chapitre 3
Dès que j'eus raccroché, je composai le numéro de son portable. Mais la sonnerie retentit dans la cuisine et je trouvai sans peine l'appareil dans son tiroir habituel. Il n'aimait pas qu'on l'appelle "comme si on le surveillait". La Mercédès stationnait devant le garage, rutilante. La moto, elle, avait disparu et mon coeur se mit à battre plus fort en le constatant.
Etait-ce l'heure H du jour J ?
Je m'allongeai sur le lit, regard fixé sur le réveil dont la trotteuse n'avançait plus assez vite.
Si je m' endormis, ce fut sans doute à cause des comprimés. A mon réveil il faisait grand jour. Mon regard erra des rideaux de velours rouge à la gravure mille fois observée : on ne verrait jamais le visage de la femme au panier de fleurs qui, dissimulée par les bords de son vaste chapeau, n'avait pas un regard pour Arlequin.
Subitement, je me rappelai tout et j'eus une bouffée de chaleur.
Le téléphone, sonna. Je me précipitai.
- allô ?
Mais ce n'était rien. Juste encore un de ces coups de fil publicitaires. Je raccrochai sans un mot, puis me rendis dans la salle de bain où je nouai autour de mon cou, soigneusement, un foulard en soie bleue, pour cacher les marques rouges sur ma peau.
Je parcourus ensuite chacune des quatorze pièces de la maison, ouvrant chaque porte, chaque tiroir. Le temps, semblait-il, ne voulait pas s'écouler. Finalement je m'emparai d'une éponge et me mis à frotter frénétiquement le plan de travail en marbre de la cuisine. Il FALLAIT que je FASSE quelque chose. Quand j'eus finis, je m'attaquai aux vitres de la large fenêtre.
Toujours rien.
J'empoignai l'aspirateur. Quelques instants plus tard je sursautai lorsqu'une main énorme se posa sur mon épaule, tandis qu'un pied chaussé d'une botte éteignait l'appareil. Deux gendarmes me faisaient face :
- Vous êtes bien Madame Levèbvre ?
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