Chapitre 2 : Alliance de circonstances 1/2
Triss échangea un regard avec Philippa, puis les deux combattantes s’élancèrent d’un commun accord en direction du tunnel, passant en un éclair devant les deux démons stupéfaits. La jeune fille s’aperçut cependant bien vite que Philippa avait du mal à la suivre… Ni une ni deux, elle s’arrêta et fléchit les genoux.
- Grimpe sur mon dos ! lança-t-elle à sa camarade.
- Hors de question ! siffla Philippa, le souffle court et le visage en sueur.
- Ne fais pas l’enfant ! Tu n’arriveras jamais à me suivre, sinon !
- Triss ! l’appela soudain une voix au-dessus d’elle.
La jeune fille leva la tête juste à temps pour voir Naru plonger en piqué vers le cratère avec son balai. Elle s’immobilisa à un mètre du sol avant de poser les pieds à terre et de courir dans leur direction.
- Je vous cherchais justement ! s’écria la sorcière, hors d’haleine. C’était Voldra, hein ? Il ne rugirait pas pour rien…
- Je ne pense pas, répondit Philippa. C’est le même rugissement qu’il a poussé lorsqu’il nous a interceptés devant la porte. C’est un cri de défi, destiné à effrayer ses ennemis.
Triss sentit son sang se glacer. Des ennemis… Ça ne pouvait être qu’eux.
- Les shinobis… lâcha-t-elle entre ses dents serrées. Ils nous ont retrouvés.
Philippa acquiesça sombrement tandis que Naru ne pouvait cacher son effroi.
- Déjà ? balbutia-t-elle. Mais… Sheamon et Jonas ne sont même pas là ! Nous n’avons presque pas d’armes et trop peu de personnes sont capables de se défendre ! Comment allons-nous les repousser ?!
Triss allait lui répondre, quand soudain une terrible pensée lui vint à l’esprit. Elle tourna lentement la tête vers Philippa.
- Si les sbires des Nocturii sont ici… Forlwey sera là aussi, non ? l’interrogea-t-elle.
- Si c’est le cas, nous sommes déjà condamnés, maugréa Philippa. A part le dragon, je ne suis pas sûre que qui que ce soit puisse lui tenir tête.
Triss savait déjà que Forlwey serait un adversaire redoutable, et pourtant… le désir de vengeance envers l’homme qui avait tué son oncle brûlait toujours en elle. La jeune fille était devenue bien plus forte depuis son départ du Quartier Umbrella. Avec l’aide de Voldra et de Philippa, il devrait être possible de…
La main de cette dernière se posa sur son épaule.
- Triss, ne fais pas ça. Tu n’es pas de taille contre lui, l’averti l’ancienne espionne. Forlwey est bien plus puissant que tu ne l’imagines.
- Mais on ne peut pas compter que sur Voldra… rétorqua Triss. Forlwey pourrait envoyer des troupes pour atteindre les galeries via le sommet de la montagne… et pire encore, il pourrait venir ici lui-même. Si c’est le cas, et s’il est aussi puissant que tu le dis, il nous écrasera. Mais s’il me voit aux portes, il est probable qu’il essaye de me récupérer lui-même. Et avec l’aide du dragon, on pourrait peut-être le vaincre…
- -C’est bien trop risqué ! protesta Naru.
- Mais si je reste ici, Forlwey finira par me trouver tôt ou tard, et dans ce cas tout le monde sera en danger ! répliqua Triss avant de se tourner vers l’ancienne espionne. C’est notre seule chance, Philippa ! Parce que si Forlwey nous trouve seules, ce sera déjà terminé ! Notre meilleure opportunité est de nous appuyer sur Voldra pour le vaincre !
Celle-ci observa silencieusement Triss pendant quelques longues secondes. Puis elle hocha la tête.
- D’accord, acquiesça-t-elle. Allons-y.
- Attendez une seconde ! s’interposa Naru, incrédule. Vous n’allez tout de même pas faire ça ! Triss, tu t’es réveillée il y a à peine une heure… Quant à vous Philippa, vous tenez à peine debout !
- C’est vrai, reconnut cette dernière. Mais on n’a pas le choix. Désolée d’avance si je reviens encore une fois en pièces détachées, sorcière.
Philippa la dépassa, et avec résolution se mit à avancer en s’appuyant lourdement sur son bâton. La course à travers le cratère l’avait déjà épuisé… Triss éprouva un pincement au cœur.
- Elle a peut-être raison, Philippa, intervint la jeune fille. Tu ferais peut-être mieux de la suivre… Je ne suis pas certaine que tu sois en état de te battre.
- Hors de question ! siffla l’ancienne espionne. Je ne t’abandonnerai plus jamais, Triss ! Je ne pourrais peut-être pas faire grand-chose, mais ça pourrait suffire à faire pencher la ba…
Elle s’interrompit quand Naru lui agrippa l’avant-bras, le visage sombre. Philippa, d’abord surprise, s’agaça très vite :
- Ne cherche même pas à m’en empêcher, sorcière, la prévint-elle. J’irai en rampant s’il le faut.
- Ça va, inutile de m’infliger votre tirade dramatique, répliqua cette dernière en poussant un long soupir. J’ai déjà compris que je ne peux pas vous empêcher d’y aller. Mais plutôt que de ramper, peut-être cela vous permettra-t-il de courir.
Naru sortit de sa sacoche une petite fiole contenant un liquide vert qui fit frissonner Triss, sans savoir pourquoi.
- C’est quoi, ça ? l’interrogea Philippa, méfiante.
- Une potion vitaminée qui devrait apaiser votre douleur et soulager vos muscles. Je l’ai élaborée moi-même à la suite de mes observations en vous traitant, et j’y ai ajouté un élément de plus qui m’est venu à l’esprit après ce que nous avons appris récemment…
Naru lança un regard en biais à Triss, comme pour jauger sa réaction.
- J’y ai ajouté un peu de ton sang, Triss.
La jeune fille, stupéfaite, dévisagea Naru sans comprendre.
- Mon sang ? Mais quand…
- Quand on a su qu’Evander comptait boire ton sang pour obtenir tes pouvoirs, je me suis dit que c’était peut-être la solution pour soigner Philippa. Si ce qu’il disait est vrai, il est possible qu’elle puisse obtenir une partie de tes capacités, dont ton incroyable vitesse de régénération. Je t’en ai donc tiré un peu pour faire des analyses, et… enfin, voilà ce que j’ai préparé.
Elle se tourna alors vers Philippa et lui tendit le flacon, l’air grave.
- Nous n’avons pas le temps d’en discuter d’avantage, alors je vais être brève : en examinant le sang de Triss, je me suis rendue compte qu’il est très différent du vôtre, Philippa. Je ne sais pas si c’est à cause de son statut de Nocturii, ou du fait qu’elle n’est pas affectée par le soleil… Je ne sais même pas si ce qu’a dit Evander a une chance de fonctionner, à vrai dire. C’est pourquoi je n’ai pris que très peu du sang de Triss et fortement dilué : parce que cela pourrait aussi bien être un poison qui vous tuerait si votre organisme n’arrive pas à l’assimiler. Je n’ai pas pu le tester, donc je ne sais absolument pas ce qui se produira si vous le buvez tel quel… la décision vous appartient.
- C’est trop dangereux, Philippa ! s’interposa Triss. Naru elle-même dit qu’elle ne sait pas ce qui se passera !
Philippa prit le flacon des mains de la sorcière.
- Peut-être, mais on n’a pas le choix… déclara-t-elle en avalant le liquide d’un trait avant que Triss puisse esquisser un geste pour l’en empêcher.
Triss et Naru retinrent leur souffle, en observant avec appréhension Philippa. Mais cette dernière avait l’air tout à fait normale.
- On dirait que ça a… commença-t-elle.
Soudain, ses traits se crispèrent et elle tomba à genoux, les mains sur la gorge, tandis qu’elle crachait un sombre liquide noir.
La panique s’empara de Triss.
- Philippa ! s’écria-t-elle en se précipitant vers elle.
***
Le doigt de Sheamon demeurait sur la gâchette de son arbalète, prêt à tirer à tout moment. Pour l’heure, le combat avait été évité de justesse grâce à leur apparition surprise, mais Sheamon savait que la situation était déjà sur le point de dégénérer.
Le premier à rompre le silence fut le dragon.
- Tu arrives au bon moment, démon ! déclara-t-il. Ces insectes essayaient d’entrer dans la montagne, alors je suppose que tu ne vois pas d’objection à ce que je les réduise en cendres…
- Essaie seulement ! rétorqua Meira. Et ta tête finira en trophée !
- Ha ! Mes écailles sont bien trop résistantes pour que vos pitoyables armes aient la moindre chance de m’égratigner, vermine !
Tout en disant cela, Voldra se redressa de toute sa hauteur, menaçant. Aussitôt, les autres guerriers se raidirent, prêts à se battre.
- ATTENDEZ ! hurla Jonas. Personne ne va réduire en cendres ou prendre la tête de qui que ce soit en trophée, d’accord ? On va tous se calmer pour réfléchir à la situation…
- Tu ne vas pas recommencer, démon ! protesta le dragon avec colère. Tu m’avais promis que j’aurais des ennemis à combattre !
- Mais je ne parlais pas d’eux ! Je parlais des shinobis et de… enfin bref ce n’est pas le sujet ! Ecoutez-moi tous ! Si vous voulez éviter que la situation ne dérape, il vaudrait…
- Alors comme ça tu t’en es tiré, Sheamon ? l’interpella Liam en ignorant Jonas. D’après Triss, tu étais mourant dernièrement.
L’intéressé haussa les épaules.
- Que veux-tu, répondit-il. Je suis plutôt résistant.
- C’est vrai, acquiesça Liam avec un bref sourire. Mais cette fois-ci, tu ne m’échapperas pas.
- Et tu vas nous dire où est Triss Nocturii ! renchérit Meira Lynn en pointant l’un de ses sabres vers lui. Sans quoi nous devrons te contraindre à parler…
- Si vous y parvenez, riposta le renégat.
Excalibur Mars se changea en arc que Liam banda en direction de Sheamon, un trait de lumière encoché. Par réflexe, Sheamon leva son arbalète… mais Jonas s’interposa à nouveau :
- Mais arrêtez, bon sang ! s’écria-t-il avec agacement.
- Je suis d’accord, approuva le dragon. Celui qui tuera cet ange-déchu, ce sera moi et personne d’autre.
- Ne t’y mets pas non plus, toi ! Ecoutez, tout le monde va se calmer et réfléchir avant de commettre un acte regrettable…
- Il n’y a pas à réfléchir, lança le nirgaën à tête de loup. Mes hommes et moi sommes venus prendre la tête de Sheamon Wave. Nous n’avons aucune affaire avec toi ou le dragon. Donnez-nous le renégat, et nous vous laisserons la vie sauve.
Voldra émit des grondements gutturaux (probablement un éclat de rire se dit Sheamon).
- Aucun d’entre vous ne peux me vaincre, pauvres verm…
- On a compris, merci ! le coupa Jonas avec exaspération avant de s’adresser aux assaillants. Réfléchissez deux secondes ! Vous êtes nombreux, et nous avons un dragon. On peut décider de s’entretuer ici et maintenant… mais qui va l’emporter à la fin ? Je vais vous le dire : aucun d’entre nous. Parce que le sang va couler à flots, et les quelques survivants ne seront alors plus assez nombreux pour espérer résister à l’ennemi qui arrive et nous encercle déjà !
- D’autres ennemis ? réagit aussitôt Voldra avec une lueur de plaisir sadique dans les yeux.
- Oui, des milliers d’ennemis qui ne veulent qu’une chose ; nous massacrer jusqu’au dernier. Ils ont des vaisseaux, des canons… bref une véritable armée. Ceux-là, tu pourras en massacrer autant que tu voudras, mon ami ! Ce ne sont pas les cibles qui manqueront.
Les flammes du dragon semblèrent doubler d’intensité.
- Enfin… susurra-t-il.
- Je suis content que ça te plaise ! ironisa Jonas avant de se tourner vers l’alliance qui faisait face au reptile. Est-ce que certains d’entre vous se sentent aptes à affronter une telle armée sans aide, hein ?! En réalité, les seuls qui auront tout à gagner si nous nous battons maintenant, ce sont Forlwey et le Harakaï qui en arrivant n’auront plus qu’à se pencher pour cueillir les survivants !
Cette fois, la fureur de combattre qui se lisait dans les yeux des guerriers vacilla. Manifestement, les paroles de Jonas commençaient à produire leur effet, même si la présence imprévue du dragon devait aider. Personne ici ne devait ignorer que Forlwey et ses serviteurs les auraient rattrapés dans quelques jours, et qu’ils n’auraient aucune pitié. En leur rappelant cette brutale vérité, Jonas les avaient fait douter et ils étaient d’autant plus enclins à l’écouter désormais. Sheamon devait admettre que le devin était très bon pour convaincre les autres…
- Si vous tenez tant que ça à vous battre, allez-y ! asséna une nouvelle fois le devin. Mais le prix à payer sera lourd… Alors combien d’entre vous vont mourir pour une hypothétique victoire ? Qui souhaite se sacrifier pour que les autres aient une petite chance de survivre aujourd’hui pour mourir dans quelques jours face à un adversaire inarrêtable ? Personne, n’est-ce pas ?
Sheamon voyait sur les visages impassibles de Liam et de Meira Lynn qu’ils avaient déjà envisagé cette possibilité. Les deux alliés comprenaient où Jonas voulait en venir, même si cette situation ne leur plaisait pas. Allaient-ils surmonter leur répulsion et déposer temporairement les armes pour écouter le devin ? Ou bien choisiraient-ils de combattre malgré tout ?
Meira allait prendre la parole, quand une nuée de chauve-souris s’échappa soudain de la faille centrale, s’élevant dans les airs avant de plonger vers le sol en se mélangeant les unes avec les autres. Le cœur de Sheamon fit un bond dans sa poitrine.
Triss reprit sa forme humaine épée à la main, le visage déterminé. Son regard parcourut les combattants avec une certaine surprise, comme si elle s’attendait à autre chose. Puis, ses yeux rencontrèrent ceux de Sheamon, et pendant un bref instant son expression se figea, passant de la surprise à la totale stupéfaction. Sheamon se rappela leur dernière conversation… Il lui avait dit des choses terribles… Même s’il n’en pensait rien et qu’il avait agi ainsi uniquement pour la protéger, Triss devait s’en souvenir… et il ne serait pas étonnant qu’elle ne veuille plus lui adresser la parole.
Le visage de Triss s’éclaira alors d’un sourire éclatant à son intention. Elle semblait vraiment soulagée de le voir. Sheamon se sentit soudain libéré d’un poids immense qui pesait sur sa poitrine depuis leur dernière entrevue. Elle n’avait pas l’air de lui en vouloir ! Il lui sourit à son tour en se promettant mentalement d’avoir une franche conversation avec elle dès que possible. Il avait beaucoup à lui dire… et surtout beaucoup à s’excuser.
Philippa surgit alors de la faille depuis le sentier creusé dans la paroi, et rejoignit Triss à son tour, épée et couteau dégainé. Sheamon remarqua qu’elle semblait bien plus en forme qu’elle ne l’avait été depuis leur arrivée à Varenn, transformation des plus étonnantes tant elle était rapide. La dernière fois qu’il l’avait vue, elle était dans un profond coma et au bord de la mort. Mais l’espionne semblait continuellement refuser la mort… avec une détermination qui, le renégat devait l’admettre, commandait le respect !
Le visage de Triss redevint grave tandis qu’elle se tournait vers Meira Lynn et Liam.
- Je sais pourquoi vous êtes ici, déclara-t-elle alors. Et je préfère vous prévenir tout de suite ; je n’ai aucune intention de vous suivre gentiment.
- Tu ne comprends toujours pas, Triss Nocturii ! la mit en garde Meira Lynn. Tu es en danger tant que tu es avec lui !
Elle désigna Sheamon de son sabre avec mépris.
- Il veut juste te vendre au premier venu pour accomplir ses propres objectifs ! continua-t-elle. Tu ne peux faire confiance à un traitre qui a trahi sa propre patrie…
Sheamon s’apprêtait à répliquer quand Triss reprit la parole :
- J’ai confiance en Sheamon, plus qu’en n’importe qui ici, déclara-t-elle d’une voix forte. J’ai pris ma décision, capitaine. Je reste avec lui.
Si cela faisait plaisir au renégat, il avait bien l’air d’être le seul à se réjouir de cette déclaration.
- Alors tu ne nous laisses pas le choix, décréta Meira Lynn, l’air déterminé. Nous allons devoir te sauver, même contre ta volonté.
- Je ne ferais pas cela si j’étais vous, capitaine, l’avertit une voix d’homme, suivie du déclic d’un fusil dont on vient d’enlever la sécurité. J’aimerais éviter d’avoir à retourner mon arme contre mes propres camarades…
Lentement, la capitaine de l’Eglise se retourna et dévisagea le traitre, un ange solide couvert d’une barbe rousse, sorti des rangs pour la menacer avec le fusil qu’il tenait dans ses mains. Son visage paraissait résolument déterminé, tandis que ses camarades le regardaient avec stupéfaction. La surprise et l’indignation se peignirent sur le visage de Meira Lynn, tandis que l’étonnement saisit Sheamon quand il reconnut l’individu. Était-ce vraiment lui ?
- Abraham… gronda Meira Lynn, les dents serrées. Vous m’aviez pourtant juré que votre loyauté envers l’Eglise était sans faille…
- Et c’est le cas, capitaine, répliqua ce dernier sans se laisser démonter. Mais j’ai une immense dette envers Sheamon depuis qu’il a sauvé mes deux petites filles. Et en l’occurrence, je pense que l’Eglise se trompe.
- Alors vous vous êtes porté volontaire pour cette mission uniquement pour vous assurer que jamais nous n’attraperions Sheamon Wave ?
- C’est à peu près cela, reconnut Abraham. Mais j’espère tout de même que vous ne me forcerez pas à me servir de mon fusil.
- Tu aurais dû rester en dehors de tout cela, Abraham, intervint Sheamon en se reprenant. Tu risques gros sur ce coup-là…
- Je sais, mon ami… mais ce n’est pas pour autant que je vais te laisser tomber.
Le visage de Meira Lynn se crispa de colère devant cette nouvelle surprise. Elle s’apprêtait à ouvrir la bouche, quand Liam l’arrêta d’un geste.
- Je pense qu’il est préférable d’écouter ce que Monsieur Perceval essaye de nous dire, intervint-il d’une voix calme.
- Vous n’allez tout de même pas renoncer maintenant ? répliqua aussitôt Meira Lynn avec indignation. Nous étions résolus à aller jusqu’au bout, capitaine Jeagan !
- Je peux vous assurer que personne au monde n’a plus envie que moi d’éliminer Sheamon Wave, mais cela ne veut pas dire que nous devons forcément nous jeter dans un combat dont l’issue a de fortes chances d’être désastreuse. Nous n’avions pas prévu qu’un dragon serait de leur côté, sans compter que les shinobis et le Harakaï sont toujours sur notre dos. Notre situation est incontestablement très précaire. Par conséquent, je pense que c’est dans notre intérêt d’écouter ce qu’ils nous proposent.
Liam adressa un signe de tête respectueux à Triss, puis à Jonas.
- De plus, si je n’ai aucune confiance en Sheamon, j’ai déjà eu l’occasion de collaborer avec Monsieur Perceval et Triss à Qaltra. Ce sont des personnes fiables qui n’essayeront pas de nous poignarder dans le dos.
- Je suis d’accord, approuva le nirgaën-loup à ses côtés. C’est une bataille où nous avons tout à perdre et rien à gagner, et je n’ai pas envie de risquer la vie de mes guerriers pour rien.
- Je… je pense aussi que c’est une bonne idée ! intervint à son tour Syana, avec un soulagement apparent à l’idée d’éviter le conflit.
Le regard de Meira Lynn passa alors successivement du nirgaën à Liam, puis se dirigea vers Abraham, Voldra, Jonas, Triss… et enfin Sheamon. L’indignation durcissait ses traits, mais elle n’était pas stupide pour autant et comprenait que la situation ne penchait pas en sa faveur.
- Nous discuterons de votre insubordination plus tard, Abraham, lâcha-t-elle d’un ton menaçant, avant de se tourner vers Jonas et Sheamon. C’est d’accord, mais nous négocierons dans votre refuge. Rester ici serait dangereux pour tout le monde si les espions des Nocturii nous retrouvent, et cela montrerait également votre bonne volonté…
- Je ne suis pas sûr que… commença Sheamon.
- C’est d’accord, accepta aussitôt Jonas. Notre refuge est le vôtre, bien évidemment.
Sheamon lui jeta un regard indigné et l’attrapa par l’épaule pour protester dans son oreille.
- Si on les laisse rentrer et qu’ils décident de nous attaquer une fois dans le tunnel, nous n’aurons plus Voldra pour nous soutenir !
- Mais en même temps, le tunnel limitera leurs mouvements. Et en cas de danger, tu es probablement capable de le faire s’écrouler sur eux, non ?
- Oui, mais je ne garantis pas que nous n’y passerons pas nous aussi !
- Nous n’avons pas le choix, Sheamon. Si on ne leur prouve pas qu’ils peuvent nous faire confiance, on n’arrivera à rien. Et j’imagine que tu conviendras qu’on n’a pas vraiment besoin d’un nouveau bain de sang…
Sheamon aurait voulu trouver un argument pour faire changer d’avis le devin, mais il y avait trop de vérité dans ses paroles pour l’ignorer. Triss était présente, elle aussi… et en cas de combat, elle serait la première visée après lui. Sa sécurité était sa priorité.
Il s’aperçut que Liam, la lamia, le nirgaën et Meira Lynn avait rengainé leurs armes tout comme la plupart de leurs guerriers, à l’exception d’Abraham qui l’interrogea du regard.
Avec un profond soupir, Sheamon, abaissa son arbalète.
A suivre...
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