Une feuille est tombée en ce moment d'avril,

Depuis longtemps sa vie ne tenait qu'à un fil ;

Fil du téléphone, dispensant l'amitié,

Transmettant son amour envers le monde entier.

L'arbre en totalité a retenu ses pleurs

Pour ne point ajouter aux proches la douleur.

Malgré tout ont coulé des larmes de rosée

Qui l'ont accompagnée jusqu'à sa reposée.

Ainsi s'est composé l'humus de la terre,

Sève du souvenir, à l'arbre nécessaire.

La vie continue, vie d'un moment actuel,

Eternel renouveau du cycle perpétuel.

Regarde Katchina, là-haut point déjà

Le bourgeon de la fleur qui te remplacera.

27/04/1989

Ce court poème nécessite une explication.

"Katchina" était le pseudonyme d'une connaissance devenue amie, avec qui j'avais échangé longuement, à l'époque du minitel et d'un serveur gratuit fréquenté par des joueurs (ou pas) de tout poil.

Nous avions très longuement discuté, de philosophies, de métafisique, de pataphysique, de livres et du Petit Prince dont elle m'avait même envoyé un exemplaire avec une dédicace (*).

Un jour Katchina ne s'est plus connectée et a disparu, sans explication. J'ai appris quelque semaines plus tard qu'elle était décédée. Elle se savait condamnée à court terme par un cancer depuis plusieurs mois, mais ne l'avait jamais évoqué.  J'ai alors découvert un tout autre sens à nos échanges.

La dernière phrase du poème se veut positive, car elle a rit jusqu'à ses dernier mot, et elle soutenait que personne n'est indispensable. Mais elle m'a beaucoup manquée.

(*) J'ai accepté de le prêter et il ne m'est jamais revenu : méfiez-vous de vos ami(e)s.

Si vous découvrez un album du Petit Prince avec une dédicaces de "Katchina" sur la première page, sachez que je serais infiniment heureuse de le retrouver.