Londres - 16h35

Le transfert de Jonas Bennett et Natalia Morelli a été programmé à destination du Francis Creek Institute à Londres. Le bâtiment, long de cent-soixante-dix mètres, haut de douze étages, abrite un centre de recherche biomédicale ultramoderne. Weber y a détecté une énergie négative particulièrement intense trahissant la présence d’un ou plusieurs individus corrompus par Abaddon. Étant donné la nature de l’alerte, Tom leur en a rapidement imputé la cause.

Les Éléments doivent faire face à un phénomène sans précédent. En moins de vingt-quatre heures, un virus a décimé le tiers de la population londonienne, soit près de trois millions de personnes. La ville s'est retrouvée paralysée, aucun plan d’urgence n’étant capable de parer à une telle catastrophe. Le virus, dont les symptômes s'apparentent à ceux d'une fièvre hémorragique fulgurante, se propage à une vitesse inimaginable. Transmission aérienne probable, période d'incubation réduite à quelques heures, taux de contamination maximum, létal dans cent pour cent des cas.

Dans les rues parsemées de corps figés dans une douleur éternelle, quelques ambulances, sirènes et gyrophares en berne, circulent à la recherche d’un improbable souffle de vie. Derrière elles viennent les camions-bennes. Les survivants se confinent dans des logements devenus prisons de terreur. Impossible, pour quiconque, de pleurer ses morts. La violence de la maladie a pris la ville de plein fouet. Jonas imagine fort bien les Londoniens fauchés par le fléau, en plein milieu de leurs tâches quotidiennes. À elles seules, les conséquences pouvant en découler doublent ou triplent le nombre de victimes.

— Quelle horreur !

Jonas perçoit un sanglot dans la voix de Natalia. Malgré dix ans passés au service de l'Organisation, la trentenaire, ne s’habitue toujours pas à la vue de cadavres.

Qui pourrait lui en vouloir ? Son passé la poursuivra aussi longtemps qu’elle vivra.

En ce qui le concerne, la scène macabre qui s’étale à leurs pieds, laisse Bennett de marbre. Il est là pour un job, et s’en acquittera, quoi qu'il advienne. Il serre brièvement la main de Natalia pour la réconforter et réajuste son masque de protection respiratoire. Puis, sans un mot, tous deux se dirigent vers le cœur du bâtiment, en direction du centre de contrôle, situé quelques portes plus loin.

Suivant les instructions que Weber leur transmet à travers leur système de communication, ils longent un immense couloir en évitant le dispositif de surveillance vidéo. Leur premier objectif se situe dans un corridor secondaire, sur leur droite. Jonas se plaque au mur, lançant un regard entendu à Morelli. Elle lui répond d’un signe de tête, ferme les yeux puis libère son aura vert pâle. Celle-ci ondule, se transforme progressivement en un tourbillon éthéré, enveloppant la jeune femme jusqu’à la faire disparaître. Ainsi camouflée, elle passera inaperçue aux yeux des caméras et agents de sécurité.

***

— Bien content d’pas être British !

— Clair ! Reste à espérer que l’antidote que le patron nous a refilé est efficace.

— Y’a pas de raison que…

— Qu’est-ce qu’y a ?

— T’as pas entendu frapper à la porte ?

— T’hallucines mon vieux ! Excepté le douzième, le bâtiment est vide.

— Nan, j’t’assure, quelqu’un a toqué. Bouge pas, j’vais voir… Y’a rien… Putain ! C’est qu…

***

Jonas jubile. Les deux pauvres types n’ont pas eu le temps de réagir. D’une violente rafale, Natalia, toujours invisible, les a envoyés s’écraser contre les panneaux de contrôle, détruisant une partie du matériel et laissant les deux hommes inconscients. L’Elément Feu se précipite dans le local. D'une simple apposition des mains, sourire satisfait aux lèvres, il fait fondre les principales connexions du système, le rendant définitivement inopérant.

Nimbés de leurs auras vibrantes, Bennett et Morelli prennent le chemin du douzième étage où leur mission doit s’accomplir : éliminer la menace.