Chapitre 4 - Les Fissures du Code

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Aronn

Minuit sonnait quand je refermai la dernière brèche dans le pare-feu. Les logs défilaient encore sur mon écran, mais j’avais besoin d’autre chose que de chiffres et de protocoles. J’avais besoin de comprendre… elle.

Je me laissai glisser sur mon siège, les yeux toujours rivés aux trois écrans éclairant la pièce comme une constellation froide. Aidée. Son nom résonnait dans ma tête, plus insistant que n’importe quelle alerte de sécurité.

D’un mouvement fluide, j’exécutai une requête sur les proxys que je contrôlais : recueillir le moindre fragment d’information la concernant. Pseudonymes, plateformes alternatives, empreintes numériques.

Une première piste : un alias sur un forum d’art underground. Son avatar — un dessin abstrait, griffonné en noir sur fond blanc — me mit un frisson. C’était bien elle.

J’infiltrai le serveur, contournai les protocoles d’authentification. En quelques secondes, j’accédai au fil de ses commentaires et aux réactions qu’ils suscitaient. Elle discutait avec des dizaines de passionnés, partageait des croquis, des textes brefs, des fragments de poèmes.

L’un de ses messages attira mon attention :

« Quand la surface craque, c’est l’âme qui se révèle. »

Je souris. Cette phrase, je l’avais lue en filigrane dans sa peinture la veille. Je ne savais pas comment elle traduisait ses émotions en couleurs, mais je comprenais l’écho qu’elle provoquait en moi.

Je fis tourner le flux de données, traquai les métadonnées : dates, lieux probables, adresses IP masquées. Rien de concret — tout était encrypté.

Passant à la deuxième piste, je décortiquai le code source d’une galerie virtuelle où ses œuvres apparaissaient sporadiquement. J’exhumai des fichiers cachés, des miniatures d’images, des bouts de descriptions.

Elles étaient là : ses fresques clandestines, ses toiles qui hurlaient sans mot dire. Chaque photo portait la trace de son style : un mélange de chaos et de grâce, de noir et de pigments vifs.

Puis je tombai sur un indice plus personnel : un document texte, oublié dans un dossier temporaire. Un journal de bord.

Je cliquai, hésitai. Puis j’ouvris le fichier.

26 avril.
Aujourd’hui, j’ai renoncé. Renoncé à plaire. Renoncé à me taire. J’ai peint sans regarder, sans penser. Ma colère est une arme.

Mon cœur se serra. Elle n’était pas seulement une artiste : elle était armée de sa propre rage, de sa quête de vérité.

Je fis défiler la suite :

Le dîner chez Marco a failli me détruire. J’ai senti ses attentes comme un masque oppressant. Mais je ne céderai plus.

Marco. Le nom résonna dans mon esprit. Je ne savais rien de lui, mais je compris qu’il était l’ombre qu’elle rejetait.

Je copiai chaque ligne, sauvegardai le fichier dans mon coffre numérique. Mon codex secret, le sien.

Et alors, je fis ce que je m’étais interdit : je lui écrivis un message. Pas via les forums, pas caché derrière “Cipher”. Directement, là où je l’avais trouvée.

Dans la fenêtre de discussion chiffrée, je tapai :

“J’ai lu ton journal. Ta rage est magnifique. J’aimerais comprendre ce qu’elle t’apporte. — A.”

J’hésitai, puis cliquai sur “envoyer”.

Le curseur clignota. Aucune réponse immédiate. Mais je restai là, à attendre, le cœur incertain.

Peu importe. J’avais franchi une ligne. Pour elle, j’étais prêt à risquer bien plus que des pare-feu.

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