3.8 - La traque.

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Bien qu’ils déambulent en face de moi, à moins de dix mètres, il ne me semblait pas qu’ils m’aient repéré. Je songeai qu’ils pensaient probablement m’avoir laissé pour mort après mon agression, de plus, ils me semblaient déjà passablement avinés. Profitant de la foule assez dense sur le quai, Je me fis discret en leur tournant le dos et les laissai passer.

J’essayai de rentrer en contact télépathique avec Sour. N’ayant pas encore une assez bonne maîtrise de ce mode de communication, je n’y réussis pas et ne pus que me maudire de ne pas avoir moyen de le joindre dans cette cité inconnue.

Laissant les trois gredins prendre quelques mètres d’avance, je les suivis prudemment. La traque n’était pas difficile, car ils avançaient lentement et je comptais bien qu’ils me conduisent jusqu’à leur repère. Cependant la foule se dissipant, ma filature devint de moins en moins discrète.

C’est alors que j’aperçus, venant à moi en sens opposé, Noah et Télémaque sur leur embarcation. Je m’approchais du canal et fis des grands signes muets en leur direction. Le médecin me vit le premier et se doutant que quelque chose n’allait pas, orienta le véhicule dans ma direction sans faire de bruit. Télémaque, qui venait tout juste de me voir hurla mon nom. Noah dut lui dire de se taire car il ne persista pas et se fit discret.

Dès qu’ils furent arrivés en bordure de quai, à mon niveau, je leur expliquai rapidement la situation. Nous décidâmes de continuer la poursuite en bateau, ce qui nous semblait plus discret. Aussi Télémaque descendit et je pris sa place devant Noah.

Le visage de Télémaque exprima une grande frustration, que j'attribuai au fait qu'il ne pouvait participer à la poursuite. Il se proposa néanmoins d’essayer de les traquer sur les terrasses et, avec notre accord engagea la filature.

Nos proies ayant continué à avancer, nous reprîmes notre chasse. La circulation s’accroissant aussi bien sur le quai que sur le canal, nous faillîmes les perdre de vue. Mais l’habileté de pilote de mon skipper permit, parfois au prix de quelques quolibets, d‘éviter de les perdre.

Tout se passait bien jusqu'au moment où l’un des deux lourdauds trébucha et s’étala de tout son long sur le quai. Le rouquin passa devant lui pour l’aider à se relever, mais levant les yeux, il nous vit.

Je sus tout de suite que cette fois il m’avait reconnu, car il parla au troisième homme en indiquant notre direction. Aussitôt les trois individus semblèrent retrouver tous leurs moyens et se mirent à courir pour se diriger vers le premier bâtiment qui, par malchance, était un grand magasin.

  • S’ils rentrent là-dedans c’est fichu, nous ne pourrons jamais les retrouver, me dit Noah. D’autant que cet établissement possède plusieurs entrées et donne aussi sur un pont surélevé.
  • Tu as probablement raison. Mais essayons quand même de nous rapprocher, lui répondis-je.

Nous franchîmes donc la largeur de la voie d’eau mais ayant à peine accosté nous les vîmes disparaître dans le bâtiment. C’est à ce moment que Télémaque réapparut, mais lui non plus n’avait pu les suivre.

  • Et merde, nous allons les perdre, jura Noah.
  • C’est sûr, il nous faudrait beaucoup de chance pour les retrouver. Et par ailleurs, nous ne sommes que trois et dans un endroit tel que celui-là, ils auraient tout loisir de nous tendre des pièges, confirmai-je.
  • Le mieux est d’avertir la police locale. Son siège est à deux coups de rame d’ici. Allons-y, lança mon pilote.

À peine trois minutes plus tard, nous étions au commissariat où je retrouvais deux des hommes qui m’avaient interrogé le matin même. Ils avaient pris en charge l’enquête sur le nouveau crime et nous reçurent avec diligence.

Je leur expliquai les circonstances de ma rencontre et notre traque. Noah et moi pûmes préciser la description des trois hommes en fuite et affiner les portraits robots.

Aussitôt des dizaines d’hommes investirent la zone où nous avions vu disparaître le trio. Mais au bout d’une bonne heure, il a fallu se rendre à l’évidence. Les criminels étaient passés à travers les mailles du filet.

À peu près au moment où ce constat devint une évidence, Sour entra dans le bureau où nous attendions.

  • Il semblerait que nous les ayons loupés de peu. C’est bien dommage.
  • Exact, lui répondit un des deux officiers qui nous avait reçus. Mais ceci-dit maintenant nous avons une description un peu plus fine d’eux et nous savons qu’ils sont encore en ville.
  • Sans doute pas pour longtemps, compléta mon ami. Il est très probable qu’ils soient déjà en route vers le sud.
  • Nous allons immédiatement diffuser leurs signalements à tous les points de contrôle routier. Nous allons aussi multiplier les inspections dans les ports. Ainsi il y a peu de chances pour qu’ils nous échappent, reprit l’autre policier. En attendant retournez à l’hôtel et n’en sortez plus de la soirée. Nous allons vous mettre sous protection, au cas où il leur viendrait l’idée de s'en prendre de nouveau à vous.

À cette idée, une sueur froide me parcourut le dos.

Nous quittâmes donc le bâtiment de la police pour embarquer sur une vedette rapide qui devait nous mener à l’auberge. Alors que Noah allait reprendre possession de son embarcation, Télémaque proposa que l’on se retrouve pour boire un dernier pot. Mais il fut dépité lorsque le médecin nous fit part de sa fatigue et de sa volonté de rentrer dans ses pénates.

Nous nous séparâmes donc, non sans que Noah nous ait promis de repasser le lendemain matin prendre de nos nouvelles.

Après un dîner léger, nous rejoignîmes nos chambres. Mais cette fois encore le sommeil se fit longuement désirer avant de me prendre pour une nuit agitée de rêves angoissés peuplés de truands et de violence.

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