Reprise de contact

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Ramonville, vendredi 25 janvier

Thomas gara sa voiture dans la rue, le garage étant occupé par un amoncellement d’objets pour la plupart inutiles. Il n’avait pas très loin à aller pour se rendre à son travail, et il ne faisait le trajet qu’une ou deux fois par semaine, en télétravail les autres jours, mais il ne pouvait se résoudre à prendre son vélo, bien difficile d’accès au fond de la remise. Marie n’était pas encore rentrée, le trajet depuis Colomiers étant généralement bien chargé le vendredi soir. Il décida de profiter de ce moment pour se connecter sur le site dont Léonard lui avait envoyé les coordonnées un peu plus tôt. Thomas prit soin d’utiliser l’ordinateur privé de la maison pour être certain de ne pas laisser de trace sur la machine fournie par son employeur.

La page d’accueil du site était plutôt criarde et démontrait un certain amateurisme qui ne manqua pas de surprendre l’ingénieur informaticien. L’arrière-plan était assez suggestif, centré sur la photo d’un corps de femme dénudé, voilée d’un léger flou se voulant sans doute artistique. Le titre en gros caractères annonçait : Le réseau Rose, pour les libertins toulousains. La graphie était inutilement compliquée et la couleur rose fluo omniprésente. La page ne proposait rien d’autre qu’une fenêtre d’identification. Thomas cliqua sur S’inscrire et l’écran afficha un questionnaire. Outre les sections habituelles, nom, pseudo, adresse mail, plusieurs rubriques demandaient des informations sur les motivations du prétendant, ses orientations sexuelles ainsi que la mention d’un parrain pouvant justifier l’acceptation de la candidature. Thomas entra dans cette case Lleonard & Camille, en prenant bien soin de taper les deux L du prénom, comme son mentor l’avait spécifié. Il cliqua sur Soumettre et reçut en retour un message annonçant que la demande était en attente de validation. Un peu déçu de devoir patienter, il tapa le mot Libertinage dans le moteur de recherche. Plusieurs définitions apparurent sur son écran, mêlant références anciennes et modernes avant de proposer l’adresse de différents établissements de la région. Il n’apprit rien de plus que ce qu’il avait déjà découvert quelques semaines plus tôt. Il referma l’ordinateur et alla se servir un whisky dans la cuisine. Marie n’allait sans doute pas tarder, et il lui proposerait d’aller diner en ville. Un de ses collègues lui avait justement suggéré une nouvelle adresse dans le quartier des Carmes. Une tonalité sur son mobile lui signala l’arrivée d’un nouveau message. Il lut : Lleonard & Camille a approuvé votre demande d’adhésion. Vous pouvez maintenant entrer en contact avec les membres du réseau. Suivait un nouveau lien de connexion. Il cliqua, mais la page présentée était quasiment illisible sur l’écran du téléphone. Il décida d’attendre le retour de Marie pour se connecter à nouveau depuis l’ordinateur.

La jeune femme arriva quelques minutes plus tard, pestant contre les encombrements de la rocade. Thomas lui proposa un verre de vin pour se détendre. Il avait pris le temps d’allumer un feu dans la cheminée du salon. Ils s’installèrent dans le canapé.

« Alors, comment s’est passée ta journée ? demanda Thomas.

— Comme d’habitude, avec en plus une réunion du CSE. Toujours les mêmes rengaines, l’égalité hommes-femmes, les salaires, la durée des pauses…

— C’est ça les Ressources Humaines ! Rassure-toi, ce n’est pas mieux chez nous. Assez parlé du boulot, c’est le week-end. J’ai reçu un message de Léonard, tu te souviens ?

— Bien sûr que je me souviens, que te dit-il ?

— Il m’a communiqué l’accès à un site, le Réseau Rose. J’ai fait une inscription.

— Et qu’est-ce qu’on y trouve ? demanda Marie.

— Je ne sais pas, je viens juste de recevoir le code d’accès, je t’attendais pour aller voir. Tu veux le faire maintenant ou tu préfères aller diner avant ?

— On peut déjà regarder, on verra ensuite.

— OK, je vais chercher l’ordi. »

Le site principal était un peu plus soigné que la page de connexion. L’écran principal affichait une liste de pseudos, assortis d’une photo. La plupart représentaient un couple, certains en mode portrait, d’autres plus dénudés. Une icone semblait indiquer que le titulaire de la fiche était en ligne. Thomas fit défiler la liste, il y avait une centaine de noms. Il trouva Lleonard & Camille sur la troisième page. Il cliqua sur le nom. Une fiche plus détaillée apparut, accompagnée d’une petite galerie de photos. Quelques unes, assez sages, étaient en clair. Les autres étaient floutées, avec la mention Accès sur demande.

« Tu crois qu’il faut que l’on crée notre fiche ? demanda Marie. On ne va pas mettre nos vrais noms !

— Non, bien sûr, on va se trouver un surnom.

— Tom et Mary, ça fait américain !

— Pourquoi pas, ce n’est pas très important, je crois.

— Et les photos ? On ne va pas mettre nos selfies de vacances !

— On va en faire d’autres, des plus coquines, ça sera amusant.

— Je ne veux pas qu’on reconnaisse mon visage ! protesta la jeune femme.

— Tu pourras porter un masque !

— On n’est pas pressés, on pourra voir ça demain. On peut envoyer des messages aussi ?

— Sans doute, je pense que c’est même le but premier du site, répondit Thomas.

— On peut écrire à Léo et Camille alors, pour leur dire qu’on est inscrits.

— Tu sais que c’est une façon de leur dire qu’on voudrait les revoir ?

— Oui, bien sûr. »

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