Chapitre 1 : L'échiquier des Grands

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Dommage. J’espérais qu'on me recouvre d'un linceul d'étoiles, au jour de ma mort. J'entends le grognement de dix mille soldats ennemis qui m'assiègent. Dois-je m'éteindre encerclé comme un chien ? Le vieux clébard terrassé que je suis lèche le sol boueux, restreint par des chaînes de peur et de doutes. Je baisse les yeux. Voilà ce que fait un soldat. Il court sur une ligne bleutée qui se tisse à chaque pas, de sorte à ce qu'il ne voit jamais la direction qu'on lui fait prendre. Alors il imagine cette voie par l'intermédiaire de ses désirs et de ses rêves. Puis, lorsque les forces supérieures n'ont plus prévu de fil à tisser, le guerrier est démembré par un canon, asphyxié, noyé, décapité, mangé, écrasé, sacrifié. Mourir, c'est ce que font les pions sur l'échiquier des grands. Parfois, quand les étoiles sont justes, lorsque le temps s'arrête pour contempler la scène, lorsque tous les éléments ont été réunis dans cet unique but, les forces supérieures permettent à un pion de se promouvoir, non au rang d'officier, ou de général, mais au rang de légende.

Un soldat ne dévoile sa véritable valeur que sous le tonnerre des canons, la pluie de membres arrachés. Et moi, en cet instant, après que ma légion fut décimée, je me retrouve piégé, condamné comme du gibier à être servi en ragoût. Si, en cet instant, je tue ne serait-ce qu'un seul d'entre eux, alors… Dans la mort, je symboliserais abnégation, dévotion, persévérance et bravoure. Si je me levais, tout de suite, si j'en emportais un seul, je cesserais ma vie d'être humain. Comme une chenille, je serais pris dans un cocon, et deviendrais un papillon d'idée, une chimère, un conte qui guide les enfants vers la grandeur. J'atteindrais mon idéal d'être un Héros de Justice.

En 2441, le Tyran insectoïde Klys XII, auto proclamé Seigneur de La Guerre, Conquérant du Multivers et Maître des Hommes, assujettît les nôtres. Souillant toute liberté, individualité, rites et cultures, cette abomination s'est assisse sur un trône qui ne lui appartenait pas. Depuis trente, la riposte de l'Humanité se met en place, quartier par quartier, ville par ville, nous reprenons possession de notre Terre. Demain, nous serons en 2478. Une longue ovation s'élèvera chez les aliens. Mais nous, les vaincus, nous serons en deuil de cette Humanité violée par les envahisseurs. Les survivants s'avanceront, fredonneront l'air de la Résistance et patienteront. Le moral en pièce, le dos brisé, les fils de l'Homme prendront les armes. Longtemps après ma mort, la Résistance sera droite et fière, poursuivra sa mission. Dans la joie comme dans la tristesse, dans la paix comme dans la guerre, la Résistance Humaine récupérera de force sa liberté perdue !

Désolé, Ô Créateurs, l'espoir vous a trompé, mes médailles vous ont induit en erreur. Moi, John Lyrric Merriman, fantassin dans l'Armée de Résistance Humaine, suis désolé. Tellement désolé.

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