pas taiseuse, elle me tutoyait, et ne jugeait pas ma faible expérience. Au contraire, mon assaut piéton dans le bunker m’attira son respect. Nous échangeâmes sur nos expériences et me rendant compte de son vécu, cela me rendait assez nerveuse. Bien qu’à l’aise dans la discussion, je ne me sentais pas la légitimité de la diriger sur le terrain. Mercedes sortit avec Héloïse qui s’exclama toute pimpante :

— Vous vous rendez compte ! Mes deux premières pilotes avec moi, en mission. C’est comme si nous étions faites pour être réunies.

— On y va, l’interrompis-je.

Héloïse pinça les lèvres.

— Oui, mon lieutenant.

— T’es pas sergent ? s’étonna Kylie.

— Si. Héloïse, explique-lui.

Nous gagnâmes l’inconfortable vestiaire tandis qu’Héloïse faisait l’éloge de mon dossier scolaire. Kylie observa le vestiaire

— Il n’y a pas de cabine individuelle ?

— Bienvenue en Europe, soupira Mercedes.

— Faut s’habituer, dis-je. Les petits vaisseaux comme le Caracal-Caracal ne laissent pas de place pour l’intimité.

— Tu vas regretter l’armée impériale, sourit Mercedes en ouvrant son casier.

— Non, je ne suis pas pudique à ce point.

Elle se plaça face à son casier. Devant le mien, j’ôtai mon pantalon et enfilai mes bas. Mercedes lui glissa :

— Faut pas, t’es jolie.

Elle ôta son t-shirt, dévoilant un ventre parfaitement plat, son treillis puis sa culotte sans complexe. Mercedes et moi dessinâmes des yeux les courbes de ses fesses musclées avant d’échanger un regard entendu. Kylie dit :

— Je ne suis pudique que d’une partie de mon corps, surtout devant les garçons.

Elle ne précisa pas laquelle. Mercedes et moi enfilâmes nos brassières ivoires. Kylie ôta son soutien-gorge en rougissant, ses seins s’allongèrent pour trouver une forme en obus. Elle balbutia :

— Pas sexy, hein ?

— Moi j’en n’ai quasiment pas, lui dis-je.

— J’aime bien tes tatouages, dit Kylie à Mercedes pour fuir la conversation.

Elle refit sa queue de cheval, je baissai ma culotte puis elle demanda :

— Les WC ?

Je lui désignai de la main, elle s’éloigna et Mercedes me murmura :

— J’adore son cul !

— Et ses seins ? chuchotai-je.

— Peu m’importe.

Elle me fit un clin d’œil et nous nous enfermâmes chacune dans une cabine. Je me soulageai, nettoyai mon rectum, puis lorsque je sortis, Kylie qui nous attendait se mit au garde-à-vous. J’aurais ri si ça ne m’avait pas rappelé ma position délicate de leader. À poil, je ne me sentais encore moins l’âme d’une chef. De surcroît j’étais très frêle par rapport à mes deux équipières. Kylie avait des cuisses musclées qui lui élargissaient les hanches, mais elle était faite de tonicité, comme Mercedes. Je pris la direction du couloir sans un mot, et elles m’emboîtèrent le pas. Kylie murmura à Mercedes :

— Elle a de jolies fesses.

Héloïse surgit de mon hangar et indiqua à l’Américaine où se trouvait son ESAO :

— Ton F-04 est par là. Je commence par le sergent-lieutenant, je m’occupe de toi en dernier.

Je passai la porte et frétillai à la simple vue des sondes luisantes. Héloïse ferma la porte donnant sur le couloir, tandis que j’enjambais à la hâte la sellerie. Lentilles et lecteur frontal placés, je m’accroupis.

—T’y vas direct ? Tu ne veux pas que je te prépare ? questionna Héloïse.

Le temps sans piloter me paraissait si long que j’étais d’une humidité qui ne laissait aucun doute. Je plaçai la sonde anale sous le regard attentif d’Héloïse, puis savourai l’insertion. Le transmetteur vaginal suivit, ses protubérances parfaites ouvrant progressivement mon écrin resserré. Héloïse se régalait de déchiffrer les expressions que mon visage ne pouvait cacher. Elle était excitée, ça se voyait comme un arbre au milieu du désert.

— Ça faisait longtemps, sourit-elle.

— Oui. Aide-moi.

J’étais trop fébrile pour poursuivre par moi-même. Ses doigts rapides terminèrent donc la procédure. Verrouillage du carter sur le clitoris, arrimage de la poitrine, fermeture des arceaux, remontée de la selle. Grimper à bord avait beau être devenu une série d’automatismes, le plaisir d’être à l’intérieur n’avait pas disparu. La sensation d’union avec le Furet m’était chaleureuse.

— Ici TBK12, je suis prête.

Je quittai mon compartiment et rejoignis la piste de béton familière. De nouvelles traces de brûlures et de nouvelles saignées s’étaient dessinées. Le pivot de la sonde vaginale me mettait dans une situation de confort qui dépassait l’anxiété. Peu importait comment se déroulerait la mission, pourvu que je fusse à l’intérieur de mon Furet. On pouvait me rétrograder, me déclarer inapte au commandement, seul piloter m’importait.

Cinq minutes plus tard, le Rhino de Mercedes me rejoignit à pas lourd. Le voir me fit d’autant plus plaisir, comme si j’étais devenu le Furet et qu’il revoyait son vieux camarade défonceur de barrage. Je lis son matricule sur l’affichage holographique.

— Salut TBK17. Bienvenue dans l’unité.

— De m’entraîner avec toi, ça me file la patate, me confia-t-elle.

L’hologramme de TBK16 s’afficha, et une minute après, un F-04 gris acier s’avança. C’était un modèle plus ancien que le Tatou.

— Ils n’avaient pas mieux à te donner ? questionna Mercedes.

— J’ai demandé à avoir un Faucon. C’est ce que j’avais dans l’armée impériale, répondit Kylie. Mais la sellerie est de dernière génération. Je ne sais pas si je vais avoir le temps de tout essayer avant que nous soyons partis en mission. Celui-ci est bien entretenu.

Ses bras déployèrent un bouclier de plume d’acier et elle prit la position pour s’abriter derrière. La voix d’Héloïse chanta :

— Ici TBK11, votre coordinateur de mission. Je vous invite à vous échauffer par un petit footing de dix minutes.

— C’est parti ! annonça Mercedes.

Sa voix était empreinte de motivation, et c’était plutôt rassurant. Kylie et moi lui emboîtâmes le pas. Héloïse se sentit obligée de nous mettre la pression :

— Ici TBK11, je vous annonce que le lieutenant Conti vient d’arriver et va assister à votre exercice.

Mon vagin était détrempé, les deux sondes tournaient agréablement l’une contre l’autre, le plaisir affleurait déjà la ligne de l’orgasme. Ici, il n’y avait aucun danger pouvant parasiter le désir. Avant que les dix minutes ne fussent écoulées, trois Tourteaux sur roulettes surgirent et foncèrent droit sur nous.

— Ça en fait un chacune, annonçai-je. Qui se sent prête ?

Aucune réponse. La pression du commandement fit remonter mon anxiété par-dessus mon excitation.

— Ne répondez pas toutes en même temps.

— Pas moi répondit Mercedes

— Moi non plus, annonça Kylie.

Nous esquivâmes les assaillants. Les sensations avaient beau être agréables, l’orgasme s’était éloigné. Mon cerveau était perturbé par la nécessité de diriger efficacement les autres. Sans connaissance de leur niveau de libido, il m’était impossible de décider une stratégie. Trois cibles en forme de Homards roulèrent à leur tour sur la piste. Je les pointai de mon bras et tirai une salve de balles. Kylie hurla :

— Attention !

Je bondis sur le côté. Le tourteau qui me fonçait dessus m’effleura. Je fus propulsée et m’écroulai dos au sol. Je ne fus pas estomaquée, j’observai la scène lucide. Le tourteau faisait demi-tour. Les filles étaient éloignées. Je me sentais prête à jouir. Je m’assis en ordonnant :

— Foncez sur moi ! Alignées derrière-lui. Je vous dirai quand dégager !

Les filles s’alignèrent derrière mon assaillant, poursuivies par les leurs. J’électrifiai la sellerie. Une violente contraction m’échappât. Je voulais tant réussir ce coup-là, qu’il m’était impossible de rater. Mes cuisses tremblèrent. Je gémis :

— Maintenant !

Les filles s’écartèrent de l’axe, mais l’orgasme ne vint pas. Les deux Tourteaux qui suivaient mes camarades se dispersèrent à leur poursuite. Je levai les bras en protection, fermant les yeux pour me concentrer sur mon ressenti. J’électrifiai mes tétons, mes muscles se tétanisèrent, mes cuisses tremblèrent. Le Tourteau me percuta au moment où l’orgasme me frappait. Mon rayon le trancha en deux, mais le choc m’ébranla complètement. Le plaisir fut frustrant de brièveté. Etourdie par l’impact, j’avais envie de mieux. Je me relevai en interrompant les stimuli, la poitrine douloureuse, tremblante jusque dans les doigts. Il fallait que je gagnasse la confiance de mes équipes et que je fusse capable d’un rebond. Je massai ma poitrine, mon anus et mon vagin pour les détendre de l’écho du choc électrique. Les filles continuaient à courir comme des lapins fuyant des renards. C’était déplorable pour une unité de combat. De mon côté, je sentais le plaisir se maintenir sur sa zone de plateau. Les massages, plus doux, me procuraient bien plus de plaisir que l’électrisation. J’activai le palpeur clitoridien et me sentis prête à un nouvel orgasme. Il était temps de montrer au colonel Paksas et au lieutenant Conti ce que nous valions. L’idée de les épater m’excitait.

— Mercedes, fonce sur moi, et penche-toi pour que je saute par-dessus toi. Kylie, suis le Tourteau de Mercedes à vingt mètres, et dégage de l’axe dès que je tire.

— OK, répondit l’Américaine.

Je m’élançai à quatre pattes vers le Rhino. Cette position me rappela combien j’appréciais de la sentir. Je ne cessai aucune des palpations lentes sur mon clitoris et je retins ma respiration pour ne pas jouir trop vite. Mercedes plongea à plat ventre, je plaquai mes mains pour effectuer un saute-mouton. J’inspirai et libérai le feu du désir sur la carapace du Tourteau. Kylie s’enfuit de l’axe et je suivis son poursuivant jusqu’à l’impact.

Je repris la position quadrupède en reprenant mon souffle. Le plaisir avait été moins mécanique, plus savoureux, et les deux dernières carapaces étaient transpercées. La voix d’Héloïse nous annonça :

— Félicitations, TBK12. Patrouillez la zone. Risque d’attaque à venir.

— Reçu, répondis-je.

Les roulettes traînèrent leurs bris de carapace en direction des hangars pour être rechargées. Tout en marchant sur mes quatre membres pour approfondir la sensation du transmetteur dans mon ventre, j’haletai :

— Je compte sur vous.

— Je suis chaude, indiqua Kylie.

— Ça vient aussi, confia Mercedes. C’est mieux quand j’ai du temps pour m’échauffer.

— En mission, généralement, t’as le temps, la rassurai-je.

— Je confirme, surenchérit Kylie.

La voix de l’Américaine s’était légèrement étouffée, m’indiquant qu’elle contenait sa puissance. Lorsque le premier Tourteau rafistolé surgit, elle ouvrit le feu dans la seconde. Son rayon dura six longues secondes. Mercedes la félicita :

— T’es plus rapide que ton ombre quand t’es chaude !

Les deux autres Tourteaux surgirent. Mercedes campa sur sa position. Je lui dis :

— TBK17, je te les aligne.

Le premier fonça vers moi, le second cibla Mercedes.

— Il me faut du temps.

— Kylie, percute-le ! criai-je.

L’Américaine s’élança à toute vitesse vers celui qui me ciblait, alors que j’espérais qu’elle occupât l’autre. Elle déploya ses plumes d’acier comme un bouclier et percuta le Tourteau. Je m’orientai vers le second. Mon coup d’épaule le dévia à peine, mais Mercedes saisit l’occasion pour le bloquer dans sa course et le maintenir.

— Kylie ! Amène l’autre !

Le second revenait à l’assaut contre Kylie qui, campée sur sa position reculait malgré tout, ses ergots glissant sur le béton. Mercedes ouvrit le feu sur la carapace de celui qu’elle tenait. J’augmentai la cadence de mes sondes, passai la roulette hérissée sur mon clitoris et déclenchai un troisième orgasme qui pulvérisa son assaillant. Je ne cessai pas le mouvement des sondes, craignant un nouvel assaut, je me contentai de le ralentir lentement. Hélas, la lassitude gagnait mes muscles. La voix de Paksas nous apaisa :

— Prenez dix minutes pour récupérer et analyser ce qui a manqué à votre stratégie. On débriefe juste après.

J’interrompis mes stimulateurs avec soulagement et me redressai sur mes jambes. Je me sentais nulle comme tacticienne. J’avais foiré ma communication avec Varguas et n’avais pas désigné la cible que je lui allouais. Mais il n’était pas certain que nos spectatrices s’en fussent rendu compte.

Après dix minutes, Paksas nous annonça :

— J’ai volontairement envoyé les Tourteaux après cinq minutes. L’ennemi ne vous laissera pas toujours le temps de vous chauffer. Vous n’aurez pas le temps d’être formées aux techniques. Il faut que vous appreniez à communiquer entre vous. Savoir laquelle est capable de faire feu en moins de trente secondes. Je sais qu’obtenir un orgasme, surtout sous stress, n’est pas disponible sur un minuteur. Sur les groupes qui n’ont pas l’habitude, on conseille souvent de pouvoir donner une estimation en secondes de son ressenti. Moins de trente, Moins de soixante, ou pas. Ça s’apprend en se connaissant soi-même et en sachant communiquer. Ici, nous avons eu des assauts de Tourteaux, sans possibilité de repli. C’est un exercice difficile, très éloigné du terrain.

Orinta Paksas continua à nous rassurer. Néanmoins, elle illustra ses propos par une mission durant laquelle elle n’avait pas eu le temps de se préparer. Ayant vécu l’attaque de la raffinerie, je pus faire un parallèle. L’assaut avait été plus brutal et violent. Très vite débordée, Paksas avait dû combattre à mains nues pour combler son manque de munition. Le chaos était tel qu’il lui avait été impossible d’arriver à un orgasme, pas avant que les renforts aériens ne lui permissent de prendre du répit. Après confia-t-elle, elle avait su utiliser ce temps et s’était terrée plus longtemps pour déchaîner plus de dix secondes d’enfer sur les troupes ennemies. Kylie raconta alors une mission, la seule sur laquelle elle n’avait pas eu le temps de se préparer et elle avait failli y rester. Le colonel conclut l’échange :

— Très bon exemple. Vous avez quinze minutes pour récupérer, comme pour prendre vos marques.

La poitrine tendrement massée par les pétales, la peau apaisée par la climatisation, je me remis en condition. Je soignai ma communication :

— TBK12 en plateau.

— T’es une machine à orgasme, me dit Kylie. J’ai besoin d’un peu plus de temps.

— Je ne vais pas remonter comme ça, confia Mercedes.

— Imagine-nous sous la douche, proposai-je.

— Hmm.

M’inspirant de mon vécu, je lui dis :

— Imagine juste. Kylie arrive derrière, ses mains pleines de savon passent sur tes hanches, et ses baisers se font délicat dans ton cou.

— T’étais obligée de me choisir ? rit Kylie.

— T’arrête pas, me dit Mercedes.

— Sa poitrine écrasée contre tes épaules. Héloïse se joint à vous et ses doigts te massent les seins. C’est super agréable. Elle finit par les prendre en bouche. Ses baisers descendent sur ton ventre et se perdent entre tes cuisses. Elle sort sa langue, et alors là, c’est l’extase.

Je la laissai à son imagination. Mercedes m’indiqua :

— Merci, chef, ça fait son effet.

— C’est le fantasme de qui ? se moqua Kylie.

— Je connais les goûts de Mercedes, dis-je.

— Presque, me répondit l’Espagnole. Je préfère t’imaginer à la place d’Héloïse.

— Je m’en rappellerai pour la prochaine fois.

— Et je suis dans tes goûts ? questionna Kylie.

— Elle adore ton cul, répondis-je.

— Ah ouais ?

— Tes seins aussi, ne complexe pas, lâcha Mercedes.

— Je suis flattée, répondit simplement Kylie.

— Bon, ben vous avez fait connaissance, rit Héloïse.

— Oui, conclus-je. Qui est sur son plateau ?

— Plateau atteint, confia Mercedes.

— Plateau atteint également, ajouta Kylie. J’ai bien aimé la narration. La prochaine fois, il ne faudra pas hésiter à développer.

— Je téléchargerai de la littérature, promis, dis-je.

Nous patrouillâmes entre les murs de béton encore quelques minutes. Kylie confia combien elle appréciait la conception des selleries de nouvelle génération, et décrivit sans gêne le ressenti du gode entre ses cuisses.

Deux orgasmes plus tard, et des exercices de déplacement en groupe, l’après-midi touchait à sa fin. Nous communiquions plus aisément, sans barrière de mot ni de pudeur. En revanche, je trouvais les exercices plus difficiles que la réalité. Les combats sur le terrain avaient été jusqu’ici très intenses, mais finalement bref. Même si pour un cerveau, l’absence de stress était meilleure pour contrôler les hormones, il me manquait la motivation du concret pour jouir à répétition. Mon clitoris était d’une sensibilité désagréable, comme si on l’avait brûlé. Et je ne pouvais plus qu’utiliser la stimulation électrique. Je transpirais tant que mes orteils et mes doigts glissaient dans les gantelets de gélatine. Néanmoins j’étais détendue, inondée d’endorphine. Héloïse déclara :

— On arrive à la fin de l’exercice, un tir sur cible. Prenez votre temps, vous devez parvenir à trois orgasmes simultanés.

La cible se présenta au bout du pas de tir. Je me mis en place à quatre pattes, cherchant par la rotation du transmetteur à désengourdir les sensations dans mon bas ventre, puis j’électrifiai légèrement la bague clitoridienne. J’utilisai la ventilation, pour sentir ma sueur rouler sur ma peau. Le rebond de mon plaisir me surprit. J’annonçai :

— TBK12. Moins de deux minutes.

— TBK16, sur le plateau, déclara Kylie.

— Attendez-moi, je suis loin, supplia Mercedes.

J’attendis, des micro spasmes venant de temps à autre contracter mon ventre et mes fesses. Je cessais l’électrification chaque fois que je sentais que le contrôle de mon corps allait m’échapper. La retenue me rappelait des souvenirs de mes expériences d’adolescente ? Plus longtemps le plaisir était freiné, plus l’apogée était délicieuse. Kylie me rattrapa :

— TBK16, moins d’une minute.

— TBK12, soufflai-je. Je me retiens.

J’avais trouvé l’intensité électrique idéale pour me maintenir à la limite. Je maintenais juste la sonde vaginale, à une cadence langoureuse, alors que les électrons la traversaient. Mes muscles tremblaient et je serrais les dents pour contenir mon orgasme. Mon bassin cherchait à bouger malgré le harnachement, laissant couler son humidité abondante Un simplement effleurement sur le clitoris aurait suffi à déclencher l’orgasme. Mercedes gémit :

— TBK17, moins d’une minute.

— Je suis à deux doigts couina Kylie.

J’écoutais le halètement de mes deux camarades pour me coordonner. Mercedes soupira :

— J’y suis…

Sa respiration se contracta, j’augmentai l’électrification et la vitesse du transmetteur vaginal. Kylie lâcha un cri aigu sans retenu. Le tir de Mercedes surgit des naseaux de son Rhino. Dans la seconde qui suivait, je lâchai tout ce qui me restait d’énergie. Les rais se croisèrent, puissants, aveuglants. Après quelques secondes savoureuses, ils s’éteignirent, et il ne restait dans la communication que la respiration haletante de mes camarades, troublante d’intimité.

J’attendais de nouveaux ordres, cherchant de nouvelle manière de me maintenir excitée, lorsque les exosquelettes de mes anciennes camarades passèrent devant nous d’un pas lent trahissant la fatigue des pilotes. Elles disparurent dans leurs compartiments, et la voix d’Héloïse nous libéra :

— Fin de l’exercice.

Je tournai mon furet avec soulagement dans la direction du hangar. La selle m’extirpa du cocon humide de chaleur, et je désharnachai prudemment chaque élément. Les lentilles soigneusement ôtées, je laissai mes jambes me conduire d’un pas apaisé jusqu’au vestiaire. La fatigue dépassait la pudeur, mon corps semblait décider pour moi. Dans les douches, chaque fille avait des yeux dans le vague, le visage perdu dans le lointain. Personne ne disait mot tandis que l’eau massait les épaules et détrempait les chevelures. Je savonnai et démêlai mèche par mèche, griffant les racines de la sueur accumulée. Je trouvai ce silence chaleureux, car nous partagions sans avoir besoin de nous parler le même éreintement saturé d’ocytocine.

Une fois la peau propre et assouplie par la chaleur, sans prêter attention aux autres, je passai une noix de gel calmant sur l’ensemble de ma vulve et en entourai consciencieusement mon clitoris. Le froid me saisit plus fortement qu’à chaque souvenir me laissant la sensation étrange d’avoir la vulve qui rétrécissait.

Je retrouvai mon casier en même temps que les autres et m’enveloppai de ma serviette, sans énergie pour frotter. Je brossai mes cheveux et les nouai si lentement, que la moitié d’entre elles étaient déjà habillées avant que j’eusse fini. Je me vêtis donc en la seule présence de Caitlin qui se pliait à la corvée de nettoyage. Le lieutenant Conti poussa la porte du vestiaire au moment où je coiffais mon béret.

— Bonjour sergent.

— Bonjour mon lieutenant. Ai-je manqué le débriefing ?

— Non. Je l’ai fait avec le colonel, mais je voulais vous voir avant de partir.

Je quittai le vestiaire et nous marchâmes d’un même pas en longeant les couloirs. Comme elle ne parlait pas, je demandai :

— L’entraînement vous a plu ?

— Mis mal à l’aise.

— Pourquoi ?

— Cette injonction à prendre du plaisir est très… perturbante. Et le canal de communication était ouvert en permanence. — Elle s’arrêta devant la porte ouverte sur le Koala de Caitlin. — Je me demande comment vous faites.

— Nous-mêmes, nous nous posons parfois la question, reconnus-je.

— J’ai eu envie de partir plusieurs fois. C’est troublant de rentrer dans l’intimité des gens comme ça. Mais c’était vraiment nécessaire que j’aie un aperçu de comment des pilotes peuvent collaborer et comment vous pouvez gérer leur… leur énergie. Le colonel m’a bien indiqué que ça serait beaucoup plus compliqué sur le terrain, ce que j’entends totalement, et elle m’a demandé de vous inclure dans la préparation de la mission.

— D’accord.

— Une fois à bord du Caracal-Caracal, nous nous entretiendrons pour préparer l’assaut.

— D’accord.

— Vous avez l’air fatigué. Ça doit être exténuant.

— Oui. Surtout cet entraînement.

— Et hormis la fatigue. Il y a des symptômes propres au pilotage ?

— Si on ne fait pas gaffe, ça brûle à certains endroits. Là, le clitoris a dégusté, mais les crèmes réparatrices sont efficaces. En vrai, moi c’est surtout l’irritation des yeux à cause des lentilles et le fait d’avoir en permanence l’affichage en réalité augmentée. On ne peut pas fermer les yeux pour reposer la vue.

— Il n’y a pas une lassitude qui s’installe avec l’habitude ? L’envie revient vite ? Il n’y a pas un risque que l’une de vous perde, en quelque sorte, l’appétit.

— Le plus longtemps où je n’ai plus eu envie, c’est deux jours, mais je suis un peu nympho, je crois. Le corps humain est fait pour le sexe. Après plusieurs jours de voyage, je suis certaine que chacune aura envie.

— C’est l’enchaînement des deux missions qui me fait peur, même s’il y a quelques jours de voyage.

— Kylie a déjà du vécu, donc je pense que ça ira. Mercedes ça dépend comment elle vivra la mission et s’il y a des morts, comment elle l’encaissera.

— Le colonel a fait le même pronostic.

— Je veillerai sur Mercedes.

— Je sais déjà que je peux compter sur vous, tant que vous ne me faites pas une nouvelle sortie suicide. J’ai besoin de vous tout le long.

— Sur une lune sans atmosphère, ça ne risque pas.

— C’est vrai.

Elle observa le Koala puis ses yeux se tournèrent vers moi.

— Nous partons demain, j’ai déjà rappelé les Carcajous. L’heure de notre navette va nous être confirmées dans les heures qui viennent.

— D’accord.

Nous longeâmes à nouveau le couloir pour gagner le hall, sans parler davantage. Une fois près de la sortie, elle conclut notre entretien :

— A demain, sergent. Et félicitations pour votre… je ne sais pas comment dire, votre capacité à multiplier les tirs, et à garder la tête froide.

— Merci, mon lieutenant.

Elle s’éloigna, et je partis à la recherche de mes camarades, complètement vannée.

Ce fut à table, une fois le ventre rempli de quelques portions de nourriture chaude que l’énergie revint. Les discussions étaient à la comparaison entre les armées américaines et européennes. Caitlin finit par demander à Kylie :

— Et la formation de pilote ? C’est comment ?

— Avant de commencer, on passe un test.

— Sur simulateur ? interrogea Héloïse.

— Non. On vous met dans un vieux modèle d’ESAO trois heures. Si vous n’êtes pas claustrophobe, ça va. Faut être capable de tirer au bout de trois heures. Après, les entraînements, on reste longtemps, on demande plusieurs tirs, on apprend à bouger.

— Comme chez nous, c’est logique, dit Kirsten.

— J’ai failli échouer à cause de l’aspirateur de pisse.

— Pourquoi ? m’étonnai-je.

— C’est un truc, je ne m’habituerais jamais. C’est trop puissant et du coup, je me retenais de pisser, j’ai développé une infection. Heureusement ça s’est soigné très vite.

— Je transpire tellement que je ne pisse jamais, indiqua Kirsten.

— Méfie-toi, alors, conseilla Héloïse.

Son smart-date, celui d’Kylie et le mien bipèrent en même temps. Nous les observâmes. « Confirmation décollage spacioport de Luxembourg ». Nous partions le lendemain à 11h00.Nos ESAO étaient transportés dès 7h00 vers le croiseur. Kylie commenta :

— Bon, l’entraînement n’aura pas duré longtemps.

— Au dodo ! conclus-je en me levant.

Mercedes et Kylie me suivirent d’un même geste. Non pas qu’elles étaient des subordonnées appliquées, mais elles étaient aussi rincées que moi. Je retrouvai la chambrée qui était un peu mon chez-moi. Cela aura été un passage éclair. Mon corps, éprouvé par l’exercice, s’enfonça dans le matelas avec la satisfaction de repartir le lendemain. J’espérais que la seconde opex serait le début de nombreuses autres et non la dernière.

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