Chapitre 9: De sa faute
Une fois la journée terminée, Sure se rendit chez Never, comme promis à Madame Frawney le matin même. Il regrettait encore d’avoir accepté d’amener les cours à Never. Mais il ne savait pas pourquoi, il avait eu la forte impression qu’il devait y aller. Il se rapprochait de plus en plus de la maison, alors, comme dans les meilleures scènes de films clichés d’adolescents, il imaginait ce qu’il allait bien pouvoir dire :
-Bonjour Madame Faubert, je suis un ami de Never.
Pff un ami, n’importe quoi!
-Bonjour Madame Faubert, je suis un camarade de classe de Never. Je suis venu lui apporter les cours de philosophie. Est-ce qu’il va bien?
Bon, ça ira.
Il arriva devant le portail et sonna à l’interphone. Cette fois-ci, il n’avait pas envie de sauter comme la dernière fois. Il vit la porte d’entrée s’ouvrir et May se mit à courir dans sa direction pendant que le portail coulissait vers la droite. La petite fille, les yeux pleins de larmes, s’approcha de Sure et lui sauta dans les bras, l’étreignant de toutes ses forces.
- Sure!, fit-elle soulagée, Never, il, il...
- Il y a un problème ?
- Maman, elle, elle...
- Où est ta maman ?
- Au travail, mais hier, Never...
Il posa ses mains sur celles de May pour la calmer.
- Chut, calme-toi, ça va aller...
- J’ai peur...
- Ça va, je suis là...
En voyant la petite fille en larmes, son coeur s’était adouci. Il tentait tant bien que mal de rassurer May dont les sanglots semblaient interminables. Il prit la petite contre lui, en lui frottant gentiment le dos pour la calmer, et ils franchirent la porte tout doucement, dans les bras l’un de l’autre.
May s'était calmée au contact de Sure. Dans la maison, il semblait n’y avoir personne. Il s’assit sur le canapé, May sur ses genoux, et tenta de comprendre ce qu’il s’était passé.
- Ta maman elle est au travail ?
- Oui.
- Elle rentre quand ?
- Très tard.
- Tard comment ?
- Quand l’aiguille elle est tout en haut.
- D’accord. Hier ?
- Elle est rentrée, et elle...
May s’arrêta, les larmes recommençant à couler sur ses joues. Elle raconta du mieux qu’elle pouvait du haut de ses neuf ans ce qu’il s’était passé cette nuit-là. Sure n’en revenait pas. Comment une mère pouvait-elle infliger ça à son enfant ? Il songea un instant à la fatigue et à ce qu'avait du ressentir son ennemi. Il n'avait plus envie de lui en vouloir. Il demanda où se trouvait Never. Il voulait quand-même s’assurer qu’il allait bien. D’après les indications de May, il dormait encore.
Sure entra dans la chambre de Never. Il n’était pas du genre à entrer sans permission, mais c’était un cas de force majeure. Dans le noir de la chambre, il distingua le lit. Bien, Never dormait. Il alluma son téléphone et s’en servit comme lumière, pour ne pas réveiller le brun. Il était profondément endormi. Il était allongé torse-nu sur son lit, sa couverture gisant sur le sol. Sure prit une photo en pensant que si jamais il devait dénoncer Madame Faubert aux autorités, il aurait des preuves. Il observa ensuite le corps endormi de Never. Il vit une trace, sur son bras, juste là où Evie avait saisi son fils la nuit dernière. Il remarqua également les mains et les genoux rougies du garçon, résultat du long nettoyage nocturne. Il prit les photos dont il avait besoin et quitta la chambre.
C’est seulement à ce moment-là que Sure se sentit gêné. Il venait d’entrer dans la chambre de Never sans autorisation, de le regarder dormir, et de prendre des photos de son corps dénudé. Il rougit en repensant à la scène encore fraiche dans sa mémoire. May, qui avait attendu sur le pas de la porte, lui demanda:
-Il est beau mon frère quand il dort, non?
Sure, mal à l'aise, ne sut pas quoi répondre et descendit les escaliers avec la petite. La pauvre devait être affamée, elle n’avait sûrement pas eu de repas depuis ce matin. Il décida de préparer quelque chose de chaud pour elle et pour son frère quand il se réveillera. Après tout, tout ça, c’était en partie de sa faute.
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