Chapitre 22 - Confrontation

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Ils passèrent la fin de journée dans la petite maison d’Ishta, toute leur attention sur le Glesmlött. Ishta lui prépara un petit couchage avec les sacs de toile ramenés par Ulrik alors que celui-ci partit récupérer quelques-unes de leurs affaires ainsi que de quoi manger.

Se retrouvant seule avec ses pensées, Ishta s’était demandée si elle avait pris la bonne décision, rougissant encore d’avoir osé une telle proposition. Ulrik ne s’y attendait visiblement pas et le trouble qu’il avait affiché la faisait encore sourire. Elle savait qu’il ne la presserait jamais sur aucun sujet qui pourrait la mettre mal à l’aise mais se retrouvait en tête à tête avec lui jusqu’au lendemain la rendait nerveuse. D’un autre côté, pouvoir profiter de sa présence à volonté sans se sentir coupable lui apportait un sentiment de liberté enivrant.

Quand le chaman revint, ils discutèrent ce qu’il faudrait faire pour l’animal, Ishta lui expliquant comment s’y prendre pour que le glemslött les voit comme des membres de sa horde et non pas des proies. Elle lui expliqua qu’ils ne devaient pas éduquer par la peur car la peur ne fonctionnerait plus lorsque la bête découvrirait sa force. Au lieu de quoi il faudrait lui donner de l’amour, de l’affection et de la bienveillance.

« Comme on le ferait pour un enfant, en somme, répondit Ulrik. Ça a du sens… Si l’on veut qu’elle nous pense comme un membre de sa horde on doit la traiter comme un membre de notre famille... »

Ses paroles la troublèrent plus qu’elle n’aurait voulu l’admettre. Oui, les enfants Íbúa étaient traités avec amour, affection et bienveillance. Au Saam’Raji les animaux domestiques étaient élevés dans de meilleures conditions que les femmes et les enfants. Évidemment, il est logique de traiter correctement un animal capable de vous éventrer sur un coup de tête, alors que le futur de la nation et les femmes capables de les mettre au monde ne présentent aucune menace...

Mais ses pensées disparurent bien vite quand sa tête prit conscience de la deuxième partie de la phrase du chaman. Notre famille… Pas sa famille. Non, il l’avait inclus dedans. Une partie d’elle acceptait l’évidence du fait pour ce qu’elle était mais une autre partie, moins sûre d’elle, avait toujours du mal à croire à sa chance.

« Pourquoi tu ne veux pas l’emmener au Hoveduren ? »

La voix d’Ulrik la ramena au présent.

« Elle et moi on a besoin de calme pour se connaître. Et toi aussi. Beaucoup de monde tout d’un coup, la peur qu’elle va donner aux autres au début et le bruit, ça pas aider nous à se connaître.

- Et tu penses qu’une journée suffira ? »

Il paraissait surpris, à juste titre.

« Non, je besoin de quelques jours. Mais tu pas obligé resté si longtemps si tu pas envie. Je m’habituer vite, c’est pas soucis. »

Elle tenta de paraître sûre d’elle, mais elle n’avait pas du tout envie qu'il parte. Cependant, elle ne voulait pas non plus que le guerrier reste uniquement par sentiment d’obligation.

« Tu m’as proposé de partager cette maison avec toi, je t’ai dit oui. Si tu veux que je m’en aille il faudra me le dire clairement, sinon j’ai bien peur que tu sois coincée avec moi pour encore un bon moment. »

Ishta rigola, soulagée et reprit la parole :

« Si elle doit surveiller le territoire avec toi et tes autres guerriers, ça être mieux si elle les connaît. Tu crois eux pouvoir venir un peu dans les jours prochains ? »

Ulrik acquiesça.

« Il va falloir que tu lui trouves un nom, tu peux pas continuer à l’appeler ‘le bébé’... » reprit-il sérieusement.

Il avait raison. Elle ne savait pas comment les Íbúa choisissaient leurs prénoms, mais au Saam’Raji ils étaient sélectionnés avec soin. Leur signification pouvant avoir un impact fort sur le futur de l’être à qui il était donné. Les coutumes de l’Empire n’étaient pas toujours les plus brillantes mais celle-ci lui plaisait. ‘Ishta’ signifiait ‘Bien aimée’, si ce nom pouvait paraître ironique, il avait du sens quand on savait que sa mère était la concubine favorite de l’Empereur. Mais lorsque son père avait choisi son prénom, l’idée qu’il avait placée une cible sur le dos de son Ortie préférée ne lui avait pas traversé l’esprit. Ou peut être avait-il trouvé un plaisir malsain à voir l’Impératrice et sa rivale se battre pour lui ?

Ishta avait beaucoup d’attente sur l’avenir de la petite femelle glemslött. Certes, elle aiderait à la protection du clan dans un futur proche, mais Ishta allait surtout en faire l’affront suprême à l’encontre du Roi des rois. Il fallait un nom qui inspire la peur dans le cœur de leurs ennemis.

« Vabachea, dit-elle simplement. La fille du démon. »

Ulrik sourit.

« C’est toi le démon ?

- Non, ça est Fryktebjorn. Vous voulez faire bouger le père de moi, marier moi à une bête folklorique ça suffit pas. Mais toi, attends que lui apprenne que mon enfant est un monstre. Que sa descendance c’est un animal et la honte forcera lui a vouloir détruire la preuve abjecte de l’affront de moi. »

Sans même s’en apercevoir, elle avait dit ça avec rage et ferveur. Mais elle ne comprit pas la peine qu’elle lut sur le visage d’Ulrik.

« Tu penses que Vabachea est un monstre ? » demanda-t-il, prudemment.

Ishta sourit en voyant la petite boule de poils bailler à s’en décrocher la mâchoire, dévoilant trois rangées de dents pointues et aiguisées.

« Non, elle est belle et elle est adorable. Sa maman était magnifique et effrayante. Mais pas un monstre. C’est juste que… C’est pas important comment nous on voit elle, pour votre plan c’est comment mon père voit elle qui est important. »

Le silence s’installa. Il se faisait tard et les bruits du village s’étaient tus. Installés confortablement sur la peau d’ours au sol pour s’occuper plus facilement de Vabachea, Ishta, perdue dans ses pensées, contemplait le feu qui brûlait dans la fosse au centre de la pièce. Elle ne s’aperçut du malaise d’Ulrik, assis à côté d’elle, que lorsque celui-ci ouvrit la bouche pour parler.

« Et Fryktebjorn ? Tu penses que c’est un démon… Tu penses que je suis un démon ? »

La question était posée et il n’osait plus regarder la jeune femme. Elle comprit alors qu’il avait peur qu’elle n’accepte pas ce qu’il était. Quoi que cela veuille dire.

En toute honnêteté, elle n’avait pas pensé à cette problématique. Il lui paraissait aberrant que l’homme assis à côté d’elle puisse être la bête dont tout le monde parlait. Comment quelqu’un d’aussi calme et pragmatique pouvait dévorer des cœurs humains sur un champ de bataille ? Et, plus simplement, Fryktebjorn protégeait le clan depuis sa création, il n’y avait aucune chance pour qu’Ulrik ait vécu tout ce temps. Le plus plausible était qu’il ne faisait qu’incarner le protecteur du peuple, ramenant à la vie un mythe, une légende, le temps d’une guerre. Et quel meilleur moyen pour insuffler la terreur chez l’ennemie qu’une bête sanguinaire, sauvage et immortelle ?

Finalement, est-ce que ça avait une quelconque importance pour elle ? Elle n’avait jamais été aussi heureuse, elle ne s’était jamais sentie aussi libre. Et c’était principalement grâce à lui. Fryktebjorn ou Ulrik, ça ne changeait pas grand-chose à sa situation.

Elle posa sa main sur l’avant-bras du guerrier pour qu’il la regarde à nouveau, un geste devenu tellement familier.

« Démon ou pas démon… Ça rien changer pour moi. Je jamais sentie libre avant de connaitre toi. Je jamais sentie respectée ou en sécurité comme je suis avec toi. Depuis la première fois que tu as aidé moi à monter sur le dos d’Hakon. Alors que tu manges des cœurs humains sur le champ de bataille ou pas… Tant que tu es toujours toi avec moi, ça me va. »

Ulrik était frappé de stupeur.

« Qui t’as dit que je mangeais des cœurs humains ? »

Ishta éclata de rire.

« Je contente de savoir que c’est juste rumeur de l’Empire ! »

Ulrik prit un air gêné.

« Rumeur ou pas, un chant de bataille c’est... Ishta, quand je suis Fryktebjorn... »

Mais la jeune fille lui coupa la parole.

« Et si nous on laissait les explications compliquées pour autre jour ? Peut-être on peut juste être bien ? »

Ulrik l’attira tout contre lui et la serra dans ses bras. Avant qu’elle ne comprenne ce qui se passait, ses lèvres rencontrèrent celles du jeune homme. Un éclair d’excitation intense parcourut tout son corps, qui disparut aussi vite qu’il était venu alors que le chamane brisait leur contact. Sans réfléchir, elle l’attira de nouveau vers elle d’une main. Alors, sans retenu, Ulrik l’embrassa tendrement, d’un vrai baiser. De ceux auxquels elle ne pensait jamais avoir droit.

« À chaque fois, j’ai peur de te parler, lui murmura-t-il dans l’oreille. Peur de tes réactions et que tu t’éloignes de moi. Et à chaque fois tu me surprends un peu plus. Comment tu fais pour être aussi posée et sûre de toi ? »

Elle ne put retenir un éclat de rire. Lui la trouvait, elle, posée et sure d’elle ? S’il savait à quel point elle évoluait à tâtons…

Elle se réveilla le lendemain matin sous les assauts de léchouilles d’une petite glemslött affamée. Le feu n’était plus que des braises et la fraîcheur du matin la fit grelotter. Elle repoussa l’animal le temps de se souvenir d’où elle était. Le bras d’Ulrik se resserra autour de sa taille alors qu’il la ramenait contre lui. La veille, ils avaient discuté jusque tard et s’étaient endormis à même le sol, sur la peau d’ours.

Elle rougit de se savoir dans les bras du chaman et profita qu’il fallait rallumer le feu pour se lever et échapper à son étreinte. Non pas que la sensation était désagréable mais son esprit avait besoin d’intégrer tout ce qui s’était passé récemment. Ulrik grogna doucement alors qu’il la laissait partir et se rendormi. Elle se sentait toute courbaturée d’avoir passé la nuit par terre mais répondit au coup de pattes pressant de Vabachea et alla chercher une outre de lait.

Les quelques jours suivants passèrent comme dans un rêve. Le temps devenait clément de plus en plus vite, les jours s’allongeaient enfin et une petite routine s’installa entre eux. Ulrik passait la matinée avec elle et Vabachea alors qu’il consacrait ses après-midi aux patrouilles autours du village. Mais elle n’était jamais seule car un de ses guerriers venait alors passer du temps avec elle et la petite glemslött. Les réactions face à l’animal avaient été plutôt variées, Asvard et Sigvald refusaient toujours de s’approcher de l’animal alors que Knut et Askel pouvaient passer des heures à jouer avec.

Au fond, Ishta savait qu’Ulrik s’arrangeait pour que quelqu’un soit toujours avec elle, ne voulant pas la laisser seule avec la glemslött encore sauvage de peur de rentrer pour trouver une marre de sang. Durant ses heures auprès des guerriers d’Ulrik elle apprit aussi une nouvelle chose. Non seulement Holga participait aux patrouilles, mais Toumet aussi, et celle-ci prenait également part à la guerre. L’idée la stupéfia. Finn en rigola gentiment avant de lui demander :

« D’où tu crois que Toumet tient son titre de ‘Fille de l’aigle’ ? Elle est capable de tirer un homme avec précision à une trentaine de mètres en pleins champs de bataille. »

Décidément, la culture Íbúan ne cessera jamais de la surprendre. Mais si les femmes sont libres de vivre leurs vies comme elles l’entendent, rien ne les empêchait de choisir l’art de la guerre ou, dans le cas d’Holga, de la chasse. Elle eut tout de même du mal à imaginer la douce et gracieuse Toumet au milieu d’un champ de bataille.

Elle avait d’abord pensé que son temps seule avec Ulrik serait empli de malaise mais c’était tout le contraire. Son attitude toujours calme et posée calmait l’agitation interne d’Ishta qui se détendit de jour en jour.

Le seul petit moment gênant survint le premier soir après leur arrivée. Fatigués, ils décidèrent de se coucher tôt, un long silence s’installa alors qu’ils réalisaient chacun que la maison ne possédait qu’un seul lit. Ishta hésita à aller chercher sa paillasse au Hoveduren, petite comme elle était, elle n’avait pas besoin d’un grand lit. Mais aussitôt cette idée venue, elle sût qu’elle n’en voulait pas.

La nuit qu’elle avait passée dans la chaleur des bras d’Ulrik avait été bien trop confortable et elle savait que partager son lit avec lui ne l’engageait en rien d’intime. Mais elle n’eut pas le temps de le lui dire.

« Va te coucher Sjel, je vais installer une paillasse dans l’angle là-bas. »

Et il lui déposa un baiser sur le sommet de la tête, geste qu’il avait désormais pris l’habitude de faire. Sans lui laisser le temps de bouger plus, elle lui attrapa la main et l’amena dans la chambre. Et, aussi vite qu’il était apparu, l’instant de gêne avait disparu.

Mais ces jours-là n’eurent rien de reposant, bien que Vabachea ne fasse pas grand-chose d’autre que de dormir, manger et jouer, elle dut tout de même lui apprendre à ne pas mordre ou griffer en jouant, faire ses besoins dehors ou encore ne pas détruire le mobilier. Cependant la petite glemslött s’était déjà profondément attachée autant à elle qu’à Ulrik, ce qui était bien rassurant pour la suite.

Le matin du quatrième jour, Astrid se présenta à leur porte. Toujours ensommeillée, Ishta sentit Ulrik retirer le bras qui enserrait sa taille et se lever pour aller ouvrir, laissant un vide froid derrière elle. La vitesse avec laquelle elle s’était habituée à la présence de l’homme contre son dos aurait pu lui faire peur, si la sensation n’était pas si agréable. Elle n’entendit que de loin ce que disait la jeune fille à la porte.

« On a reçu une missive de la Dod Varmt, »

Son ton grave réveilla Ishta.

« La délégation arrive dans une dizaine de jours. » Continua-t-elle.

Une délégation ?

Ishta entendit la porte se fermer.

Évidemment… La fille de l’Empereur ne pouvait décemment pas se marier sans représentant de l’Empire ou de sa famille. De plus, le Roi des rois ne raterait sûrement pas une telle occasion d’épier son ennemi. Elle força les battements de son cœur à ralentir. Elle était en sécurité désormais et ce n’était certainement pas cette délégation qui remettrait ce fait en cause. Elle avait confiance en Ulrik, elle avait confiance en ses guerriers et elle avait confiance dans les valeurs des Íbúan.

Comme pour appuyer ses pensées, le chaman la prit dans ses bras. Toute à sa panique, elle ne l’avait pas entendu arriver.

« Tu t’inquiètes, Sjel ? Tu sais que ça ne change rien. Ils pourraient être un millier qu’ils ne toucheraient plus à un cheveu de ta tête. »

Ishta sourit.

« J’étais inquiète mais maintenant je aller mieux. Bientôt la Dod Varmt disparaît et je plus besoin de m’inquiéter… Pour toujours

- Comment ça elle disparaît ? »

Ishta fut prise de court par la question d’Ulrik.

« Vous voulez être en guerre contre l’Empire, non ? Vous voulez détruire la Dod Varmt, non ?

- Non, on veut un passage jusqu’aux Îles Australe pour établir une route commerciale. Les Íbúa sont enfermés par l’Empire et nous grandissons, nous avons besoin de plus de ressources. Mais on n’est pas de taille face à la Dod Varmt. »

Ishta n’en croyait pas ses oreilles, elle avait toujours cru que les Íbúa seraient la fin de l’Empire. Depuis l’instant où Knut avait ri au nez de son père dans sa propre salle du trône. L’idée qu’ils ne comptaient pas détruire l’emprise du Roi des rois sur les autres pays du continent ne lui était pas venue à l’esprit. Ulrik ne les pensait pas à la hauteur mais Ishta savait que c’était faux. Elle savait à quel point le Saam’Raji tremblait devant les guerriers du nord.

De plus, ce plan comportait une faille de taille considérable, comment les Íbúa allaient-ils défendre les terres acquises lors du prochain Storkan ? Et le problème se poserait chaque année. Tant que le Saam’Raji se tiendra entre eux et les Îles Australes, les Íbúa ne parviendront jamais à obtenir une route commerciale digne de ce nom.

Elle ne pouvait pas laisser faire ça. Elle ne pouvait pas laisser les Íbúa manquer une occasion pareil et il était hors de question que son père s’échappe alors que son empire s’éffondrais. Elle avait pris sa décision.

« Je dois agir maintenant. Je dois parler à Leif. Tout le clan devoir être là, ça c’est possible ? »

Ulrik parut inquiet mais acquiesça.

L’après midi même, Ishta reçut une convocation officielle de l’Ansatt du clan à paraître devant tous lors d’un Forsvar. C’était ce qu’elle voulait mais ça n’empêchait pas son angoisse d’augmenter. Cette discussion n’allait pas être facile et elle se ferait aux yeux de tous, mais elle savait qu’elle était nécessaire.

Ulrik était parti un peu plus tôt, sa présence étant requise sur l’estrade. C’est Olvir qui l’accompagna avec Vabachea, comme un écho de quand il l’avait soutenu jusqu’au trône de son père. Elle voyait ce jour comme le début de sa libération et trouva de bon augure que ce soit lui qui la soutienne cette fois-ci également. Même si, aujourd'hui, celui-ci était plus d'ordre morale que physique.

Elle avait craint que Vabachea ne se tienne pas ai qu’il faille lui courir après, mais la grosse boule de poil, intrigué par tout ce qui se passait, la suivie à la trace sans broncher.

Un vent de panique traversa la salle commune du Hoveduren alors qu’ils en passaient la porte. Chacun regardant le glemslött dont la hauteur atteignait désormais le coude d’Ishta. La pièce était pleine, si tout le clan n’était pas présent, il y en avait tout de même une bonne partie. Sur l’estrade, dans le fond, se trouvait Toumet, Leif, Ulrik ainsi que trois des Ansatte du clan les plus importants dont celui des Ikkelyver et celui du commerce. Les marchands étaient ceux qui voyageaient le plus d’un clan à l’autre, ils servaient donc également d’émissaires et de messagers. Parfait, ainsi cette discussion serait transmise aux autres clans.

Toumet prit la parole.

« Ishta, Pétale du Sha, Future femme de mon clan, tu as demandé à comparaître aujourd’hui devant tous pour t’adresser à mon mari, Leif, bouclier des Íbúa, Ansatt militaire de tous les clans. Je ne serai donc que témoin de votre conversation pour le bénéfice des membres du clan ne pouvant être présents, comme tu l’as souhaité.

- Merci, Toumet, fille de l’aigle, Ansatt du clan de moi. Je parle toujours mieux votre langue mais pour cette conversation je besoin de Einar, Íbúa aux milles paroles, Ikkelyver de mon clan, si lui veut bien aider moi. »

Einar s’approcha et elle s’adressa à lui dans la langue de l’Empire.

« Aujourd’hui, s’il te plait, pourrais-tu traduire ce que je dis mot à mot ? Pas de raccourcis, pas d’omissions ? Les enjeux sont importants... »

Einar acquiesça et Ishta, rassurée, allait prendre la parole mais Leif fût plus rapide.

« Ishta, es-tu venue jusqu’ici pour demander des excuses de ma part ? »

Elle s’était attendue à beaucoup de choses mais pas à ça. Les Íbúa avaient définitivement un drôle de sens de l’honneur pour qu’il s’inquiète de devoir s’excuser en public tout en l’insultant en n'utilisant pas son titre.

« Non, répondit-elle dans la langue de l’Empire, immédiatement traduite pas Einar, en omettant sciemment la formule de politesse. Si je veux des excuses de ta part ça ne concernerait en rien le reste du clan. Je suis venue te voir aujourd’hui pour te présenter le nouveau membre du clan. Vabachea, ma fille. »

Et elle désigna le glemslött, assise à côté d’elle et lançant des regards inquiets tout autour. Un murmure de stupeur traversa la salle alors que Leif ne put retenir un rire narquois.

« Voilà que vous avez été bien productif, pas encore marié que tu as déjà enfanté une descendante à Fryktebjorn ? »

Elle vit les mains d’Ulrik se contracter de colère sur son siège et ses guerriers s’agitaient. Visiblement l’irrespect du ton n’échappa à personne.

« C’est le discours que je compte tenir aux envoyés de mon père, répondit-elle, le sourire aux lèvres. Je ne m’attendais pas à ce que tu sois aussi bête qu’eux pour l’avaler sans y penser. »

Une vague de rire traversa la salle. Leif ne fut pas assez rancunier que pour s’offenser et accepta la boutade gracieusement.

« Très bien, pétale du Sha, explique-moi alors la présence de ce glemslött avant qu’il n’ait faim et ne fasse de toi qu’une bouchée. »

Nouveau rire et même Ishta se prêta au jeu, rigolant doucement avant de reprendre.

« Ce glemslött est mon cadeau pour le clan. Elle vous servira de bien des façons, tout d’abord elle va reprendre le rôle de sa mère et accompagnera tes guerriers sur les terres du clan lors de leur patrouille, jusqu’au moment où elle pourra le faire seule. Ma bêtise vous a privé de votre protecteur, mon expertise vous en apporte un autre.

- Et qui protégera mes guerriers quand ta bête décidera de les croquer pour son quatre heures ?

- Ne t’inquiètes donc pas, je serai là pour protéger tes fragiles guerriers de sa sauvagerie. »

Einar pouffa dans sa barbe et du se contenir pour ne pas rire en traduisant. Comme pour appuyer ses propos, Vabachea profita de ce moment pour glisser sa tête entre ses pattes, tentant vainement de se mordiller la queue pour soulager une quelconque démangeaison. Mais tout ce qu’elle parvint à faire fut de perdre l’équilibre et se retrouver cul par-dessus tête, finissant les quatre pattes en l’air. Elle se releva dans un mouvement aussi peu gracieux qu’adorable, on aurait pu jurer que son grognement vexé était une réponse aux rires que sa cabriole avait provoquée.

« Et si ça ne te rassure pas. Alors je te promets de l’abattre d’un éclair comme je l’ai fait avec sa mère. »

Einar n’avait pas fini sa phrase que toute l’assemblée se tût. Le ton n’était plus à la rigolade. Le visage de Leif se contracta sous la colère.

« Viens-tu de m’avouer que tu maîtrises les voies de la nature ?

- Si tu parles de magie, alors oui. Même si, je n’emploierais pas le mot « maîtrise ». J’ai découvert cette capacité ici même, alors qu’un éclair m’a appelé, me permettant ainsi de sauver la vie de l’homme que j’aime et qui se trouve être mon futur mari. »

C’est Toumet qui prit alors la parole, la surprise se lisait sur son visage mais elle n’en montra rien quand qu’elle posa sa question.

« Ishta, Pétale du Sha, Future femme de mon clan, as-tu des témoins de ce que tu avances ?

- Moi, Ulrik, parole des anciens, chercheur d’esprit de ce clan, je me trouvais sur les lieux par la grâce des Dieux et j’en suis témoin. »

Puis chacun des six guerriers d’Ulrik répéta le serment des témoins. Ishta ne sut dire si le choc qui s’affichait sur le visage de Leif venait plus de sa capacité à appeler les éclairs, de sa connaissance de l’identité de Fryktebjorn ou bien du fait que chacun de ces hommes lui ai caché la réalité de son pire cauchemar. Avant qu’il ait le temps de dire quoique ce soit, Ishta reprit la parole.

« Mais si je te dis ça maintenant, c’est principalement pour te rassurer. Je n’ai aucun moyen de contacter mon père et, quand bien même, je ne le ferais pas. Laisse-moi te raconter une histoire, Leif, bouclier des Íbúa, Ansatt militaire de tous les clans. Quand j’aurai terminé, tu pourras alors décider si oui ou non tu crois en ma sincérité. »

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