Chapitre 4
L’ancien athlète marchait aussi vite qu’il pouvait. Presque mécaniquement. Il fallait s’éloigner de cet endroit, ne serait-ce que pour éviter de tomber sur les camarades du voyou qu’il avait, qu’il avait…Math s’arrêta au milieu de la rue sombre.
Il pouvait encore entendre le crépitement vorace du brasier qu’était devenue sa voiture, à quelques blocs de là.
Que voulait-il ? Ah, oui, éviter les compères du voyou, de cet homme qu’il avait tué. L’homme leva la tête vers le ciel orangé de San Fransisco. Cette rencontre n’avait pas été une si mauvaise chose. Elle avait définitivement mis fin à son agonie. Un homme nouveau s’était élevé des ruines de celui qu’on appelait Matthew Miller, de son affrontement avec cette racaille, de ces flammes.
L’homme s’assit en tailleur au milieu des poubelles à demi éventrées de la ruelle. Comment s’appellerait-il ? Il était né du feu et du sang, d’une guerre. Si intense, si brève qu’il ne resterait bientôt plus qu’un mince filet de fumée s’élevant au-dessus de la carcasse d’une camaro pour témoigner qu’elle ait eu lieu.
John Wisp. Voilà un nom qui conviendrait à merveille.
Son conflit intérieur avait cessé. Il se sentait lucide.
Il entendit alors des voix a quelques blocs de là, des hispaniques à en croire leur accent. Les autres membres du gang avaient mis longtemps à trouver leur compère. Leur ton parlait pour eux : ils étaient sidérés, certains étaient excédés. Ou du moins voulaient-ils le faire croire. Profondément enfoui sous cette rage, John pouvait y déceler la peur.
Il fixa de ses yeux bleus profonds ses mains tachetées de sang tandis qu’un frisson lui parcourut l’échine, semblant danser entre ses vertèbres. Pour la premières fois depuis longtemps, ces animaux pathétiques craignaient un prédateur. Sage réaction.
John se leva et, d’un pas calme, calculé, il revint sur ses pas. Un homme n’avait rien pu faire contre lui, que pourraient de plus trois, quatre, cinq de ses congénères ? Rien. Ca ne serait pas un combat. Une chasse non plus d’ailleurs : elle impliquait la possibilité de perdre sa proie. Il s’agira simplement d’un nettoyage.
Il avança prudemment à travers les ruelles qui le séparaient du groupe de voyous, prenant soin de ne faire aucun bruit. Après quelques minutes, il n’était plus qu’à quelques mètres d’eux. Le petit groupe avait commis l’erreur de s’éloigner de la voiture qui brulait encore, et ces rues malfamées n’étaient guère plus éclairées depuis longtemps. John put donc se cacher sans difficulté derrière un de ces escaliers d’entrée comme il y en avait tant à San Francisco.
Ils étaient cinq : deux ouvraient la marche, les trois autres se chargeaient de porter ce qui restait de leur comparse. Ils progressaient lentement et laissaient un splendide chemin sanglant derrière eux. Tant de sang…
Soudainement tous se mit à tourner. Pris de vertiges, Math s’adossa contre l’escalier qui lui servait de cachette tandis qu’un filet de sang coulait de son nez. Qu’est-ce qu’il allait faire ?
Ca faisait mal, il lui semblait que quelque chose s’échinait à lui perforer le crane. Il était dangereux, il fallait qu’il parte le plus loin possible. Il fallait partir maintenant !
Math se colla une baffe, ce qui eut le mérite de lui faire retrouver sa lucidité. C’est alors qu’il la vit. Au bout de la grande rue. Une silhouette. Lui-même.
L’ancien athlète se leva et partit à toute vitesse dans la direction opposée. Il dépassa très vite les voyous qui laissèrent échapper des cris de stupeur à la vue de cet homme sorti de nulle part.
Tout prenait vie autour de Math : les lampadaires l’observaient de leur unique ampoule éteinte depuis longtemps. Les poubelles s’accroupissaient sur le coté des maisons, prêtes à bondir sur lui aussitôt qu’il les dépasserait. Le sol se soulevait régulièrement au rythme de la respiration d’une quelconque monstruosité séculaire. L’homme ne pouvait que fuir le plus loin possible de cette ville monstrueuse.
L’ancien sportif professionnel dévalait les rues pentues inlassablement, bousculant les êtres difformes qui marchaient tranquillement, inconscients de la laideur qui accablait leur corps et leur sort. Doublant les boites de nuits et bars auréolés de lueurs roses, bleues qui attiraient toujours plus de ces mutants en leurs gueules.
Après ce qui lui sembla être une éternité, il finit par atteindre le Golden Bridge : bête serpentine venant planter ses serres au plus profond de la terre, ses écailles scintillant de milles lueurs dorées différentes. A bout de force, Math s’effondra, au milieu des collines qui surplombaient le dragon rouge.
Le jour allait bientôt se lever. Il y avait du feu sur la plage. Les bêtes les avaient allumés, il pouvait les entendre. L’homme se recroquevilla, tremblant comme une feuille. Les bêtes allaient tout bruler.
Ses mains étaient callées sous son menton dans un vain espoir de se réchauffer. Elles étaient grises et bouffies, parcourues de veines violacées. De grosses cloques noires et suintantes s’étaient formées au bout de ses doigts.
Les bêtes allaient tout bruler, et après viendrait le froid.
Math perdit conscience.
En cette fin de nuit, personne ne remarqua l’ombre recroquevillée au milieu des collines.
L’ancien athlète marchait aussi vite qu’il pouvait, presque mécaniquement. Il fallait s’éloigner de cet endroit, ne serait-ce que pour éviter de tomber sur les camarades du voyou qu’il avait, qu’il avait…Math s’arrêta au milieu de la rue sombre. Il pouvait encore entendre le crépitement vorace du brasier qu’était devenue sa voiture, à quelques blocs de là.
Que voulait-il ? Ah, oui, éviter les compères du voyou, de ce débris qu’il avait tué. L’homme leva la tête vers le ciel orangé de San Fransisco. Cette rencontre n’avait pas été une si mauvaise chose. Elle avait définitivement mis fin à son agonie. Un homme nouveau s’était élevé des ruines de celui qu’on appelait Matthew Miller, de son affrontement, et de l’incendie qu’il avait déclenché.
L’homme s’assit en tailleur au milieu des poubelles à demi éventrées de la ruelle. Comment s’appellerait-il ? Il était né du feu et du sang, d’une guerre. Si intense, si brève qu’il ne resterait bientôt plus qu’un mince filet de fumée s’élevant au-dessus de la carcasse d’une camaro pour témoigner qu’elle ait eu lieu.
John Wisp. Voilà un nom qui conviendrait à merveille.
Plus d’émotions contradictoires, son conflit intérieur avait cessé. John se sentait lucide.
Il entendit alors des voix a quelques blocs de là, des hispaniques à en croire leur accent. Les autres membres du gang avaient mis longtemps à trouver leur compère. Leur ton parlait pour eux : ils étaient sidérés, certains étaient excédés. Ou du moins voulaient-ils le faire croire. Profondément enfoui sous cette rage, John pouvait y déceler de la peur.
Il fixa de ses yeux bleus profonds ses mains encore tachetées de sang alors qu’un frisson lui parcourut l’échine, semblant danser entre ses vertèbres. Pour la premières fois depuis longtemps, ces animaux pathétiques craignaient un prédateur. Sage réaction.
John se leva. Placide, il revint sur ses pas. Un homme n’avait rien pu faire contre lui, que pourraient de plus trois, quatre, cinq de ses congénères ? Rien. Ca ne serait pas un combat. Une chasse non plus d’ailleurs : elle impliquait la possibilité de perdre sa proie. Il s’agirait simplement d’un nettoyage.
L'ancien sportif professionel avança prudemment à travers les ruelles qui le séparaient du groupe de voyous, prenant soin de ne faire aucun bruit. Après quelques instants, il n’était plus qu’à quelques mètres d’eux.
Le petit groupe avait commis l’erreur de s’éloigner de la voiture qui brulait encore, John put donc se cacher sans difficulté derrière un de ces escaliers d’entrée comme il y en avait tant à San Francisco.
Ils étaient cinq : deux ouvraient la marche, les trois autres se chargeaient de porter ce qui restait de leur comparse. Ils progressaient lentement et laissaient un splendide chemin sanglant derrière eux. Tant de sang…
Soudainement tous se mit à tourner.
Pris de vertiges, Math s’adossa contre l’escalier qui lui servait de cachette tandis qu’un filet de sang coulait de son nez. Qu’est-ce qu’il allait faire ?
Ca faisait mal, il lui semblait que quelque chose s’échinait à lui perforer le crane. Un danger proche....Il fallait partir maintenant !
Math se colla une baffe, ce qui eut le mérite de lui faire retrouver sa lucidité au moins un temps. C’est alors qu’il la vit. Au bout de la grande rue.
Sa silhouette.
L’ancien athlète se leva et partit à toute vitesse dans la direction opposée. Il dépassa très vite les voyous qui laissèrent échapper des cris de stupeur à la vue de cet homme sorti de nulle part.
Tout prenait vie autour de Math : les lampadaires l’observaient de leur unique ampoule éteinte depuis longtemps, les poubelles s’accroupissaient sur le coté des maisons, prêtes à bondir sur lui aussitôt qu’il les dépasserait. Le sol se soulevait régulièrement au rythme de la respiration d’une quelconque monstruosité séculaire. L’homme ne pouvait que fuir le plus loin possible de cette ville monstrueuse.
L’ancien sportif professionnel dévalait les rues pentues inlassablement. Bousculant les êtres difformes qui marchaient tranquillement, inconscients de la laideur qui accablait leur corps et leur sort. Doublant les boites de nuits et bars auréolés de lueurs roses et bleues qui attiraient toujours plus de ces mutants en leurs gueules.
Après ce qui lui sembla être une éternité, il finit par atteindre le Golden Bridge : bête serpentine venant planter ses serres au plus profond de la terre, ses écailles scintillant de milles nuances dorées différentes. A bout de force, Math s’effondra, au milieu des collines qui surplombaient le dragon rouge. Le jour allait bientôt se lever, il y avait du feu sur la plage. Les bêtes les avaient allumés, il pouvait les entendre.
L’homme se recroquevilla, tremblant comme une feuille. Les bêtes allaient tout bruler. Ses mains étaient callées sous son menton dans un vain espoir de se réchauffer. Elles étaient grises et bouffies, parcourues de veines violacées. De grosses cloques noires et suintantes s’étaient formées au bout de ses doigts.
Les bêtes allaient tout bruler, et après viendrait le froid.
Math perdit conscience.
En cette fin de nuit, personne ne remarqua l’ombre recroquevillée au milieu des collines.
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