Nous avions roulé pendant ce qui me sembla être des heures avant d'arriver à un petit village. La voiture finit par s'engager dans une des rues qui descendait vers un bois et alors que je ne m'y attendais pas, elle prit un chemin fait de terre et de bosses qui ne devait pas être fait pour ce genre de véhicules. Au bout d'un moment, nous arrivâmes devant un énorme portail qui s'ouvrit automatiquement après que le conducteur ait tapé un code sur une petite machine se trouvant sur le côté. Pendant que la voiture passait l'entrée et que je voyais le portail se refermer derrière nous, j'eus la douloureuse impression que j'entrais dans une prison, même si ce qui se présentait à mes yeux n'y ressemblait absolument pas !

Une très grande cour remplie d'hommes armés faisait face à un perron qui surplombait plusieurs marches. Celles-ci menaient à une gigantesque et majestueuse maison blanche dont l'architecture rappelait un peu les maisons typiques des Etats-Unis à l'époque de la guerre de Sécession avec ses colonnes sur le devant. Cependant, le toit était plat et je pus remarquer que s'y trouvaient postés des hommes occupés à surveiller les alentours.

La vie de cet Hayato était en danger avec Bowman, il n'était donc guère étonnant qu'il soit aussi bien protégé. La conséquence qui me sautait aux yeux, était que jamais je ne pourrai me sauver d'ici... Mon cœur s'emballa en y pensant.

Qu'allait-il faire de de Marcos et de moi ? Je le serrai un peu plus fort, posant ma tête contre la sienne dans un geste de réconfort. Je ne vis pas le regard de cet homme qui nous observait, étonné de voir autant de tendresse. Après tout, qui connaissait-il ? La vie n'avait pas été douce avec lui et c'était sans doute ce qu'il se dit en baissant les yeux, pensif, sur sa main à laquelle deux doigts manquaient.

Lorsque la voiture s'arrêta devant les marches, cet homme se leva, en fit le tour et vint m'ouvrir la portière mais je ne voulais pas sortir. J'avais l'impression que cette voiture était le dernier rempart contre lui, la frontière qu'il ne fallait pas dépasser et qu'une fois que je la franchirai, ma vie telle que je la connaissais, serait terminée. Je l'entendis soupirer. Il m'attrapa alors fermement le bras mais sans violence et me tira doucement vers lui sans prononcer un seul mot, sa chemise toujours nonchalamment ouverte sur son torse tatoué. Il avait tout de même remis sa veste car après tout, nous approchions des fêtes et il faisait si frais dehors !

Je me laissai guidé avec mon chien jusqu'à la grande maison en ayant cette impression d'être conduit dans le couloir de la mort. Ma vie allait-elle se finir ici ? Je n'avais même pas dit « au revoir » à mes parents ni à quel point je les aimais... Des larmes se mirent à couler sur mes joues sans que je ne m'en rende vraiment compte. Je le compris lorsque cet homme s'arrêta dans le hall et m'essuya le visage de sa main.

-Pas de larmes, m'ordonna-t-il.

Sur ces mots, il m'attrapa de nouveau le bras et me guida jusqu'à un énorme escalier trônant au milieu du vaste hall dont nous venions de passer l'entrée. Les larmes plein les yeux, je ne prêtai pas attention à ce qui m'entourait, ne pouvant de toute manière, pas distinguer grand-chose et je me laissai entraîné à l'étage avec Marcos, je tenais toujours sa laisse. Nous arrivâmes devant une porte en bois qu'il fit coulisser, laissant apparaître une très grande chambre au lit double à baldaquin. Frottant mes yeux, je pus mieux la distinguer.

Il s'agissait d'une chambre basique mais pour personne aisée, la décoration et les meubles présents en attestaient. Je ne savais pas pourquoi mais la forme des meubles me rappela mon Disney préféré, « La Belle et la Bête ». Peut-être mon cerveau m'envoyait-il une pensée réconfortante pour ne pas paniquer ? Je lui en étais reconnaissant car j'avais bizarrement sur le moment, moins peur de me trouver en ce lieu. Et puis, j'y trouvais étrangement une cohérence avec ma situation. J'étais comme Belle, prisonnier d'un monstre qui paraissait être sans cœur, incapable d'éprouver de la compassion. Mais comme dans le dessin animé, n'était-ce qu'une façade ?

Tout à mes réflexions, je continuais de détailler ce qui se trouvait autour de moi. Malgré ce genre de meubles, je pus remarquer que la décoration était complètement différente. Elle était plutôt dans un style japonais. De belles calligraphies sur tissus se trouvaient accrochées au mur mais ce qui attira particulièrement mon attention, fut de jolies petites poupées posées sur un meuble qui représentaient des femmes coiffées et habillées de manière traditionnelle. Sans réfléchir, intrigué, je m'approchai et en pris une dans ma main.

-Elle représente une joueuse de shakuachi et celle juste à côté, représente une servante. Elles viennent de ma mère, commença à mon grand étonnement, cet homme. Si elle avait eu une fille, elle les lui aurait transmis. En me les offrant, elle espère qu'un jour, je lui donne une petite-fille malgré ma sexualité. Après tout, elle n'a peut-être pas tort. Avec mon argent et mes relations, je pourrais facilement adopter ou même pourquoi pas, faire appel à une mère porteuse... Veux-tu connaître leur signification ?

Je ne répondis pas. J'étais incapable de parler mais suite à ses paroles, j'avais posé mon regard sur lui et ça dut lui suffire puisqu'il reprit son explication.

-Tous les ans au Japon, une fête se nommant "Hina matsuri" est célébrée en l'honneur des petites filles. Pendant quelques jours, avant cette fête, les petites filles exposent leurs poupées qui représentent des personnages de la cour impériale de l'ère Heian sur des petites estrades à plusieurs niveaux. Normalement, le reste de l'année, ces petites poupées sont rangées à l'abri des regards mais personnellement, je trouve cela plutôt triste. Je préfère les avoir sous les yeux plus que quelques jours par an.

Je ne savais que dire... J'avais l'impression que... je trouvais ce mec intéressant ! Merde... Mon traumatisme devait être plus profond que je ne le soupçonnais...

-Tu ne dis toujours rien ? Comme tu voudras. Je te laisse te reposer. J'ai des affaires à régler. Je passerai te voir tout à l'heure. Pense à enlever la muselière à ton chien. Je n'aime pas que l'on bride les animaux.

Je le vis se diriger vers la sortie et il me laissa, non sans avoir pris soin de fermer la porte à clé. Mais pour qui est-ce qu'il se prenait pour me dire comment je devais me comporter avec mon Marcos ?!! Je n'y pouvais rien si le port d'une muselière était obligatoire ! Moi au moins, je respectais la loi ! Exaspéré, je soupirai et me tournai vers mon toutou qui avait toujours l'air un peu perdu.

-Viens, mon chien !

Il vint jusqu'à moi et je lui retirai la muselière, la laisse et le harnais. Je le gratifiai ensuite de plusieurs caresses bien méritées. Comment j'allais nous sortir de cette situation ? Est-ce que ce connard de Bowman allait me chercher ? Cette question me fit me souvenir de ce qu'avait dit cet Hayato Morand : « Comme je m'en doutais, Bowman s'est servi de toi comme appât pour m'attraper. ». Qu'est-ce que ça voulait dire ? Qu'il m'avait mis sous surveillance, lui aussi ? Voilà un point commun avec son ennemi ! Génial… Il avait donc attendu qu'Hayato vienne me kidnapper et sans rien me dire ?!

Joshua ne devait pas être au courant ! Mon meilleur ami n'aurait jamais accepté que l'on me mette en danger ! Il aurait fait en sorte que je sois protégé ! Quel connard de Bowman ! Putain ! Ce mec savait que son ennemi reviendrait sûrement et il ne m'avait rien dit ! Si j'avais su, j'aurais pris plus de précautions comme de ne pas sortir promener mon chien, par exemple ! Surtout seul, le soir !

Soudainement, toutes mes émotions me mirent chaos... Je me sentais si épuisé ! Oui, si fatigué que le lit qui trônait dans cette pièce me tentait terriblement. Alors, sans chercher à réfléchir, -j'avais la tête trop pleine de questions, de colère, de réflexions, j'avais besoin de me reposer et de ne plus penser-, je retirai mon manteau, mes chaussures, mon sweat sous lequel je portais un t-shirt que je gardai et je partis m'installer dans le lit. Une fois bien placé sous la couverture, j'appelai Marcos pour qu'il vienne s'installer contre moi, dans mes bras et malgré les circonstances, je ne tardai pas à sombrer dans un profond sommeil...

**

Trop chaud... Emergeant doucement, je voulus me mettre sur le dos mais je me rendis compte que j'étais entravé par quelqu'un se trouvant derrière moi... Tout me revint en mémoire d'un seul coup et j'ouvris les yeux ! Merde ! J'étais toujours chez ce psychopathe ! Ce n'était pas un cauchemar... J'en gémis de dépit en enfonçant ma tête dans mon oreiller.

-Je vois qu'on est réveillé... me dit cet homme en serrant encore plus ses bras autour de moi. Bonjour, mon joli petit chiot.

J'étais plus figé qu'une statue. A quel moment était-il venu me rejoindre dans le lit ?! Je ne l'avais même pas senti !

-Et là, est-ce qu'on est réveillé aussi ? demanda-t-il en glissant sa main sur mon entrejambe.

Sur le moment, j'en sursautai. Il me tourna alors sur le dos et me surplomba. Ses lèvres vinrent fougueusement capturer les miennes avant de descendre dans mon cou. Ses mains n'étaient pas en reste puisqu'elles parcoururent rapidement mon corps jusqu'à s'arrêter sur mon jean qu'elles ouvrirent. J'étais totalement tétanisé. Qu'est-ce qui m'arrivait ?

Avec frayeur, je vis sa tête descendre dangereusement sur mon corps pour ne s'arrêter que sur mon sous-vêtement mis à découvert. Sa bouche dont je sentis la chaleur qui me parut bouillante en cet instant, commença à suivre la forme de mon sexe à travers le tissu. J'avais si peur que je n'arrivais pas à me concentrer sur les sensations qui dans un autre moment, auraient pu être agréables.

Je venais à peine de me réveiller pour découvrir que j'étais en plein cauchemar, que ce tordu me sautait dessus ! La colère refit enfin surface et je retrouvai l'usage de mon corps. Je regardai vite ce qui se trouvait à portée de main sur le meuble de chevet. Une lampe ! Ça fera l'affaire ! D'un mouvement vif, je l'attrapai et la fracassai sur sa tête. Il s'effondra sur le côté en gémissant de douleur. J'en profitai pour sortir du lit et courir vers la porte.

-Non...

La porte était verrouillée... Non... Attends ! Réfléchis! IL DEVAIT AVOIR LA CLÉ SUR LUI !

J'étais sur le point de me tourner pour aller fouiller ses poches tant qu'il était assommé et donc inoffensif, lorsque je fus brutalement attrapé par le col et projeté dans les airs pour atterrir contre un mur. Ma tête cogna assez durement pour que je me sente un peu parti, tout me tourna sur le moment.

-Ta fougue est réellement revenue, petit chiot ! Qu'est-ce que tu croyais faire ? demanda-t-il d'une voix pleine de colère.

Il était effrayant... Et si imposant ! Je le vis amener sa main sur son front qui saignait et la regarder. Il partit alors dans un éclat de rire que je ne comprenais pas. Ma situation me paraissait complètement dingue ! Qui y avait-il de drôle ?!

-Généralement, je ne suis pas contre un peu de douleur, le plaisir n'en est que plus grand mais là, dès le matin, on peut dire que tu as fait fort...

Son visage se durcit et il s'avança vers moi. Je fus soulevé sans douceur, si haut que mes pieds touchèrent à peine le sol. Ce cinglé possédait vraiment une force Herculéenne ! Son visage s'approcha ensuite du mien jusqu'à n'être plus qu'à quelques centimètres. Ses yeux bridés et sombres brillaient d'une telle colère... Mais pas seulement. Je pouvais toujours y percevoir sa pointe d'amusement habituel. Tout n'était-il qu'un jeu pour lui ?

-Tu es vraiment très distrayant. Cependant, il va falloir que je te montre où se trouve ta place, désormais. Je pensais te laisser quelques jours pour t'habituer à moi mais apparemment, tu as déjà besoin d'avoir ta première leçon. Il est temps que je te montre ma pièce préférée de cette demeure, me dit-il dans un sourire malsain. Oui... Il est temps que je commence ton dressage, petit chiot...