Aujourd'hui
Poème pour répondre à l'appel à textes de la revue Encre[s], où il s'agit d'écrire à partir d'un morceau de musique.
J'ai choisi d'écrire sur l'interprétation par Hélène Grimaud du deuxième mouvement (Adagio assai) du Concerto en sol majeur de Ravel. Le poème est composé de deux parties qui répondent respectivement aux trois premières et aux trois dernières minutes du mouvement. Le minutage précis que j'ai suivi, dans le lien ci-dessous, est : 9:40 – 12:32 pour la première partie du poème, et 15:37 – 17:58 pour la deuxième.
https://www.youtube.com/watch?v=q1N7LVYcDJ0&t=937s
Tu regardais devant, les yeux un peu voilés :
L’avenir, le passé, tu les voyais ensemble
Dans ce vague présent dont quelque chose tremble
Où tu te tiens blanche toute aux pieds étoilés.
Moi je me raisonnais comme un singe savant,
— Ton eau, tu l’apportais au moulin de souffrance ?
Qu’avons-nous fait, qu’avons-nous fait de cette errance
Aujourd’hui nous voilà mais alors, mais avant ;
Qu’est-ce qu’il s’est passé dans le secret de soi ?
Nous étions les esclaves de lenteurs terribles,
Nous avons dû forcer nos chemins dans des cribles,
Qu’est-ce que c’est cette vie, qu’est-ce qu’on reçoit ?
⁂
Aujourd’hui nous voilà fébriles et fluides
À prendre tout d’un coup la vie comme elle vient,
Nous n’y pouvons plus rien, nous n’y pouvons plus rien,
Tant pis si nous avons laissé des places vides.
Nous avons trop souffert pour des causes perdues
Comme des jouets anciens dans les chambres d’enfants,
Désormais nous pouvons nous dire triomphants
— Ce sont des illusions que nous avons rendues.
N'est-ce pas ? je le vois dans tes yeux d'aventure
Que nous ne sommes plus du monde tout à fait ;
Dis-moi, qu'en penses-tu ? Est-ce qu'on a bien fait ?
Ce désert, est-ce bien encore la nature ?
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