Chapitre 4 : La soigneuse et l'université de magie de Spring Arrow

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J'ouvre péniblement les yeux pour me retrouver face à un plafond immaculé. La lumière éclatante m'aveugle tandis qu'une douleur lancinante envahit brusquement tout mon torse. La souffrance est si intense que je ne peux retenir un cri. Je suis totalement immobilisé, incapable du moindre mouvement. Comment suis-je arrivé dans cette pièce ? Et surtout, pourquoi cette douleur insoutenable ? Qu'ai-je bien pu faire pour me retrouver dans cet état ?

  • Vous êtes réveillé ? déclare une voix masculine.
  • Suis-je mort ? demandé-je.
  • Certainement pas, et vous n'êtes pas sur le point de mourir. Une soigneuse va arriver, répond la voix d'un ton nerveux, teinté d'un léger rire.
  • Une soigneuse ? Vous voulez dire un médecin ? interrogé-je.
  • Non, une soigneuse. Vous comprendrez bientôt, réplique la voix énigmatique.

À ce moment précis, une jeune femme fait son entrée dans la pièce. Elle est de petite stature mais arbore une élégance certaine avec sa blouse d'infirmière. Ses longs cheveux blonds sont parfaitement coiffés et lisses. Elle échange quelques mots avec le jeune homme que je n'arrive toujours pas à distinguer. Celui-ci quitte la salle, obéissant aux instructions de la « soigneuse », je présume. Elle s'approche de moi et pose délicatement ses mains sur mon ventre. Soudain, une chaleur douce et apaisante remplace l'agonie qui m'accablait.

  • Que me faites-vous ? lui demandé-je.
  • Vous n'êtes pas familier avec la magie de guérison, n'est-ce pas ? répond-elle d'un ton calme.
  • La magie ?

Et soudain, tout me revient en mémoire. Zélia et Nate avaient tenté de tuer un inconnu, et j'avais interposé mon corps pour le sauver d'une boule obscure lancée en sa direction. Mais ai-je réellement réussi à le sauver ? Honnêtement, cette situation relève de la folie pure, digne d'un asile psychiatrique. Il ne manque plus que des lutins et des éléphants roses pour parfaire le tableau. Je ne me considérais déjà pas comme quelqu'un de normal mais là, cela dépasse l'entendement. 

  • Je me souviens, dis-je en essayant de m'éloigner de la femme. Qu'est-ce que vous attendez de moi avec votre magie ? Je veux voir un médecin ! On a déjà tenté de me tuer une fois aujourd'hui, ça suffit !
  • Ne vous inquiétez pas, je ne vous veux aucun mal. Je suis une soigneuse, spécialisée en magie blanche. J'ai entendu votre histoire et je sais que votre première expérience avec la magie a été traumatisante. Rencontrer deux magiciens noirs dès le début est vraiment malchanceux, affirme-t-elle d'une voix rassurante.
  • Je ne vous crois pas, je veux voir un médecin, j'exige de voir un médecin, rétorqué-je avec fermeté.

En guise de réponse, elle saisit un scalpel qui traînait dans un coin de la salle. D'un geste vif, elle s'entaille le bras gauche et le sang commence à couler. Puis elle place sa main droite sur la plaie et la retire aussitôt. Comme par magie, il ne reste plus aucune trace de l'entaille, ni de sang.

  • Je répète, je ne vous veux aucun mal, je ne suis pas comme les deux personnes que vous avez rencontrées, je vous l'assure, explique-t-elle avec sincérité.

Si je pouvais bouger, je m'enfuirais certainement en courant. Mais soyons réaliste, je n'ai pas d'autre choix que d'accepter.

  • D'accord, mais juste cette fois ! Et je vous préviens, n'essayez pas de faire ce qu'elle m'a fait...
  • Elle ?
  • La personne qui m'a blessé, Zélia... Ma fiancée...
  • Je suis désolée, je n'aurais pas dû vous en parler.
  • Non, ce n'est pas grave. En fait, j'ai besoin de savoir. Je suis complètement perdu... Pouvez-vous m'expliquer pourquoi je suis ici ? Et où sommes-nous ? Ce n'est certainement pas un hôpital...
  • Appelle-moi Lyia, ce sera mieux. Après tout, je dois être plus jeune que toi, j'ai à peine 24 ans. Donc pas la peine de me vouvoyer, propose-t-elle avec amabilité.
  • D'accord, Lyia, hésité-je.
  • Alors, par où commencer... Tu es à l'université de magie de Spring Arrow. Nous y enseignons la magie bienfaitrice, les magies élémentaires, et même, pour certains, la télékinésie. Tu es ici parce que tu as sauvé l'un des nôtres.
  • Donc vous voulez dire que le garçon que j'ai tenté de sauver est aussi un magicien ?
  • Oui, et l'un des plus prometteurs, d'ailleurs. Il a veillé sur toi pendant une journée entière en attendant mon retour de stage en tant que soigneuse. Il s'est beaucoup inquiété pour toi.

Je suis soulagé de savoir qu'il avait survécu. Tout ce que j'ai traversé n'a donc pas été vain. Un soupir de soulagement s'échappe de mes lèvres, suivi d'un léger sourire. La situation était vraiment merdique, mais au moins, j'ai sauvé une vie... Une vie humaine, pour une fois, cela change de mon métier habituel.

Je me sens en confiance avec Lyia. Elle dégage une aura de bonté et de bienveillance qui me donne envie de lui confier tous mes malheurs et d'en apprendre davantage sur sa vie. Il y a quelque chose en elle qui me rappelle Zélia...

  • Comment s'appelle ce jeune homme ? demandé-je. Sait-il ce qui s'est passé, pourquoi ma copine l'a attaqué ? Qu'a-t-il fait pour provoquer cela ?
  • Il s'appelle Jake, répond Lyia. Malheureusement, je n'ai pas les réponses à tes autres questions...

Je décide de changer de sujet. À vrai dire, elle ne sait pas grand-chose de plus...

  • En fait, je ne me suis pas présenté, je m'appelle Silu Mosden.
  • Enchantée, Silu. Veux-tu que je fasse entrer Jake ? me taquine-t-elle gentiment.
  • Oui, j'aimerais bien le voir pour savoir comment il va et pour éclaircir les choses. Merci, Lyia. Je dois avouer que je suis perdu, j'espère qu'il pourra me donner des pistes pour éclairer tout ça...

Lyia retire ses mains de ma peau et je remarque que les brûlures sur mon torse ont disparu. Je n'ai plus mal et je parviens même à me lever. Lyia me regarde interloquée, comme si elle venait de voir un fantôme.

  • Qu'est-ce qu'il y a ? Ai-je fait quelque chose de mal ? N'ai-je pas le droit de me lever ?
  • Si, mais ce n'est pas normal. Normalement, tu devrais encore avoir mal pendant une semaine et être capable de te lever d'ici trois jours seulement. Je pense que tu ne pourras pas voir Jake tout de suite. Je dois en informer la directrice. Je suis désolée...
  • Ce n'est pas grave, la consolé-je. Ça peut bien attendre un peu. Après tout, je viens de voir ma vie défiler devant mes yeux, ça remet les choses en perspective.

Je ressens le besoin de la soutenir. Elle avait l'air si triste en m'annonçant que je ne pourrais pas voir la personne que j'avais sauvée. Je lui adresse un large sourire avant qu'elle ne ferme la porte derrière elle. Cependant, mon sourire s'efface rapidement, laissant place à des larmes dès qu'elle quitte la pièce.

Je suis perdu dans mes pensées, réalisant que ma vie est plongée dans un véritable chaos, avec tous les événements qui se sont produits. Tout a changé si rapidement, trop rapidement. Je me trouve maintenant dans une école de magie, et j'ai frôlé la mort en l'espace de quelques instants. C'est terrifiant de ne pas savoir ce qui m'attend à présent. J'espère pouvoir retrouver ma vie d'avant avec Zélia, tout en faisant connaissance avec Jake et Lyia. J'aimerais également parler avec Zélia de ce qui s'est passé, espérant qu'elle me dira que tout cela était un rêve, que ce n'était pas réellement elle. Peut-être qu'elle me dira que c'était sa sœur jumelle diabolique, ou qu'il y avait une autre explication pour me rassurer. Même si, au fond de moi, je soupçonne que ce soit bien elle qui ait tenté de tuer Jake, je ne peux m'empêcher d'espérer l'inverse. Maintenant que je découvre l'existence de la magie, je me demande jusqu'à quel point Zélia aurait pu être possédée ou avoir un double maléfique. Nate aurait aussi pu créer un mirage. Toutes ces hypothèses me donnent un mince espoir, celui qui m'aide à rester sain d'esprit. Du moins, si j'étais sain d'esprit auparavant.

Tout à coup, la porte s'ouvre, et je m'efforce de sécher rapidement mes larmes. Une femme de taille moyenne, mais élancée, entre dans la pièce. Elle semble avoir une quarantaine d'années et son visage est radieux, affichant un sourire chaleureux. Elle inspecte ma blessure sans laisser transparaître ses pensées. Quand elle se redresse, je scrute son visage pour essayer de deviner ce qu'elle pense. Elle semble perplexe, cela se lit sur son visage.

  • Bonjour, je me présente, je suis Madame Violane, la directrice, dit-elle d'une voix calme.
  • Bonjour, je m'appelle Silu Mosden, balbutié-je.

Elle prend une pause, comme si elle réfléchissait à quelque chose de précis, puis me regarde avec un air interrogateur.

  • As-tu un lien de parenté avec quelqu'un qui aurait pratiqué la magie ?

Vraiment ? Maintenant, je vais subir un interrogatoire ? Il ne manquait plus que ça... Malgré tout, je réponds à sa demande.

  • Non, je ne pense pas. En tout cas, je n'en ai pas connaissance. Bien que je ne connaisse pas très bien la famille de mon père, je serais étonné qu'ils soient des sorciers.
  • S'il-te-plaît, ne confonds pas les sorciers et les mages, dit-elle avec un ton blasé.

Et en plus, elle me prend de haut... Restons diplomate. Mon travail m'a appris à être poli en toutes circonstances.

  • Excusez-moi, je ne connais pas la différence.
  • Ce n'est pas compliqué, les sorciers utilisent la magie noire qui est enseignée ailleurs, tandis que les mages apprennent la magie blanche et élémentaire.
  • D'accord, donc les méchants sont les sorciers, ai-je conclu. Vous êtes en train de me dire que ma fiancée est un monstre sanguinaire qui veut tuer des gens ?

En disant cela, je réalise que cela correspond bien à la situation. Elle venait quand même d'essayer de tuer quelqu'un devant moi et j'ai été un "dommage collatéral".

  • Je n'irais pas jusque-là, ils ne sont pas les "méchants", ils ont une vision du monde différente. La vie n'est pas noire ou blanche, il y a de nombreuses nuances. Tu apprendras cela avec le temps.
  • Mais deux d'entre eux, dont ma petite amie, ont attaqué Jake et ont failli me tuer, crié-je.
  • Ce n'est pas de ton ressort. Cependant, tu viens d'être inscrit dans notre école en tant qu'apprenti magicien.
  • Moi ? Magicien ? C'est une blague ? Tant que vous y êtes, je suis une fée ? Appelez-moi Madame Irma aussi ? Vous n'avez pas une boule de voyance ou des cartes de tarot ? Je n'ai aucun pouvoir magique ! Je suis sûr que je peux lancer des boules de feu avec ma baguette invisible, ironisé-je. Je ne communique pas non plus avec les animaux, croyez-moi, je le saurai ! Et puis, j'ai ma vie en dehors de cette école. J'ai déjà fait six ans d'études, je ne compte pas me lancer à nouveau.
  • Je comprends ton scepticisme, mais pour l'instant, tu n'as pas encore découvert ton potentiel magique. Demain, tu passeras un test pour le découvrir. Et qui sait, peut-être qu'une baguette magique apparaîtra dans tes mains, ajouta-t-elle d'un ton sarcastique. En ce qui concerne ta vie, je suis désolée, mais tu es plus en sécurité ici qu'à l'extérieur de l'école. Je te laisserai décider, après ta convalescence, si tu veux rester dans notre école ou non.

Elle me laisse seul après m'avoir conseillé de me reposer. J'écoute donc son conseil et m'endors pendant quelques heures. Mon sommeil n'est pas long, mais il est réparateur, et Dieu seul sait à quel point j'ai besoin d'être réparé physiquement et moralement en ce moment.

Quand je me réveille, je suis surpris de voir Lyia penchée au-dessus de moi, me regardant attentivement. Je sursaute de surprise. Ses mains sont encore posées sur mon torse, mais cette fois-ci, je distingue clairement un fin filet bleuté les entourant. Il y a aussi une lumière turquoise sur moi, qui s'épanouit en forme d'étoile. Je ressens à nouveau cette sensation douce et agréablement chaude. Je ne me lasserai jamais de ce sentiment de bien-être lorsque Lyia me soigne.

  • Est-ce normal que je voie les filets cette fois-ci ? lui demandé-je, perplexe.
  • Non, pas vraiment. Seuls les mages et les sorciers le peuvent, mais rien n'est normal avec toi, me taquine-t-elle.
  • Donc je suis bien un magicien ?
  • Il semble que oui. J'ai hâte de découvrir ton attirance. Avec ta capacité à te guérir, tu pourrais être un soigneur ou peut-être un curateur, qui sait.
  • Quelle est la différence ?
  • Le curateur insuffle son énergie aux autres pour les soigner, tandis que le soigneur se sert plutôt de l'énergie environnante. Par exemple, si je suis dans une forêt, je peux mieux soigner les blessés. Toutefois, Mme Violane interdit toute plante verte dans l'infirmerie, rale-t-elle.
  • Je t'imagine bien porter un petit bonsaï, la taquiné-je.
  • En fait, c'est une bonne idée que tu viens de donner. Je devrais en parler avec la directrice !
  • Et... euh... je chuchote, hésitant.
  • J'en connais un qui veut me parler de Jake.

Je ne veux pas lui avouer, mais j'ai besoin de savoir pourquoi Jake a été attaqué, comment il m'a sauvé. Je veux comprendre tout ce qui s'est passé hier. Et c'est lui seul qui peut répondre aux questions qui me tourmentent.

  • Oui, je n'en ai pas encore eu l'occasion, je réponds.
  • En fait, pour l'instant, il est parti dormir. Il est quatre heures du matin. Tu le verras certainement demain.
  • Quatre heures du matin ! m'exclamé-je, mais il faut que tu dormes !
  • Oui, je vais y aller. Je te réveillerai à huit heures demain pour le petit-déjeuner, et je t'accompagnerai au réfectoire pour retrouver Jake.
  • Merci, et euh... désolé de te faire te lever si tard ou si tôt, c'est une question de point de vue, rien que pour me soigner. Bonne nuit, Lyia.
  • Ce n'est pas grave. J'étais heureuse de venir te soigner, j'ai décidé de le faire de mon plein gré. Je veux que tu te rétablisses le plus rapidement possible.

À peine est-elle sortie que je plonge déjà dans un sommeil profond.

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