Un manque inexplicable, fou et mortel

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- Bonsoir ! Je suis rentré ! annonce Thomas en franchissant le seuil de la porte.

Simonne finit de poser les couverts et se dirige vers son mari pour l'accueillir :

- Bonsoir, mon chéri ! Comment s'est passée ta journée ?

- Bien, merci de t'en soucier, lui répond-il en l'enlaçant tendrement.

Le regard de la brune brille de bonheur. Elle semble aux anges.

- Viens. Le repas est déjà prêt, il n'attend plus que nous deux, l'informe-t-elle en le tirant par la main.

Son époux la suit docilement, sourire aux lèvres. Les deux s'installent face à face et entamment leurs assiettes en discutant calmement, échangeant même de temps à autre des mots doux. J'ai du mal à croire que j'ai sous les yeux le même couple que la veille. Lisant dans mes pensées, Lucifer m'explique fièrement :

- J'ai effacé tous leurs souvenirs, ainsi que ceux de leur entourage, depuis la naissance de leur fille, car c'est à partir de là que les choses se sont gâtées pour eux. Si les premiers temps avec leur enfant ont été heureux, la présence de Mia n'a pas tardé à ruiner leur couple : Simonne, débordée entre la cuisine, le ménage, les courses et l'éducation de sa fille, n'avait plus de temps à s'accorder. Elle ne prenait plus soin d'elle et de son apparence. Elle n'avait même plus de temps à consacrer à son mari. Lassé, ce dernier s'est naturellement tourné vers une autre, qui lui offrait tout ce que sa femme ne pouvait plus lui donner, mais maintenant que Mia n'est plus là, Simonne a du temps à s'accorder pour se faire belle et les deux peuvent enfin avoir des moments de tranquilité en tête-à-tête. Tout le temps consacré à leur enfant peut enfin être dédié à l'entretien de leur flamme. Leur couple est sauvé, comme le souhaitait Simonne, mais. . .

- Mais ?

- Vois par toi-même, dit-il en désignant les deux époux du menton.

Je reporte mon attention sur eux, mais ne remarque rien de particulier : ils continuent à discuter en souriant, échangeant parfois des rires complices. La main de Simonne est posée sur la table et celle de Thomas la couvre tendrement. Ils ne se quittent pas des yeux un seul instant. . . Ah ! Si. La femme a tourné le regard. Elle jette un coup d'oeil circulaire à la salle à manger, comme si elle cherchait quelque chose. Son époux le remarque et lui demande :

- Qu'est-ce qui ne va pas, mon cœur ? Tu as perdu quelque chose ?

- Non. . . Enfin, si. . . En fait, je ne sais pas, c'est une sensation étrange. . . C'est compliqué à expliquer.

- Dis-moi tout. Je t'écoute.

- J'ai la drôle d'impression. . . Qu'il manque quelque chose d'important, mais je ne sais pas quoi. . . Ça m'obsède depuis ce matin.

Thomas garde le silence pendant de longues secondes, puis répond, la mine sombre :

- J'ai la même impression. Ça me perturbe tant que ça m'a déconcentré au travail. Malgré tous mes efforts, je n'arrive pas à m'en débarrasser. C'est. . .

- . . . Oppressant, finit sa femme.

- Oui.

Un silence pesant s'installe, que Thomas finit par briser :

- Allons nous coucher. Ça nous passera peut-être.

Simonne acquiesce et les deux se rendent dans leur chambre, main dans la main.

- Mia. . . murmuré-je. Ils se souviennent encore inconsciemment d'elle.

- Ils ne se souviennent plus d'elle, puisqu'ils sont incapables de dire ce qui leur manque tant, réplique Lucifer, mais ils l'aiment encore. Si j'ai pu effacer le souvenir de Mia de leur mémoire, je n'ai pas pu toucher à l'amour qu'ils lui portent dans leur cœur. Je ne peux rien face au sentiment le plus puissant du monde. . . avoue-t-il avec contrariété.

- Mia leur manque et ils le ressentent, mais comme ils ne se souviennent plus d'elle, ils sont incapables de savoir ce qui leur manque tant, récapitulé-je pour m'assurer d'avoir bien compris.

- Oui et ce manque qu'ils ne comprennent pas va les torturer jusqu'à la fin de leurs jours, déclare-t-il avec un large sourire, tandis que son regard écarlate se met à briller. Je te parie ce que tu veux qu'ils vont en perdre la raison. Il suffira alors d'un murmure pour les persuader de mettre fin à leurs souffrances. . . ici-bas.

- Quel plan diabolique, lui lancé-je avec un sourire amusé.

- C'est le tien. C'est toi qui a eu l'excellente idée du choix de la dette, me complimente-t-il. Tu savais que rien ne pourrait les faire plus souffrir que la perte de leur enfant. Pourtant, tu n'as pas hésité une seule seconde. Je suis surpris, mais fier de toi, dit-il en passant sa main dans mes cheveux bruns. Tu dépasses mes espérances.

Je sens mon cœur se gonfler de fierté, tandis qu'il poursuit :

- Ton prochain contrat sera le premier que tu réaliseras seule. Tu es enfin prête pour travailler en autonomie.

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