Chapitre 1

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—  Putain de bordel de merde... C'EST QUOI CE DÉLIRE ? s'écria Malia, reprenant difficilement son souffle.

—  C'était... de la magie ? La magie existe ! articula Shane, à côté d'elle.

Malia le regarda avec des yeux écarquillés. Penché en avant, la main sur le cœur, il avait l'air en aussi piteux état qu'elle. Elle se demanda si, lui aussi, il tremblait de tout son corps, mais sa vision légèrement troublée l'empêchait de voir correctement. 

— C'était peut-être... une technologie ultra développée ? tenta-t-elle de se convaincre. Peut-être qu'il avait un dispositif ou quelque chose ! N'importe quoi !

— C'était peut-être une hallucination collective ? J'ai vu ça dans un film, ils diffusaient de la drogue et...

Shane baissa les yeux vers son bras blessé. Le fouet de feu s'était enroulé autour de son bras et lui avait brulé la peau. Malia grimaça. Toute cette situation était du délire ! Pourtant, ils ne pouvaient pas nier que quelque chose de bizarre venait de se produire. Quelque chose de surnaturel.

— Ça va aller ? s'inquiéta-t-elle.

— C'est super douloureux, avoua-t-il. Mais ça devrait aller.

— Il faut qu'on te soigne !

— Tu penses qu'on peut aller à l’hôpital ? Comment on va leur expliquer ce qu'il s'est passé ?

— Il pourrait nous attendre là bas...

— Tu crois qu'il nous poursuit encore ? s'inquiéta-t-il.

Ils regardèrent autour d'eux, vérifiant qu'ils avaient bien semé leur assaillant dans leur course effrénée. Tous deux fans de séries, des dizaines de scénarios possibles pour expliquer la situation défilèrent dans leurs têtes.

— Il avait l'air déterminé à nous tuer...

Shane tentait de rassembler les bribes d'informations qu'il avait captées pendant l'attaque, mais l'homme aux pouvoirs magiques avait été peu loquace. Mais ses attaques, elles, en disaient long.

— Il y avait son fouet en feu, commença-t-il. Les trucs qu'il nous lançait... se brisaient au sol avant d'exploser, comme du verre. Et il a marmonné un truc à un moment, mais je n'ai pas compris ce qu'il a dit.

— J'ai l'impression qu'il n'essayait pas vraiment de nous tuer. Il visait le sol avec ses explosifs, j'ai failli m'en prendre un dans les pieds. S'il avait visé le torse, il aurait eu beaucoup plus de chance de nous blesser. Et avec son fouet, quand il t'a saisi le bras, c'est là qu'il a commencé à marmonner. Et après ça, il a commencé à viser les chevilles.

— Oui ! Je crois qu'il ne s'attendait pas à ce que je m'échappe aussi facilement. Alors, il a changé de...

À quelques pas de l'endroit où ils se tenaient, au milieu de la rue, une femme apparue. Rousse, musclée, quarante ans passés, son regard se posa directement sur les deux amis. Shane et Malia sursautèrent face à cette nouvelle démonstration magique. Malia fut la plus rapide à réagir, attrapant le bras de son ami pour le tirer à sa suite, tandis qu'elle prenait la fuite dans l'autre direction.

— Encore un ! cria-t-elle. Cours !

Ils avaient à peine fait quelques mètres que la femme se matérialisa de nouveau, devant eux cette fois. Ils se stoppèrent net, surpris. Malia commençais à pousser Shane pour lui intimer de repartir dans l'autre sens, lorsque la sorcière prit la parole :

— Ne fuyez pas ! C'est inutile, je pourrais vous suivre de la sorte pendant des heures. Je ne vous veux aucun mal, je le promets.

Elle leva les deux mains devant elle en signe de paix, accompagnées d'un sourire aux allures sincères. Shane resta immobile : il voulait en savoir plus. Et, après tout, elle ne les avait pas attaqués : c'était pour lui une raison suffisante pour lui accorder le bénéfice du doute.

Malia, voyant que son ami ne bougeait pas, accepta d'écouter ce que la sorcière avait à leur dire. Elle restait néanmoins attentive à chacun de ses mouvements, prête à se défendre s'il le fallait.

— Le sorcier qui vous a attaqué fait partie d'un coven dangereux. Je m'appelle Laurine, je suis venue pour vous aider à lui échapper.

Shane se détendit légèrement, soulagé que quelqu'un soit venu à leur rescousse.

— De belles paroles, mais comment savoir si vous dites la vérité ? cracha l'adolescente.

— Nous n'avons malheureusement pas le temps pour cela, vous allez devoir me faire confiance. Il risque de revenir très rapidement. S'il vous a trouvé la première fois, il vous trouvera de nouveau. Vous êtes toujours en danger ! 

Elle semblait sincère, mais si la magie existait, tout était possible. Comment discerner le vrai du faux ? Il s'en était fallu de peu pour qu'ils réussissent à échapper au premier sorcier... et Shane en était ressorti blessé !

Les questions tourbillonnaient dans leurs têtes. Mais quel autre choix avaient-ils ?

— Comment échapper au sorcier ? demanda Shane.

— Ce ne sera pas facile, il a certainement déjà identifié votre marque. Il peut la traquer à volonté. Je peux vous emmener dans un endroit où vous serez en sécurité. Là bas, nous aurons tout le temps du monde pour discuter.

— Notre marque ?

La femme sembla s'impatienter, regardant constamment autour d'elle, inquiète.

— Oui, la marque de votre magie...

— Nous n'avons pas de magie ! s'énerva Malia. Nous ne sommes pas des sorciers !

Laurine ouvrit de grands yeux, semblant comprendre. Elle allait ajouter quelque chose, mais un mouvement dans son dos attira l’attention des deux amis. Malia, apercevant un projectile se diriger vers la sorcière, l'attrapa par le bras et tira si fort vers elle qu'elle lui tomba dessus. Une explosion, de la taille des précédentes, laissa une trace noire sur le goudron.

— Le sorcier ! s'écria Shane, le seul encore debout.

Celui-ci se tenait maintenant à quelques mètres d'eux, son fouet enflammé toujours en main. Il jeta un regard énervé sur la sorcière, avant de lui lancer un nouveau projectile. Celle-ci se concentra un instant et dévia l'attaque, qui prit alors la direction de l'agresseur. Il l'esquiva avec difficulté, et l'objet s'explosa au sol quelques mètres plus loin.

La sorcière se releva rapidement, et avant que le sorcier n'ait eu le temps de l'atteindre avec son fouet, saisit les bras des deux adolescents. L’instant d'après, le décor autour d'eux changea. Ils avaient quitté la rue pour se retrouver à l'intérieur d'un bâtiment inconnu.

Le changement rendit Malia en proie aux vertiges et nauséeuse, et elle dû se tenir au mur pour ne pas tomber.

— Je suis désolée. La téléportation peut rendre un peu malade les premières fois... mais c'est parfaitement bénin ! Tu vas vite aller mieux.

Elle se mordit la lèvre. Shane, amusé et en pleine forme, s'approcha de Malia et lui posa une main réconfortante dans le dos.

— On est où ? demanda-t-il.

— À l'Académie des Arts Magiques ! s’enthousiasma la sorcière.

— C'est une école de magie ? s'étonna Shane, la voix pleine d'espoir.

Elle hocha la tête, amusée. Soudain surexcité, Shane se mit à regarder attentivement tout autour de lui, des étoiles dans les yeux. Malia, qui commençait déjà à se sentir mieux, l'imita. Eux qui étaient de grands fans de fantasy, l’existence même d'une école de magie représentait l'incarnation de tous leurs rêves.

Ils se trouvaient dans ce qui ressemblait à un hall d'accueil : la salle était grande, avec un haut plafond. Ils faisaient face à un comptoir sur lequel reposaient quelques feuilles. De chaque côté du comptoir commençait un couloir, mais de là où ils se trouvaient, ils ne pouvaient pas voir où ils menaient. Shane se retourna et fut surpris de ne pas voir de porte d'entrée. À la place, un long mur s'imposa à lui, sur lequel de nombreuses affiches étaient accrochées. Plusieurs élèves discutaient gaiment sans qu'il puisse distinguer le sujet de leur conversation.

Malia voulu montrer quelque chose à son ami, mais lorsqu'elle tenta de lui saisir le bras, celui-ci grogna de douleur. Laurine posa les yeux sur sa blessure, surprise.

— Oh ! Je n'avais pas vu que tu étais blessé ! s'exclama-t-elle. Montre-moi ça.

Shane tendit la main vers elle, incertain, mais beaucoup trop curieux pour s'en empêcher. Elle saisit alors délicatement son poignet et souffla :

— Qu'importe la nature de ta blessure, de l'égratignure à la belle coupure, toutes disparaissent avec un murmure...

En quelques secondes, la peau de l'adolescent se régénéra complètement, si bien qu'il ne restât pas la moindre trace de la brulure. Malia se mit à rire, fascinée, bientôt rejointe par son ami.

— C'est trop cool, murmura le garçon, émerveillé.

— La magie a de bons côtés, s'amusa-t-elle. Vous aussi en êtes capables, vous savez.

— Tout ceci est une grosse erreur : nous ne sommes pas des sorciers... déplora Malia.

— Vous en êtes, même si vous n'en avez pas conscience. C'est un cas très rare, mais possible. Vos pouvoirs ont probablement été bloqués pendant votre enfance, c'est pourquoi vous ne pouvez pas les utiliser. Mais ils sont toujours en vous, sinon le sorcier ne vous aurait pas attaqué.

C'était un choc pour les deux adolescents. Ils se regardèrent avec curiosité, encore incrédules. Malia fixa ensuite ses mains, comme si elle s'attendait à voir quelque chose en jaillir.

— Mais vous n'avez plus à vous inquiéter : l'académie est protégée, personne ne peut y entrer sans autorisation.

— Mais dès qu'on voudra sortir, le sorcier nous tombera dessus... devina Shane.

— Ne vous inquiétez pas pour lui : je m'en occupe.

— Je ne crois pas ! affirma Malia avec virulence. Personne ne s'attaque à moi et à mon meilleur ami, personne. C'est à nous de lui régler son compte !

Déterminée, l'adolescente faisait face à la sorcière, prête à défendre son choix, quoi qu'il en coute. Malia, avec son sang chaud et sa haine pour les injustices, avait l'habitude de se battre. Elle s'était régulièrement retrouvée dans le bureau de la proviseure, et avait  manqué d'être renvoyée une fois. Mais Shane était bien vu par ses professeurs, et il arrivait toujours à la sortir d'affaires. Ou en tout cas, à réduire sa punition.

— C'est trop dangereux. Ce n'est pas un sorcier très puissant, mais tant que vous ne maitrisez pas votre magie, vous êtes vulnérables. Ici, vous avez la possibilité d'apprendre en sécurité, avec toute l'aide dont vous aurez besoin.

— C'est moi qui vais tuer cet enfoiré, et personne d'autre, contra-t-elle avec obstination.

Shane lui jeta un regard courroucé, et elle comprit qu'elle devait baisser d'un ton. Elle leva les yeux au ciel et reprit :

— Alors, s'il vous plait, apprenez-nous à contrôler notre magie. Donnez-nous toutes les clés pour réussir, et laissez-nous chasser le sorcier. Je refuse de vivre dans la peur !

— On veut tout savoir sur la magie ! ajouta Shane avec enthousiasme.

Il attrapa le bras de son amie et fit un grand sourire. Par le passé, ils s'étaient imaginé mille scénarios où la magie existait, mais il y avait un fossé immense entre rêver de magie, et le vivre pour de vrai. Ils en avaient conscience tous les deux. Pourtant, cela ne les empêchait pas de s'imaginer parfaitement à leur aise dans ce monde.

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