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                L’homme apparut une fois de plus.

                — Bonjour, mon frère, comment te sens-tu ? Pas trop frustré ? Je rigole, je sais bien que si, on est tellement connectés que je le ressens pleinement. J’avoue qu’elle est canon, la belette ! Elle a un cul, je jouerais bien du tambour dessus !

                Harold peina à s’exprimer.

— Qui… Qui êtes-vous ?

                L’homme ouvrit de grands yeux surpris.

— Tu arrives déjà à communiquer ? L’extra cortex s’est développé super vite, c’est encourageant. Je vais te répondre. Je m’appelle Ahmed Saïd. Mais ici, on m’appelle le Patient Zéro, ou encore Double Zéro. Je t’envie, tu sais.

— Pourquoi ?

                L’homme afficha un sourire triste.

— Tu es en charmante compagnie, personne ne te traite comme un monstre, et tu ne sembles pas avoir de mutations autres que l’extra cortex. Oh, rassure-toi, pas extra dans le sens de « en dehors de », ton cerveau ne va pas te sortir par les oreilles. Extra dans le sens de « en plus de ». C’est par lui que nous sommes liés, toi, moi, et tous les autres sujets avant toi. Enfin, tous sauf ta copine. Va savoir pourquoi, l’Esprit Unique ne parvient pas à la toucher… mais je la toucherais volontiers autrement.

— Je… Je ne comprends rien à ce que vous dites…

                Ahmed se mit à rire avant de répondre.

— OK, alors tu as deux solutions maintenant. Soit tu ne parles de moi à personne et tu vois comment ça évolue, soit tu parles de moi à Allit et N’Guyen, et tu regardes bien attentivement la tronche qu’ils tirent. Mais, juste comme ça, essaie de te rappeler de la réaction de ta mignonne quand tu lui as demandé s’il pouvait y avoir des effets secondaires. Crois-moi, ici, il y a un sacré lot de professeurs Frankenstein.

— Pourquoi… Pourquoi vous me dites ça ?

— Quand tu auras compris ce qui t’attend, j’ai bon espoir que tu te rebelles et que tu nous libères.

— Vous libérer de quoi ?

— Bah, de nos cellules pardi. Parce que oui, on est prisonniers, dernier sous-sol, troisième couloir à droite, le code d’accès, c’est quarante-deux trente-huit. Moi, c’est la cellule du fond. Passe quand tu veux, je t’offrirais un café, mon frère.

— Je… je ne suis pas votre frère !

                L’homme sourit.

— Si, mais tu ne le sais pas encore…

                Une fois de plus, il disparut dans le néant.

                Harold se réveilla lentement, l’esprit préoccupé et quelque chose lui chatouillant le nez, et quand enfin il ouvrit les yeux il comprit vite de quoi il s’agissait. Dans son sommeil, Michelle s’était retournée et il avant le visage enfoui dans ses cheveux. Alors qu’il extirpait son visage de la masse capillaire, quelqu’un frappa à la porte. Il s’extirpa de son lit en grognant qu’il détestait être dérangé avant d’avoir bu son premier café et ouvrit la porte en se passant une main dans les cheveux pour faire face au professeur Allit.

— Bonjour Sergent, avez-vous bien dormi ?

                Baillant à s’en décrocher la mâchoire, celui-ci répondit.

— C’est déjà l’heure de la séance de tortures ?

— Dans une demi-heure. Je venais m’assurer que vous étiez bien réveillé, et j’ai visiblement bien avisée. Aurez-vous besoin qu’on vous guide ?

                Lançant un petit regard vers son canapé, se demandant s’il devait réveiller son ami pour qu’elle l’emmène, il se reprit.

— Oui, je veux bien. Laissez-moi un quart d’heure, et je serais prêt.

— Bien. Puis-je entrer en attendant ?

— Non !

                Devant le visage surpris de la scientifique, il s’empressa d’ajouter.

— Je viens de lâcher un gaz phénoménal, ça pue le fennec crevé.

— Oh… Bien, je vous remercie de m’avoir prévenu, c’est délicat, bien que très imagé…

— De rien. Bon, je vous laisse, je dois me raser et m’habiller !

                Il claqua la porte derrière lui avant de s’enfermer dabs la salle de bain pour se raser et se changer avant de sortir et de s’immobiliser en trouvant Allit et Michelle face à face, la première portant un masque de rage sur le visage, la seconde souriante, tranquillement assise sur le lit.

— Bien, voilà qui promet… Je peux savoir pourquoi vous êtes rentrée ?

                Allit le fusilla du regard avant de répondre d’un ton glacial.

— Au bout de cinq minutes, je me suis dit que l’odeur de « fennec crevé » avait dû se dissiper, et en effet, je n’ai senti ici que le stupre et la luxure.

                Michelle ricana tandis qu’Harold s’avançait vers la scientifique.

— D’un autre côté, vous n’aviez qu’à respecter mon intimité.

— Oh, mais vous êtes libre de partager votre intimité avec qui bon vous semble, même si c’est avec cette petite ga…

— Tue-la !

                Allit ne put finir sa phrase, Harold venait de la saisir par la gorge en la soulevant, mais ce qui terrifia la scientifique ne fut pas la posture dans laquelle elle se trouvait, mais le visage haineux aux yeux à la pupille réduite à sa plus fine expression qui la dévisageaient.

— Tue-la !

— Je dois vous prévenir que si vous ne finissez pas votre phrase par un mot comme gamine, gallinette ou encore gazelle, je vous brise le cou.

— TUE-LA !

                Harold luttait de toutes ses forces contre cette pulsion assassine qui l’habitait quand Michelle cria.

— Arrête ! Harold, je t’en conjure, arrête !

— TUE-LA !

— NON !

                Dans un suprême effort, il desserra le poing avant de se reculer de quelques pas tandis que ses yeux reprenaient une allure normale et qu’il portait les mains à ses tempes, en proie à une vive migraine. Michelle courut à ses côtés alors qu’il tombait à genoux, terrassé par la douleur, tandis que de son côté, Allit se relevait lentement en observant son sujet.

— Soixante-Dix-Sept, que s’est-il passé ?

                Harold leva lentement les yeux vers la scientifique.

— Il m’a parlé, et ce n’est pas la première fois…

                Allit fronça les sourcils, soucieuse.

— Qui ?

— Ahmed Saïd.

                Allit se raidit brièvement, mais cela n’échappa pas à son patient qui reprit.

— Il m’avait prévenu que vous réagiriez…

                Il se releva lentement en s’appuyant sur Michelle.

— Il faut m’en dire plus, Doc. Sinon, je ne me montrerais plus très coopératif.

— Comme si vous aviez le choix.

                Un sourire narquois étira le visage du militaire.

— Oui, et vous le savez.

                Il y eut un flottement puis la scientifique soupira.

— Que voulez-vous savoir ?

— Tout. Qu’est-ce qu’il est arrivé aux précédents patients ? Que va-t-il m’arriver ? Pourquoi il peut me parler pendant mes rêves ? Qu’est-ce que l’Esprit Unique ? Et probablement d’autres questions qui ne me sont pas encore venues à l’esprit…

                Allit fronça les sourcils avant de se saisir de son téléphone portable et l’apporter à son oreille.

— Professeur Dupont ? Prévenez le Colonel s’il vous plaît, il s’est éveillé. Je vous remercie.

                Elle rangea son téléphone avant de dévisager Michelle et Harold.

— Venez avec moi. Tous les deux.

                Sans un mot de plus, elle quitta la chambre alors qu’Harold demandait.

— Donc j’échappe à la séance de torture ?

                Michelle lui mit une tape derrière la tête en le dépassant.

— Cesses de faire l’idiot, tu veux bien ?

                Le patient grogna avant d’emboîter le pas aux deux femmes.

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