Lina était assise dans la pénombre de son appartement, les volets tirés pour masquer la lumière du matin. Devant elle, l'écran de son ordinateur affichait des lignes de données brouillées, un amas d'information cryptées qu'elle avait arrachées aux serveurs de l'Agence avant que son accès ne soit restreint. Sa respiration était courte, ses mains tremblaient légèrement. Chaque coup d'oeil vers la fenêtre lui donnait l'impression d'être épiée, comme si le monde extérieur était devenu un ennemi silencieux.

Elle passa une main dans ses cheveux décoiffés, son regard se fixant sur la chaîne de caractère apparue sur son écran. Cela faisait des heures qu'elle essayait de recouper des informations qu'elle avait accueillis, mais tout semblait délibérément obscur. Cependant, un nom revenait avec une régularité troublante : Elian. Celui qu'elle avait vu brièvement dans ces documents interdits, ce garçon né un 18 août, un évènement supposé impossible. Le poids de cette anomalie la hantait. Elle savait que poser davantage de questions risquait de la placer dans une situation encore plus précaire, mais l'idée d'abandonner la vérité était inssuportable.

Un bruit sourd venant de l'immeuble la fit sursauter. Elle se leva d'un bond, ses pieds nus frottant contre le parquet. Elle se glissa jusqu'à la fenêtre et jete un regard prudent à travers une ouverture dans les volets. Rien de suspect, juste un voisin qui montait les escaliers avec une caisse sous le bras. Son rythme cardiaque ralentit, mais une part d'elle restait tendue.

Ils savent que je sais.

Cette pensée revenait sans cesse, même si elle n'avait encore reçu aucune menace directe. Ses supérieurs étaient passés maîtres dans l'art de manipuler et de faire pression. Elle ne doutait pas que des yeux étaient posés sur elle, même dans cet appartement anonyme au milieu de la ville. Pourtant, malgré la peur, une détermination froide était née en elle. Je doit trouver Elian.

Lina alluma son téléphone, évitant soigneusement d'utiliser ses comptes personnels ou ses applications habituels. Elle avait créé une identité numérique alternative pour fouiller dans les archives en ligne, à l'abris des regards. Le nom de l'Agence était introuvable dans les bases publiques, mais elle savait que des anciens employés, des dissidents ou même des activistes pourraient avoir des pistes. Elle parcourut des forums obscurs, des espaces numériques où le language codé était la norme. Là, un nom apparut : Dmitri, un informateur connu pour son aptitude à déterrer des secrets enterrés par les plus grandes organisations.

Elle prit une profonde inspiration avant d'envoyer un message crypté. Quelques minutes plus tard, une réponse apparut : un lieu, une heure. Aucun détail supplémentaire. Dmitri était connu pour être prudent, et Lina comprenait pourquoi. S'aventurer sur ce terrain était risqué, mais elle était prête à tout.

Pendant ce temps, dans un bâtiment aux vitres teintées, le directeur de l'Agence était plongé dans une réunion tendue avec ses supérieurs. Sur la table devant lui, des dossiers, des rapports et des images satellite. Une carte déroulée au centre montrait une zone reculée, encerclée d'un marqueur rouge.

• Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre le contrôle de la situation, dit-il la voix basse mais autoritaire, une patrouille a été envoyée. Ils retrouveront le garçon.

Un silence pesant répondit à ses paroles. Les supérieurs partagés entre l'urgence d'agir et la peur des conséquences si cette affaire était dévoilée au grand jour. Le directeur continua, impassible :

• Quant à Lina, elle sera surveillée. Si elle devient une menace, nous prendront les mesures nécessaires.

Un des hommes autour de la table hocha la tête.

• Nous devons éviter les erreurs. Ce garçon ne doit jamais atteindre le monde extérieur.

Lina entra dans le café désigné par Dmitri. C'était un endroit discret, peu fréquenté, parfait pour une rencontre clandestine. Assise à une table du fond, elle attendit en observant chaque clients qui passaient la porte. Enfin, un homme à la silhouette trapue, portant une casquette et des lunettes teintées, s'approcha d'elle.

• Dmitri ? demanda-t-elle, voix basse.

L'homme s'assit sans répondre, sortant un petit appareil de brouillage qu'il posa sur la table. Une fois activé, il la regarda enfin.

• Vous avez l'argent ? dit-il sans préambule.

Lina hocha la tête et posa une enveloppe devant lui. Dmitri la prit, la pesa dans sa main puis l'ouvrit pour vérifier le contenu. Apparement satisfait, il sortit une clé USB de sa poche.

• Ce que vous cherchez est là-dedans, mais faites attention, ces informations pourraient bien signer votre arrêt de mort.

Lina sentit une sueur froide lui glisser le long du dos. Elle prit la clé USB, la serra dans sa main et sortit rapidement du café. Elle avait maintenant une piste, une vérité à découvrir. Mais elle savait que chaque pas qu'elle faisait la rapprochait d'un danger qu'elle ne pouvait plus ignorer.