Plus jamais ça, ces trois mots raisonnent en boucle dans ma tête et je comprends maintenant qu’il ne s’agit que d’un simple défouloir bien hypocrite pour dédouaner, pour déresponsabiliser et pour soulager les consciences. Je suis inquiet, terrorisé par ces trois mots qui ne veulent plus rien dire et auxquels j’avais pourtant axé tant d’espoir. J’ai peur maintenant de cet avenir qu’on nous dessine ; un avenir fou, complètement insensé où ceux qui possèdent les richesses en veulent toujours d’avantage, où ceux qui disposent de la puissance l’utilisent à leur propre fin, loin bien loin de toutes les préoccupations populaires.
Plus près de chez nous, brandit haut et fort au poteau de la constitution, notre constitution, trois autres mots : « Liberté, égalité, fraternité ». Trois mots qui sont tout aussi bafoués que les précédents. Jamais la population ne s’est vue imposer autant de contraintes reléguant nos libertés aux calandes grecques. Jamais les inégalités n’ont été aussi importantes, aussi flagrantes ; inégalités sociales, inégalités salariales, inégalités humaines toutes contestées sans honte aucune pour tenter de préserver le plus longtemps possible un système financier à l’image déjà largement ternie mais qui tient encore. Et que dire de la fraternité qu’on nous agite haut et fort lorsqu’il s’agit de rassembler alors que ces mêmes agitateurs prônent sans aucune vergogne les vertus de l’individualisme lorsque la division renforce leurs intérêts.
Le monde est fou et cette folie meurtrière empire de jour en jour. Elle massacre des innocents. Elle tue des hommes et des femmes. Elle blesse les corps, s’immisçant lentement dans l'esprit meurtrit de la vengeance qui des décennies durant, tentera d’effacer les tourments sournois des spectateurs innocents, des mômes incrédules, celui aussi des femmes et des hommes apeurés, horrifiés à l’idée de perdre ici un mari ou une épouse, là un enfant, un proche ou encore un ami. Il faut fuir, courir droit devant sans savoir où aller exactement. Partir devient une obsession lorsque la raison inviterait presque à rester pour prouver au monde entier qu’il ne s’agit pas d’une marque de faiblesse. Quel courage, quelle force. Je suis admiratif parce que je ne suis pas certain de détenir moi même toutes ces qualités tout comme nos politiciens bien plus poltrons dans leurs actes que dans leurs discours, trop soucieux de leur avenir personnel.
Ils nous avaient pourtant tous promis un monde meilleur, et on y a cru, nous les enfants de l’après-guerre, cette génération insouciante, presque volage, totalement décomplexée et voilà que cette guerre nous rattrape maintenant qu’elle nous prend les tripes, qu’elle nous vole notre décence pour l’exposer au monde en toute indécence, qu’elle viole nos convictions les plus profondes, qu’elle se jette avide sur des enfants, des femmes, des hommes pour leur prendre ce qu’ils ont de plus cher et qui tout comme nous n’ont rien demandé.
Spectateur de ces destins à jamais chamboulés, de ces destinées rompues, de ces vies arrachées dans la souffrance et la terreur, mon cœur saigne et mes larmes coulent. J’ai peur de devoir regretter tôt au tard la frigidité de nos dirigeants bien trop conciliant devant un peuple agonisant, un peuple implorant dignement un peu d’aide, juste un peu parce qu’ils ont compris qu’ils n’obtiendront pas grand-chose.
Je songe à cette femme violée par quelques hommes dans une rame bondée de banlieue parisienne ; des individus engoncés sur leur siège qui n’ont pas bronchés par peur de représailles. Ce même scénario se répète mais cette fois-ci à l’échelon mondial, cette impuissance redoutable, cette même lâcheté qui ne fait rien de plus que condamner l’insoutenable offrant de-ci de-là quelques facilités pour soulager les consciences. Pourtant, là, devant nos yeux, c'est un territoire qui est violé.
Dans le train, si tout le monde s’était levé, il y a fort à parier que cette jeune femme n’aurait jamais été souillée toute sa vie durant et probablement que si nous avions su montrer les dents nous aussi, une troisième guerre mondiale aurait pu être évitée parce que là, … rien ne dit qu’on y va pas tout droit.