Chapitre 1

2 minutes de lecture
  • Je vais vous raconter une histoire étrange, qui s’est déroulée ici-même, il y a dix ans de cela...

Charly avait volontairement chuchoté cette phrase. Il marqua un temps, et prit un air mystérieux en fixant tour à tour les trois enfants assis en demi-cercle devant lui. Même assis, il était très grand, massif, impressionnant. Ses yeux grands ouverts laissaient apparaître l’entièreté de son iris sombre, ce qui lui donnait l’aspect d’un illuminé. Et ce, d’autant plus que ses longs cheveux noirs partaient dans tous les sens et que ses grandes mains étaient crispées en permanence. Toute sa personne dégageait une énorme tension qui inspirait sinon le respect, du moins la crainte ou la prudence.

Dans la touffeur de la nuit étoilée - on était en été - il flottait un doux parfum d’ajoncs en fleurs. La mer léchait les rochers en contrebas, doucement. Au loin, un tanker suivait silencieusement la ligne d’horizon, tous feux allumés.

Charly se leva d’un coup, fit quelques pas puis se plaça judicieusement dans le cercle de lumière bleutée que la pleine lune dessinait sur le sol. Il était encore plus intimidant debout, et sa posture théâtrale donnait à la scène quelque chose d’inquiétant, de terrifiant, même. Il prit une longue inspiration, se tourna vers l’océan, dos à ses jeunes auditeurs, et croisa les mains dans son dos :

  • C’était une nuit de pleine lune, comme ce soir d’ailleurs. Et comme cette nuit, j’étais venu ici pour regarder les étoiles filantes, sur la côte. J’avais invité mon ami d’enfance, Perig, un gars en or avec qui je m’entendais vraiment bien, un de ces amis à qui l’on peut tout confier sans avoir peur d’être jugé. La mer était calme, noire avec à sa surface des petits moutons blancs qui sautaient en formant de jolies crêtes, il faisait bon, c’était la fin de l’été. Nous étions assis sur ce rocher, là-bas, et nous tuions le temps, à discuter de choses et d’autres devant cette vue imprenable, profitant de la beauté de ce lieu pour refaire le monde. C’est un bel endroit, vous ne trouvez pas ?

Les enfants hésitèrent en peu, et voyant que Charly souhaitait d’eux une réponse, ils tentèrent un timide : “Ouiiiii”

Charly esquissa un sourire, puis son regard se figea sur la lande. Ses lèvres formèrent un horrible rictus. Il fit de grands mouvements saccadés avec ses bras, et reprit, en faisant trembler sa voix et en espaçant les mots volontairement, pour insuffler plus de gravité à son propos :

  • Et pourtant...Pourtant, derrière l’aspect paisible et la majesté de ce paysage de lande et de mer, il se passe… des choses effrayantes… des choses qui dépassent l’entendement… des choses que l’on ne peut pas expliquer… du moins, de manière rationnelle… Car ici, nous sommes sur un territoire qui nous est interdit, à nous, les humains...

Hasard ou coïncidence, un souffle de vent frais en provenance de la mer tourbillonna sur la lande et coucha la maigre végétation en soulevant des petits grains de pollen doré. Une sensation de froid (ou d’effroi ?) parcourut les trois enfants assis en tailleur et blottis, malgré la chaleur, sous une grande couverture de laine épaisse qui laissait dans l’ombre une grande partie de leur visage et la totalité de leur corps.

Yoann, six ans, le visage enlaidi par un nez en forme de radis, posa une question timidement, comme s’il craignait que l’on se moque de lui.

  • Chez qui sommes-nous, alors, tonton ?
  • Nous sommes sur le territoire...des esprits malins ! fit Charly en pointant la lande de son index tendu.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 4 versions.

Vous aimez lire Caiuspupus ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0