Chapitre 18 - Still loving you
Time, it needs time to win back your love again
I will be there, I will be there, love, only love
Can bring back your love someday. I will be there, I will be there
Still loving you, Scorpion *
Lettre de Tibert. Issoire, 19 mars 1993
Je voulais t’écrire plus tôt, mais sérieusement j’ai pas eu le temps. Alors comme ça tu es à Brest, tu as donc retrouvé ta tendre et chère Bretagne. J’espère que tu t’y plais, car Baden ça n’avait pas l’air de te brancher.
Mais ne m’explique pas pourquoi, car je ne comprendrai pas, comme je ne t’ai jamais comprise d’ailleurs, tu sais bien que tu m’as toujours attiré que dans un lit. Ça, c’est ce que tu m’as écrit.
C’est sympa de voir que tu as une haute opinion de moi. Alors que tu as tort, car j’ai toujours été attiré par toi, physiquement c’est vrai, je pense que t’aimerais pas que je dise le contraire, mais aussi au niveau sentimental. Mais ça j’ai perdu l’espoir que tu le croies un jour. OK, j’ai pas été l’exemple type du mec compréhensif, amoureux ou même sensible, mais si je t’aimais mal, c’est que je t’aimais trop.
C’est pour ça que t’es incomparable avec mes copines. Avec toi je me sentais bien, je pouvais être moi-même, alors qu’ici j’ai l’impression de jouer un rôle.
En fait tu sembles croire que je me fais plein de meufs. C’est pas vraiment le cas, je suis sorti avec 4 filles depuis que nous nous sommes quittés, c’est pas énorme.
Tout ça pour te dire que malgré le temps qui passe, je n’arrive pas à penser à toi comme à une simple copine, mais même si c’est ridicule, au fond de moi j’ai l’impression que toi et moi c’est pas fini.
C’est pour ça que lorsque tu me parles de mec, j’ai un peu les boules. Je crois que c’est clair, je t’aime toujours et ça s’appelle de la jalousie ce que je ressens.
Voilà, faut que j’arrête de penser sentiment, sinon je vais choper le cafard.
J’espère que je vais retrouver ton adresse, car là, je sais pas vraiment où elle est. Et donc j’ai un peu peur que la lettre que je suis en train d’écrire ne t’arrive jamais.
Enfin dis-toi que si tu lis ces phrases, ça voudra dire que je me suis bien démerdé.
Voilà, je vais te laisser.
Tibert qui ne t’oubliera jamais.
Journal de Yuna. 6 juin 1993
Je dois chasser Tibert de ma vie en tant qu’homme, mais j’ai beaucoup de mal à le faire. Heureusement qu’il est loin d’ici. Je l’aime, mais je l’aime physiquement. Il ne connait rien de moi, de mes rêves, de mon caractère.
Mon corps va mieux, je n’ai plus que rarement des étourdissements. Je n’ai plus les ongles qui cassent, les cheveux abimés, des fatigues et des insomnies. J’ai décidé de vivre, de me tenir la main. Je suis seule. Mais finalement, qui peut prendre soin de moi mieux que moi ?
Je dois encore renoncer à mon corps en tant que séducteur, il n’est qu’une machine. Mais le souvenir de mes nuits avec Tibert me laisse perplexe. Je pense que l’amour n’est qu’un leurre pour nous pousser à procréer. La preuve : une fois que le temps a fait son œuvre, combien s’aiment encore ?
Je cherche le véritable épanouissement, le vrai bonheur. Il me manque quelque chose, mais quoi ? Je cherche une personne physique pour me soutenir, me faire avancer.
Je cherche, je cherche…
11 juin 1993
Je passe en 1re littéraire. Je n’ai jamais eu de problème à l’école, mais cette année mes résultats n’étaient pas terribles. L’année prochaine je ne referai pas de sciences éco : je n’ai pas aimé, les économistes ont l’air de considérer la nature comme une ennemie à abattre. Je prendrai une troisième langue, l’italien si c’est possible.
Je vais peut-être déménager (encore !) à Saint-Maixent. Mes parents se séparent : papa reste en Allemagne, et Angèle, Léon et moi, on part avec maman. C’est dommage, je me suis fait des ami.e.s à Brest. Et j’aime bien habiter dans une grande ville, pour aller au ciné et à des concerts. J’y vais parfois seule et ça me va. Et les librairies sont immenses ! Ma marraine m’a fait découvrir Dialogues. Mes tantes prennent du temps pour moi. Je suis à la fois seule et entourée. C'est tranquille.
Le trajet pour aller au lycée est super sympa. Je traverse la Penfeld en coupant à travers des parcs. Parfois je prends le bus, mais je préfère mes 20 minutes de marche. Ça grimpe, j’adore. J’ai fait cette balade avec ma cousine, elle était contente, on en a profité pour dessiner le paysage. Je tente les craies sèches en ce moment. Ça rend une impression de douceur.
Je ne sais pas encore comment dire à Tibert tout ce qu’il doit savoir. Je n’ai pas envie de le perdre, mais je sais que lorsqu’il saura qu’il n’y aura plus de sexe entre nous, il partira. Il est le seul homme qui me tente. Dans ses bras, je suis une femme, mon corps exulte, je me sens entière. Je ne veux plus exister en tant que corps. Je l’aime, je crois.
J’ai peur de mon corps, de l’image qui change, ternie, se brouille. Une image, tout simplement.
Lettre de Tibert. Issoire, 28 juin 1993
Demain je passe l’oral et j’arrive toujours pas à m’y mettre, je crois que c’est toujours pareil, ça passe ou ça casse, et jusqu’à maintenant c’est toujours passé, alors il y a pas de raison que ça change.
En ce moment je me fais trop chier, car j’ai vraiment rien à faire alors je déprime.
La plupart des mecs se prennent la tête à organiser la fête de l’école, mais ils ont au moins l’avantage de s’occuper, alors que moi et mon binôme on est affecté au « service d’ordre », on devra veiller à la sécurité. Enfin c’est la planque quoi. Et puis il y a toi, toi qui dois encore dormir, qui devrais aller à la plage avec son pote, et moi qui suis là à me demander si tout cela à un sens.
Maintenant t’as tes copains, tes habitudes et je sais pas si je fais partie de ta vie.
Peut-être qu’en fait tu crois m’aimer, alors que tu te rattaches seulement à un souvenir.
J’ai un tas de trucs qui me passent par ma tête et ça m’angoisse. Un an sans se voir et je voudrais que ça soit comme avant, mais c’est pas vraiment réciproque, toi tu veux pas faire l’amour, enfin ça dépendra des retrouvailles comme tu dis, mais là moi j’ai l’impression d’être jugé, de passer un concours où je suis le seul candidat et toi la seule juge.
C’est à toi de décider pour nous, me condamneras-tu à ton absence ou me gratifieras-tu de ton amour sur tous les plans.
Car je t’aime et tu le sais…
Je t’embrasse très fort là où tes rêves les plus osés te conduiront.
PS Excuse-moi pour les ratures, les fautes, le papier, etc. C’est la fin de l’année et c’est une véritable pénurie pour trouver de quoi écrire. Je te téléphonerai mercredi soir.
Lettre de Yuna. Brest, juillet 1993
Je t’envoie enfin des photos qui combleront peut-être mon absence. J’espère que tu aimeras mes cheveux courts. Je déménage à Saint-Maixent pour de multiples raisons. Moi qui commençais à m’habituer à Brest !
Je ne vais pas t’écrire de long en large que je t’aime, je te le dirai de vive voix dans quelques jours.
Passe à Saint-Maixent le plus vite possible !
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Du temps, il faut du temps pour reconquérir ton amour
Je serai là, je serai là, l’amour, seul l’amour
Peut ramener ton amour un jour, je serai là, je serai là
Toute la chanson me semble écrite par toi.
If we'd go again, all the way from the start
I would try to change, the things that killed our love
Your pride has built a wall, so strong, that I can't get through
Is there really no chance, to start once again
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