— Bien, nous allons donc procéder aux premières injections.

                Harold était maintenu sur le flanc par des infirmiers tandis que le docteur Allit, un plateau de seringues à ses côtés, lui désinfectait le sommet du dos.

— Je vais injecter les cinq doses dans votre moelle épinière, juste en dessous de la zone endommagée.

                L’infirme ironisa.

— Vous pouvez y aller, je ne sentirais rien.

                Levant les yeux, la scientifique répondit.

— Je ne peux pas vous le garantir. Il semblerait que le processus soit douloureux, surtout quand le système nerveux recommence à communiquer.

— Chouette… Piquez-moi, qu’on en finisse…

                Il planta son regard dans celui de Huit tandis qu’Allit lui en faisait de même avec la première seringue, et l’infirmière lui sourit.

— Premier pas vers la résurrection.

— Je croiserais bien les doigts, mais je ne les sens pas…

                Le sourire de Huit s’effaça tandis qu’elle haussait un sourcil.

— Vous êtes toujours aussi sarcastique ?

— Non, ça s’est développé avec l’infirmité. Vous savez, comme les aveugles dont les autres sens se développent pour compenser leur infirmité.

— Vous avez de la chance d’être notre patient, sinon je crois que je vous mettrais une tape derrière la tête.

                Harold rigola.

— Celle-là, au moins, je la sentirais.

— Surtout que j’y mettrais tout mon cœur.

                Allit intervint.

— Si nous vous dérangeons, vous le dites. Infirmière Palia, ce n’est pas un salon de thé ici, et je vous demanderais de ne roucouler avec les patients qu’en dehors de vos heures de service.

                Harold répondit avant l’infirmière.

— On ne roucoule pas, Doc. Elle me réconforte juste en me changeant les idées.

                Sans quitter Huit des yeux, mais l’air subitement très sérieux, il reprit.

— N’est-ce pas que nous ne roucoulons pas ?

                Souriante, celle-ci répondit.

— Désolé, vous n’êtes pas mon genre d’homme.

                Harold rigola avant de reprendre.

— Aïe ! Ça, ça fait plus mal que toutes les injections du monde.

                Un bruit métallique se fit entendre et la scientifique se redressa tandis que les infirmiers remettaient Harold sur le dos. Retirant ses gants, elle expliqua.

— Bien, dans les heures qui suivent, il se peut que vous ressentiez une forme de chaleur dans le cou. C’est le signe que les injections commencent à faire effet.

— Super. Et si je ne sens rien ?

                Joséphine fit une petite moue.

— Ça signifierait vraisemblablement que vous n’êtes pas compatible, mais sincèrement, j’en doute. Nous n’avons encore jamais eu de patient chez qui ça n’ait fonctionné.

— OK, et je suis le combientième pour que vous soyez aussi sûre de vous ?

                La scientifique sourit.

— Le soixante-dix-septième. On vous surnomme Double Sept.

— Cool, je n’ai jamais eu de surnom avant…

                Allit ne releva pas le sarcasme et reprit.

— Peu après la sensation de chaleur risque d’arriver la douleur. Si tel était le cas, prévenez-nous que nous vous injections de la morphine. Ça ralentit le processus, mais au moins vous ne souffrirez plus.

— Oui madame…

                La femme le fusilla du regard avant de conclure.

— Bien, alors je vais vous laisser en compagnie de votre mauvaise humeur et je vous dis à demain, pour l’évaluation de l’évolution et la seconde série d’injection.

— Oh, je n’ai pas le droit à une histoire et un bisou de bonne nuit maman ?

                Allit croisa les bras sur son torse en se retenant de hausser le ton.

— Sachez que votre comportement m’insupporte au plus haut point. Bonne soirée.

                               Sans un mot de plus elle tourna les talons pour quitter la pièce d’un pas déterminé alors que les infirmiers et Harold rigolaient. Huit se tourna alors vers lui.

— Nous, en tout cas, ça nous fait bien rire.

— Tant mieux alors, parce que je n’ai pas prévu de changer pour l’instant.

                Le personnel médical commença à quitter la chambre quand Huit s’arrêta.

— Je finis mon service d’ici une heure, vous voudrez un peu de compagnie ?

                Harold sourit.

— Ce ne serait pas de refus, le temps semble long quand on est tout seul.

— Bien alors à tout à l’heure.

                La jeune femme quitta la chambre en refermant la porte tandis qu’Harold demandait à la table de lui lancer un film. Quelques minutes plus tard, il sentit une douce chaleur parcourir sa nuque, vite suivie d’une forte démangeaison.