Appartement 9 : Travail de groupe chez Flavie

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LE CAMARADE DE CLASSE : Moi, je pense que toute cette sous-partie serait beaucoup plus logique en petit C du grand deux qu'en petit A du grand trois.

FLAVIE : Sauf que toutes nos grandes parties n'ont que deux sous-partie et, là, le grand deux en aurait trois.

LE CAMARADE DE CLASSE : Oui, mais on s'en fiche de ça. Ce qui compte c'est la structure logique des idées. Et, en plus, si on laisse comme ça, le petit A du grand trois est plus grand que toutes les autres sous-parties : ce n'est pas homogène non plus.

FLAVIE : Sauf si on déplace le reste du petit A du grand trois en petit B du grand trois, et qu'on passe l'actuel petit B en petit C.

LE CAMARADE DE CLASSE : Dans ce cas là ce serait le grand trois qui aurait trois parties. Mais peut-être que lui il a le droit vu que c'est le grand trois. Du coup le grand quatre on lui met quatre sous-parties.

FLAVIE : Très drôle. En tout cas, même si on oublie les histoires de longueur et de nombres de parties, moi je trouve ça plus logique de lire ces idées en petit A du grand trois. Ça fait plus partie du thème du trois que de celui du deux.

LE CAMARADE DE CLASSE : Oui, mais à la fin du deux ça fait comme une transition, et le titre du trois apparaît moins comme un cheveu sous la soupe.

FLAVIE : Tu sais quoi ? Ça m'énerve. On ne va pas perdre quinze minutes à débattre de si on met ça en C du deux ou en A du trois. Tant que ça reste au même endroit dans l'ordre de l'enchaînement des idées, ça n'a pas beaucoup d'impact ; ça ne change rien. Ça ne vaut clairement pas le temps perdu à en débattre. Tu y tiens plus que moi donc vas y on fait comme tu veux. Mais est-ce qu'on peut avancer sur la suite ? Parce que ça fait une heure qu'on bosse et le plan n'est toujours pas finalisé.

LE CAMARADE DE CLASSE : Mais on a quoi à faire après ? Finaliser le plan ce n'était pas l'objectif de cette réunion ? Et une fois que le plan est le fait, il y a au moins la moitié du travail qui est fini.

FLAVIE : La moitié du travail, ça m'étonnerait. Déjà, Jacynthe n'est pas là, donc même si on finit le plan il ne sera pas fini tant qu'elle ne l'aura pas validé. Et puis, une heure pour le plan, ce n'est peut-être pas beaucoup dans l'absolu, mais c'est beaucoup quand on se dit qu'elle s'ajoute à tout le travail qu'on a déjà fait sur ce plan en amont.

LE CAMARADE DE CLASSE : Je sens que t'es énervée, Flavie. Je sais qu'on est dimanche, et moi aussi je préférerais faire autre chose qu'être chez toi à bosser, mais il faut avouer que c'est quand même une bonne chose. Sur le drive c'était vraiment ingérable. Il y avait au moins six débats en cours dans les commentaires et pour échanger en clôturer un ça ne prenait pas les cinq minutes que ça prend pour conclure en live ; ça prenait au moins trois jours.

FLAVIE : En même temps, si certains travaillent le jour et d'autres à minuit, c'est sûr que c'est compliqué pour avoir une conversation dans les commentaires d'un Google doc sans qu'elle prenne trois jours.

LE CAMARADE DE CLASSE : On est d'accord. Quant à Jacynthe, les absents ont toujours tort. Elle n'a pas pu venir aujourd'hui, donc elle acceptera le plan sur lequel on se sera mis d'accord et c'est tout.

FLAVIE : Non. On n'a même pas toutes les infos sur ses recherches donc, si ça se trouve, elle va nous sortir un truc sur lequel elle est tombée et qui remet toutes les idées en question, et donc tout le plan en question. Du coup on bosse on bosse mais si ça se trouve c'est dans le vide. Et j'ai l'impression qu'on passe plus de temps à parler de tout et de rien que véritablement de ce plan et du cœur du sujet. Au moins, sur le drive, on reste concentrés sur l'essentiel et on ne part pas en anecdotes sur notre vie.

LE CAMARADE DE CLASSE : Il est neuf heures trente du matin un dimanche, Flavie. T'es attendue à la messe après ou quoi ? Déstresse un peu. Ton temps n'est pas compté. Je t'assure que tous tes travaux de groupe se passeront vachement mieux si tu acceptes que ça prenne un peu plus de temps que "le moins de temps possible". Les discussions ne sont pas une perte nette ; elles participent aussi à la confiance entre nous, aux bonnes relations du groupe, à augmenter notre efficacité future.

FLAVIE : Tu sais c'est quoi la définition de l'efficacité ? C'est justement de faire un travail de qualité en le moins de temps possible. Et travailler en groupe c'est juste le contraire de l'efficacité. Enfin, ça dépend pour quoi et comment. Pour faire les recherches je veux bien avouer que c'était un avantage, parce que vu le nombre d'articles à lire je ne compte pas le temps qu'on y aurait passé. Mais maintenant qu'il faut structurer les idées et grosso modo faire une dissertation, avoir plusieurs cerveaux au lieu d'un, c'est plus une plaie qu'autre chose.

LE CAMARADE DE CLASSE : C'est aussi ce qui permet de faire germer des idées nouvelles.

FLAVIE : Peut-être bien, mais à quel prix ? On est trois dans ce groupe, alors il faut se dire qu'une réunion de deux heures ce n'est pas deux heures de perdues ; c'est six heures de perdues ! En se partageant les parties et en bossant chacun de son côté, ces dix heures seraient beaucoup plus mises à profit.

LE CAMARADE DE CLASSE : Bah heureusement que Jacynthe n'est pas là alors, comme ça ce sont deux heures de gagnées. Et tu sais bien que pour faire un plan on est obligés de s'accorder. Il y a des choses sur lesquelles on peut se partager le travail, et d'autres non. En plus, le temps perdu là, en l'occurrence, c'est toi qui en est la cause, à force de te plaindre.

FLAVIE : Non mais peut-être que tu as raison. Peut-être que débattre de tout ça et définir une bonne fois pour toute notre façon de travailler, ça nous fera gagner en efficacité pour la suite.

LE CAMARADE DE CLASSE : On est d'accord. Maintenant, pour en revenir au travail, je trouve que tout le plan qu'on a là se tient, mais je ne suis pas certain que ça réponde vraiment à la consigne, que ce soit ce que veut la prof.

FLAVIE : Bien sûr que ça ne répond pas à la consigne ! Il manque la dernière partie. On a le un, le deux et le trois, mais tout ça ça mène à quoi ? Il faut une synthèse à la fin. Un grand quatre qui essaye de lier ensemble les idées des trois parties précédentes et d'en tirer des conclusions qui auront un impact pratique.

LE CAMARADE DE CLASSE : Mais tu vois ce que ça pourrait être ce quatre, toi ?

FLAVIE : Non ! C'est pour ça qu'on n'a pas du tout fini ! A mon avis, il faut lister des questions qui surviennent quand on confronte les idées des trois parties ensemble. Je pense que, là, on a largement de quoi lister les questions et les contradictions. Mais on n'a pas de quoi donner des réponses. Ce qui veut dire, plus de recherche documentaire à faire encore. Pour tenter de trouver les réponses. Et ça veut aussi dire qu'on ne peut pas faire le plan du quatre tant qu'on n'a pas fait ces recherches. Et ça veut aussi dire que, si ça se trouve, on ne va rien trouver d'intéressant. Et que, pour l'instant, on n'a aucune idée de ce à quoi va ressembler notre devoir final.

LE CAMARADE DE CLASSE : Et ça veut dire aussi que tu vas continuer à stresser tout le monde en leur communiquant ton stress.

FLAVIE : En fait, je suis contente que Jacynthe ne soit pas là. Déjà ça fait une personne de moins pour me faire perdre mon temps avec ses remarques sur ma personnalité au lieu de bosser. Et de deux, vu comme c'est compliqué de se mettre d'accord à deux, bah à trois ce serait encore pire.

LE CAMARADE DE CLASSE : En même temps, à t'écouter on dirait qu'à tes yeux, le moyen le plus efficace de travailler en groupe, se serait de te laisser faire tout le travail et prendre toutes les décisions toute seule.

FLAVIE : Mais pas du tout. Je trouve juste ça stupide de perdre du temps comme ça. On a chacun lu une partie des articles et synthétisé nos infos, ça a été hyper efficace de travailler comme ça. Après, je ne vois pas en quoi ça aurait été si horrible de me laisser faire le plan toute seule. Au final celui auquel on a abouti aujourd'hui est quasiment le même que celui que j'avais proposé sur le drive.

LE CAMARADE DE CLASSE : Sauf que c'est important de ne pas t'approprier le travail et de demander l'avis de chacun. C'est important qu'on ait l'impression de participer et qu'on ne se dise pas qu'avec n'importe qui d'autre que nous dans ton groupe il n'y aurait pas eu de différence sur le résultat final.

FLAVIE : D'abord Jacynthe, et puis maintenant toi. Je trouve ça gonflé quand même. "Tu as tout fait toute seule, ce n'est pas juste." Oui ce n'est pas juste. Ce n'est pas juste de tout faire toute seule, de travailler plus que vous. Ce n'est pas juste pour moi ! Ce n'est pas envers vous que c'est injuste. Et personne d'autre ne prend d'initiative. Personne ne fait rien et moi j'ai besoin d'avancer. Parce que le semestre vient juste de commencer et les devoirs vont vite s'accumuler. Donc, c'était soit j'avançais seule, soit je vous donnais l'ordre d'avancer. Vous auriez préféré que je vous gronde de n'avoir rien foutu ? Ça aurait été plus juste que de proposer un plan, c'est ça ?

LE CAMARADE DE CLASSE : Les devoirs vont vite s'accumuler, c'est vite dit. On n'en aura qu'un seul par matière ; le concept c'est justement d'avoir tout le semestre pour les faire. Donc on n'a pas du tout rien foutu. On a lu dix articles chacun et on en a fait une synthèse, c'est déjà pas mal du tout en deux semaines sur une seule matière. On avançait. Peut-être pas à ton rythme à toi, mais on avançait. En même temps, si ton rythme c'est de finir en un mois le travail de trois mois, c'est peut-être toi qui est en tort dans l'affaire.

FLAVIE : Peut-être que je vais trop vite, mais ça va, vous en profiterez bien quand vous croulerez sous les autres travaux à la fin du semestre. Alors, au lieu de me faire des reproches, peut-être que me remercier aurait pu être une option.

LE CAMARADE DE CLASSE : Non, on ne va pas te remercier, Flavie. Tu serais contente toi, si tu te retrouvais dans le groupe d'un redoublant qui te posais sur la table le devoir fini et te disais que ce n'est pas la peine de bosser dessus ? Je ne crois pas. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas envie de bosser aussi vite que toi qu'on n'a pas envie de bosser. On a envie d'apprendre et de s'entraîner nous aussi, et surtout d'avoir du mérite dans notre note finale. Peut-être que notre rythme n'est pas le même que le tien, mais au lieu de nous en vouloir ou de nous imposer le tien, il aurait mieux valu se mettre d'accord dès le début sur des deadlines.

FLAVIE : Les deadlines ce n'est pas réaliste. On ne sait jamais ce que va être le travail à faire. Ça dépend des éléments qu'on trouve dans nos recherches. Si ça se trouve, aujourd'hui on aurait eu assez de matière pour rédiger le devoir complet. Finalement on n'a pas de quoi faire le grand quatre on est obligés de déterminer quelles questions subsistent pour ensuite faire de nouvelles recherches. D'ailleurs, est-ce qu'on pourrait s'y mettre ?

LE CAMARADE DE CLASSE : Le principe d'une deadline c'est d'être un maximum, ça ne veut pas dire qu'on sait quand on va finir ci ou ça et combien de temps ça va prendre. C'est juste un maximum pour chaque étape.

FLAVIE : Mais on ne peut pas savoir à l'avance quelles vont être les étapes, ou même combien il y en aura exactement.

LE CAMARADE DE CLASSE : On peut très bien dire que pour telle date il faut avoir le plan fini, pour telle autre toutes les infos détaillées et pour telle autre le devoir rédigé.

FLAVIE : Ce n'est pas linéaire ! C'est toujours des aller-retour entre détailler les infos et faire le plan, et modifier le plan parce qu'on se rend compte qu'il manque des infos ou qu'on en a trop.

LE CAMARADE DE CLASSE : On peut quand même s'accorder les uns avec les autres sur le rythme auquel avancer. Parce que les tensions viennent surtout du fait qu'on n'a pas tous la même vision de ça.

FLAVIE : Et si on ne passait pas tant de temps à résoudre les tensions, on serait presque au rythme que je souhaitais.

LE CAMARADE DE CLASSE : Du coup, tu crées toi-même ton propre problème. Parce que sans ton attitude stressante on n'aurait pas de tension à résoudre.

FLAVIE : Et on parle de Jacynthe qui nous lâche en ne venant pas ? Après il ne faudra pas se plaindre qu'on s'est appropriés le travail.

LE CAMARADE DE CLASSE : J'ai proposé cette réunion le cendredi pour le dimanche, on peut comprendre qu'elle ne puisse pas se rendre disponible. En plus, Jacynthe elle pouvait demain soir, mais c'est toi qui ne ne voulait pas.

FLAVIE : Moi j'étais pour que ce plan soit validé au plus vite. Si vous n'êtes pas capable de le faire sur le drive il fallait se voir au plus vite. Parce que derrière il y a des recherches à faire, et tant qu'on est bloqués là dessus on ne peut pas avancer.

LE CAMARADE DE CLASSE : Alors listons ces fichues questions sur lesquelles faire des recherches. Travaillons, au lieu de parler de notre façon de travailler.

FLAVIE : C'est ce que je dis depuis tout à l'heure !

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