Chapitre 8
- Je ne comprends pas ce que tu veux dire, je suis Killian Blackhawke, je ne vois pas qui je pourrais être d'autre.
Il est clair qu'il ne me croit pas une seconde, mais qu'est-ce que je peux lui dire d'autre ? Pas la vérité en tout cas. Je choisis donc de faire l'innocent qui ne comprend pas, peut-être va-t-il se lasser et me laissera ainsi tranquille ? J'ai peu d'espoir que ça marche, mais on ne sait jamais après tout.
Puis il se redresse avec un air... effrayant. Il n'a pas une tête menaçante, c'est plutôt l'aura et la prestance qui émanent de lui qui m'écrasent. Je me sens tout petit, j'ai envie de disparaître dans un trou de souris :
- Killian, je suis beaucoup de choses, mais je ne suis pas con. J'arrive très bien à savoir quand on se fout de moi tu sais.
Il se penche de nouveau vers moi et je ne peux m'empêcher de reculer tout en jetant un regard suppliant à l'ange qui n'a pas bougé. Mais il se contente de me regarder avec un air désolé, il ne peut rien pour moi :
- J'attends une réponse chaton, faut-il que je répète la question ? Je te le demande encore une dernière fois, qui es-tu ?
Je reste muet, je vois bien qu'il s'impatiente, mais la peur, cette compagne sournoise, m'empêche de dire ou de faire quoi que ce soit.
Finalement, je trouve assez de force pour le repousser loin de moi et me lever :
- Je ne vois pas pourquoi je devrais te répondre, après tout tu n'es ni mon père, ni mon ami et de quel droit tu me retiens prisonnier ici ? Je te signale que je suis libre et pas un vulgaire jouet ! Je n'ai pas à te dire qui je suis parce que tu n'as aucune autorité sur moi !
J'ai cette impression quasi certaine que mes paroles servent plus à me convaincre moi-même que lui. Je m'avance vers la porte. Mais au moment où je pose une main sur la poignée, je me retrouve plaqué contre le battant de bois.
Je grogne un peu, mes mains sont immobilisées au-dessus de ma tête et le visage du Nephilim est tout près du mien :
- Écoute-moi bien. Ici j'ai toute l'autorité et tous les droits, donc tant que tu seras sous mon toit, je pourrais faire de toi ce que je désire est-ce bien clair ? Mon frère m'a dit que tu n'avais pas menti, je vais le croire. Cependant j'ai décidé que je ne te laisserais pas partir sans avoir découvert ta véritable identité. Il est hors de question qu'un chat sauvage se balade dans ma ville sans ma permission, tant que je n'en saurais pas plus sur toi. Si je laissais les nouveaux venus libres de leurs mouvements, ce serait la porte ouverte aux problèmes supplémentaires. Alors je vais te garder ici, avec moi, bien au chaud et je te ferais cracher ce que tu refuses de me dire.
Je le regarde avec des yeux écarquillés. Comment peut-on être à la fois si beau et si terrifiant ? Attendez une minute, il vient bien de dire que cette ville était la sienne ?
- Tu es le chef du gang qui dirige la ville ? demandé-je.
Un sourire mauvais et très peu rassurant se dessine lentement sur son visage :
- Tu as tout compris petit chat. Je te le répète : je peux donc faire de toi ce dont j'ai envie. Mais puisque pour le moment tu ne sembles pas vouloir me raconter ce que je veux savoir, je vais te garder enfermé ici.
Il se recule avant de me pousser vers le lit, son frère l'ayant rejoint sans rien dire. Ce dernier a l'air triste, il n'est sans doute pas d'accord avec la façon de faire de son jumeau :
- Attends, tu n'as pas le droit de me retenir prisonnier dans cette chambre ! protesté-je en me redressant.
Il me lance un sourire cruel et sadique qui me fait frissonner de la tête aux pieds et il ouvre la porte :
- Je te rappelle que je suis le roi ici. J'ai toute latitude pour faire ce que bon me semble. Oh et ne songe même pas à défoncer la porte, tu n'as aucune chance d'y arriver. De toute manière tu serais de nouveau capturé, alors sois sage.
Et sur ces paroles menaçantes, il quitte la pièce. Azraël le suit et je me retrouve de nouveau séquestré dans cette chambre. Je n'aime pas être retenu dans un endroit clos, ne pas pouvoir sortir d'une pièce devoir y rester contre mon gré, ça me rend fou.
Je me lève et commence à faire les cent pas, il faut que je sorte, je DOIS sortir d'ici. Je suis venu dans cette ville pour rester vivant, pour recommencer une énième fois ma vie. Mais voilà, le destin ne m'aime pas et je me retrouve prisonnier d'un Nephilim qui ne compte pas me laisser partir avant que je lui ai tout raconté sur moi... Putain de destin de merde !
Je donne un violent coup de poing dans le mur. Je ne ressens aucune douleur, juste la frustration qui gronde en moi.
Je ferme les yeux et respire lentement, posément, je dois me calmer, ne pas laisser la colère me dicter ma conduite, sinon je vais faire des conneries.
Il faut que je réfléchisse à la situation avec ma tête et non avec mes émotions. Bon, il m'a dit que je ne pourrais pas briser la porte et je le crois assez facilement. Peut-être la baie vitrée ?
Je me dirige vers celle-ci avant de l'ouvrir. J'avance sur le balcon et me penche pour regarder dans le vide. Merde c'est trop haut, si je saute je risque de m'aplatir tout en bas comme une crêpe ! Il a bien prévu son coup ce connard !
Je rentre de nouveau dans la chambre. Y aurait-il une fenêtre dans la salle de bain ? Parce que oui, la porte près de mon lit mène forcement à la salle de bain. Cet endroit est un hôtel.
J'y pénètre donc, elle est immense ! Elle fait deux fois la taille de celle de l'appartement que j'ai loué. Oh mon dieu ! Mon appartement ! Mes affaires ! Comment vais-je faire pour tout récupérer ?
Je fouille mes poches, paniqué et je soupire un peu de soulagement en mettant la main sur mon portable. Ils ne me l'ont pas pris.
Je déverrouille l'écran de mon IPhone, un cadeau d'un client quand j'étais encore prostitué. Je cherche le numéro de mon propriétaire et j'appuie sur « appeler ».
La sonnerie retentit, une, deux, trois, quatre fois, mais rien personne au bout du fil. En plus la ligne est coupée sans même me renvoyer sur son répondeur, qu'est-ce qu'il se passe ? Ce n'est pas normal.
J'essaie une deuxième fois, mais c'est le même scénario.
Je tente avec un autre numéro, celui de l'homme qui m'a donné sa carte, toujours rien. Cette fois, plus de doute possible, je me retrouve isolé de tout lien avec l'extérieur.
Je range mon téléphone en marmonnant. Je ne suis pas rassuré du tout, il faut que je sorte d'ici au plus vite ! Je me le réitère comme un leitmotiv afin de me motiver et de me rassurer.
Je regarde la salle de bain, les murs et le sol sont en carrelage bleu clair et blanc, avec une baignoire/douche d'un côté et des toilettes de l'autre.
Au milieu il y a un lavabo avec dessous un placard contenant tout ce qu'il faut pour se laver et la lampe du plafond est en forme de poisson.
J'examine attentivement la pièce. Pas de chance, il n'y a aucune issue, aucune fenêtre. La seule sortie est un conduit d'aération fixé sur le mur, mais il est trop étroit pour que je puisse y passer. La poisse me poursuit !
Je sors de la salle d'eau découragé, avant de m'affaler dans lit moelleux, au moins je bénéficie d'un certain confort, c'est déjà ça.
Je reste un moment sans bouger à chercher en vain une solution pour me sortir de ce pétrin ! Je sais pertinemment bien que Gabriel s'attend à ce que je lui raconte ma vie, mais je ne l'ai jamais dévoilé à quiconque et ce n'est certainement pas maintenant que je vais le faire.
Autant profiter de ce temps pour me doucher. Moi qui suis à cheval sur l'hygiène, passer une journée sans me laver... c'est trop long.
Un feulement de bonheur m'échappe quand je sens l'eau chaude qui coule le long de mon corps. C'est tellement agréable ! Je pourrais ronronner tant cette sensation me paraît divine.
L'odeur et l'onctuosité du savon sont exquises. Puisque je suis bloqué ici autant profiter du luxe non ?
Une fois mon corps lavé, j'attaque mes cheveux aussi noirs que la nuit et lisses comme la surface d'un miroir.
J'ai toujours eu de très beaux cheveux qui sont un héritage de ma mère, doux pareils à de la soie. Ils commencent d'ailleurs à être un peu trop longs, arrivant un peu aux dessous des épaules. Je vais finir par ressembler à une fille à force, déjà que j'ai un visage et un physique androgynes.
Je profite d'un moment de bien-être en restant longtemps sous ce flot d'eau chaude. Quand je suis propre comme un sous neuf, je sors de l'espace en verre et attrape une serviette pour me sécher.
Quand je m'extirpe de la cabine en verre avec ma serviette autour de ma taille, je réalise qu'est est hors de question de remettre des habits sales et... je n'ai pas de vêtements de rechange.
J'ai beau chercher autour de moi, certes il y a bien une armoire mais en ouvrant les battant en bois, je ne peux qu'apercevoir... le vide ! Rien de rien. Je me résous donc à garder ma serviette pour unique vêtement.
Je soupire et retourne dans le lit, attrapant la télécommande sur la table de nuit pour allumer la télévision. Une façon comme une autre de tuer le temps, mauvaise habitude prise ces derniers temps.
Je zappe sur les chaînes, il y en a pas mal, mais je ne trouve rien d'intéressant. Je finis par m'arrêter sur Batman VS Superman. Je n'aime pas Superman, mais j'adore Batman, je trouve qu'il représente beaucoup mieux le super héros que Superman. Enfin c'est mon point de vue.
Le temps passe nettement plus vite, surtout si on regarde un bon film et c'est le cas.
À la fin du film et alors que je m'apprête à nouveau à faire défiler les programmes, la porte de ma chambre s'ouvre. Je me tends, prêt à me battre ou même à essayer de m'enfuir si jamais on m'agresse, mais je me retrouve en face d'un jeune garçon qui doit avoir seize ans à tout casser. Il a des cheveux aussi rouges que ses yeux de vampire et de petites taches de rousseur qui ressortent clairement sur sa peau pâle comme la neige.
Il porte un plateau d'une main et des vêtements dans l'autre. Il referma la porte d'un coup de pied puis il se tourne vers moi en souriant :
- Salut, Killian ? Je suis content de te rencontrer, je m'appelle Aaron ! Je dois m'occuper de toi pendant ton séjour parmi nous ! dit-il joyeusement.
Je le regarde, surpris. On m'a confié à une nounou ? Je ne suis pas un gamin !
- Heu... Bonjour Aaron, donc tu es chargé de prendre soin de moi ?
Il m'adresse cette fois-ci un large sourire qui dévoile ses petits crocs, moi qui ne suis pas très vampire, je dois avouer que ça le rend mignon :
- Oui, je t'apporte tes repas, des habits propres et je dois te donner tout ce que tu me demandes. Tu devrais aller te vêtir, tu ne voudrais pas rester en serviette tout de même ?
Il me tend les habits avant de poser le plateau sur le lit. J'attrape les vêtements, allant rapidement les passer dans la salle de bain avant de revenir dans la chambre :
- Qu'est-ce que Gabriel compte faire de moi ? demandé-je en le regardant.
En attendant sa réponse, je m'assois sur le matelas et commence à manger. Ce n'est que lorsque je mets la première bouchée dans ma bouche que je réalise à quel point j'ai faim.
Le vampire me regarde faire en rigolant avant de répondre à ma question :
- Je ne sais pas, il ne m'a pas donné d'information à ce sujet, il m'a juste demandé de m'occuper de toi. C'est vrai que tu as brisé des chaînes enchantées et défoncé une porte à mains nues ? questionne-t-il avec des étoiles dans les yeux.
Je le regarde, déconcerté par ce qu'il vient de dire, les nouvelles circulent vite ici. Portant une fraise figée à quelques centimètres de ma bouche, je lui réponds :
- Oui, pourquoi ?
- Tu dois être super fort pour réussir un tel truc ! Je ne connais personne ici capable de faire ça. Comment tu as fait ? Tu es quoi ? Parce que c'est sûr que tu n'es pas humain.
Je suis assez embarrassé, personne ne m'a jamais admiré pour ça, et puis surtout je ne peux pas répondre à ses questions :
- Écoute Aaron, je n'ai pas envie de m'étaler sur mes performances d'accord ?
- Oh, c'est pas grave.
Je me rends compte tout de suite qu'il est triste, mais je ne peux pas lui dévoiler, j'ai toujours refusé d'évoquer ce sujet avec qui que ce soit :
- Tu as l'air gentil vraiment, mais je ne suis pas du genre à raconter ma vie au premier venu tu comprends ?
- Oui, c'est ma faute je n'aurais pas dû te demander, désolé.
- Ce n'est rien. Dis-moi, tu n'es pas un peu jeune pour faire partie d'un gang ? Tu as quel âge ? l'interrogé-je.
- J'ai vingt ans ! Mais je suis devenu un vampire à seize, voilà pourquoi j'ai l'air d'un adolescent. C'est Lothaire qui m'a transformé et le boss m'a promis qu'il trouverait un moyen de changer mon apparence pour que j'aie l'air d'un adulte !
- Je vois, tu as l'air de beaucoup aimer Gabriel, pourquoi es-tu devenu un vampire ?
Je vide ma canette de coca tout en le regardant, il n'a pas arrêté de sourire depuis qu'il est entré dans ma chambre, ce qui est très surprenant :
- Oui j'adore Gabriel, il m'a sauvé d'un vampire. Celui-ci a tué toute ma famille et il allait le faire avec moi, mais le boss est arrivé et l'a arrêté et il a demandé à Lothaire de me transformer en vampire car j'avais une blessure très grave et j'allais mourir s'il ne le faisait pas. Depuis je travaille pour lui, je lui dois la vie tu sais.
- Tu n'aurais pas préféré aller au Paradis avec ta famille ?
J'avoue que j'ai beaucoup de mal à comprendre son choix, il préfère passer l'éternité sans sa famille plutôt que d'aller au Paradis avec eux ? Si j'avais pu, je serais mort avec ma mère. Cependant je lui ai promis de vivre et je tiens toujours mes promesses :
- Non je n'ai pas voulu, parce que ma mère m'a toujours conseillé de vivre le plus longtemps possible pour découvrir toutes les merveilles de ce monde ! Même si Dark City n'est pas une ville merveilleuse, je voyage souvent avec le boss et je découvre plein de choses superbes.
Je comprends un peu mieux maintenant sa fascination pour Gabriel. Seulement nos situations sont différentes. Lui a encore quelqu'un à qui il tient sur cette terre, moi je n'ai plus personne :
- Tu as fini ? Est-ce que tu as besoin de quoi que ce soit ? me demande-t-il en se levant pour prendre le plateau.
- Et bien, tu serais d'accord pour aller chez moi ? Puisque je suis obligé de rester ici, je voudrais que tu m'amènes mes affaires.
Je lui tends les clés de mon appartement et il les prend en souriant :
- Pas de problème je le ferais, à plus tard alors ? me lance-t-il en quittant la chambre.
Une petite sieste serait la bienvenue aussi, mes yeux se ferment tout doucement et alors que je suis sur le point de sombrer dans les bras de Morphée, mon téléphone sonne.
Très surprit, car je pensais qu'il était en dysfonctionnement je l'attrape pour vérifier le numéro : inconnu. Je fronce les sourcils, c'est de plus en plus bizarre.
Je décroche et le porte à mon oreille :
- Allô ? Qui est-ce ?
- Bonjour Killian lâche une voix grave et inquiétante.
La voix qui me répond me glace le sang, parce que je la reconnais, ce ton froid, grave et rauque.
La peur s'empare lentement de tout mon être, mon sang devient gelé et mes mains commencent à trembler :
- Nous allons te trouver Killian. Tu peux te cacher où tu veux, fuir autant que tu le souhaites. Tu finiras quand même par être à nous.
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