Chapitre 7 - La Date et la Déchirue
Aidée
J’avais relu son message des dizaines de fois. “Ta révolte est magnifique. Tu n’es pas seule. — A”
Les mots vibraient encore dans ma tête, suspendus dans l’air comme une note prolongée. Je ne savais pas qui il était. Je ne savais pas s’il reviendrait. Mais ce simple message avait rallumé quelque chose en moi. Une étincelle que Marco, lui, avait depuis longtemps étouffée.
Je refermai le volet de l’ordinateur portable, le cœur un peu serré. Aucune réponse à mon “Merci… Montre-moi que tu es là”. Rien. Pas une trace. Pas un signe. Mais j’avais senti sa présence. Et je voulais croire qu’il avait vu.
Quand Marco rentra ce soir-là, je savais déjà que c’était fini.
Il parla comme à son habitude, sans écouter. Il critiqua les lumières de l’atelier, râla sur les tâches de peinture sur le sol, fronça les sourcils en découvrant les plans de mon installation posés sur la table.
« Tu vas vraiment faire ça ? Devant tout le monde ? T’exposer comme ça ? »
« Ce n’est pas moi que j’expose. C’est eux. »
Il ne comprit pas. Il ne voulait pas comprendre. Pour lui, l’art devait être joli, rentable, cadré.
Quand je lui dis que je voulais qu’il parte, il se figea. Il essaya de me manipuler, me faire douter, me rappeler tout ce qu’il avait "supporté".
Mais cette fois, je n’avais plus peur d’être seule.
« Je ne t’appartiens pas, Marco. Et je ne te dois rien. »
Il partit sans claquer la porte, mais son silence, lui, claqua dans tout mon corps.
Je restai un long moment à observer la lumière bleue de mon écran, la respiration un peu plus calme, l’espace autour de moi redevenu mien.
Puis je me rassis, ouvris mon journal numérique, là où tout avait commencé.
J’ajoutai une nouvelle entrée.
“Date de l’action : 12 mai – 20h00 – Trafalgar Square. Nom de code : Oeil Libre.”
En dessous, j’écrivis en lettres droites et claires :
“À celui ou celle qui m’a écrit : je te laisse cette trace. Si tu vois ce message, si tu peux encore lire… viens. Sois là. Aide-moi.”
Je sauvegardai, puis fermai le document. Cette fois, je n’avais plus besoin de le supplier. Je l’avais invité. J’avais tracé une ligne dans le béton, posé un repère dans le chaos.
S’il existait vraiment, il la verrait.
Et s’il venait… je saurai.
Annotations
Versions