¢нαριтяє ɪɪ : Un nuage de lait - partie 2

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  • Où est-il passé ?
  • Quoi donc ? demande innocemment le barman.
  • Avant de venir vous asseoir, vous m'avez servi un verre. Un verre de rhum avec deux gros glaçon. Vous l'aviez posé sur le comptoir, juste là, dis-je en pointant du doigt l'emplacement du verre disparu.

Le barman me regarde un instant, me questionnant du regard.

  • Je l'ai débarrassé tout à l'heure. Vous vous étiez perdu dans vos pensées après votre discours sur la Vie - comme quoi rien n'était jamais tout noir ni tout blanc ou quelque chose de ce genre. Alors je vous ais laissé un instant ruminer, j'ai enlevé le verre,puis je suis revenu. Vous n'avez rien remarqué ?

Je réfléchis un instant ; je n'en ai aucun souvenir. Un instant d'absence ? Je me dis que ce n'est pas impossible, que mon regard s'est peut-être réellement perdu dans le vague, loin, loin à travers la tasse de café imprimé sur le dessous de verre, vers le café Holmes, aux couleurs rouge. J'ai peur.

  • Enfin, avait fait le barman en cherchant mon regard qui s'affolait dans le vide à la recherche d'un quelconque souvenir du barman débarrassant ce verre, je peux vous en resservir un si vous le souhaitez ?
  • Non, non, merci, avais-je brusquement décliné.
  • Très bien.
  • Vous savez, je n'ai jamais perdu la mémoire comme ça.
  • Ça nous arrive tous un jour. Surtout quand quelque chose nous perturbe...
  • Nous perturbe, répété-je en fixant de nouveau le morceau de carton entre mes doigts."
  • Il me perturbe affirme Ophélie. Je ne comprends jamais rien avec lui.

Elle est là, toujours attablée sur son siège rouge au fond de la salle. Mais elle n'est plus seule. Une amie l'a rejoint. Je crois avoir saisi son nom vaguement : Amélie. Elle se plaint. Encore, toujours. De la même chose : son "crush" qui l'a rejetée sans raison apparente. Je m'ennuie, adossé à un mur, invisible. J'écoute la conversation, essaie d'en tirer quelques informations.

  • Ophélie, Ophélie, Ophélie, dit son amie avec un soupir. Pourquoi est-ce que tu te retrouves toujours là à pleurer pour les mêmes conneries ?

Je suis d'accord avec elle. Même si je ne l'ai vu qu'une fois à cette place. Ses larmes ont creusé des sillons sur ses joues qui me sont visible. Comme des cicatrices, mais en moins grave : les peines de cœur ne sont qu'un amas de bêtise. Si elles sont là,c'est pour nous signaler que ce n'était pas la bonne personne. De toute façon, il n'y a pas de bonne personne pour Ophélie. Même si elle ne le sait pas encore.

  • Je te connais par cœur Ophélie, reprends Amélie. Tu te dis toujours : "Allez, cette fois, c'est terminé. Tu es vouée à être célibataire toute ta vie ma belle, c'est pas grave. Mais il faut se faire à la fatalité.". Alors tu te changes les idées.Parce que s'il y a un bien un domaine dans lequel tu t'y connais, c'est les solutions à un cœur brisé.

Amélie prend une gorgée de son café. Il est noir, comme ses cheveux soyeux, comme ses yeux. Elle sait ce qu'elle veut. Ses lèvres bougent sur un rythme soutenu mais maîtrisé. Elle est belle. Une fille sans doute facile à protéger. Je songe que l'archange qui l'a sur sa liste en a de la chance. Je regarde ma propre protégée qui écoute ses paroles, penaude.

  • En fait, tu as trois phase. La première, tu pleures toute la journée avec une de ses fringues - si tu as réussi à en chopper une - et un pot de Nutella qui devient ton seul confident assorti à des films marshmallow qui dégoulinent d'amour et d'ondes positive.Ensuite, comme tu as grossi - évidemment, le Nutella ne comble pas que le vide de ton cœur - tu te remets au sport. Tu fais un tas de trucs débile comme une To do list avec un tas d'objectif à la noix.Tu reprends le bouquin que tu n'écris que quand tu es dans ta phase 2 de "Femme au cœur brisé", tu sors, tu mènes une vie"saine". C'est une sorte de "syndrome du nouvel an"où tu prends un tas de résolution que tu vas tenir deux semaines.Sauf que toi, tu ne fais pas ça qu'en janvier, mais de temps en temps, de façon irrégulière tout au long de l'année. Et la troisième phase... Et bien la troisième phase se lie avec la première. Tu retrouves un garçon à qui tu t'accroches désespérément, persuadée que "c'est le bon". Alors franchement...

Elle s'accoude sur la table, passe une main sur l'épaule de son amie.

  • Tu ne penses pas que tu mérites mieux ?

Ophélie à le regard fuyant, distant, elle pleure encore un peu, mais étonnamment, ces quelques mots lui ont fait du bien, je le sens. Le vent me le murmure. Je suis un être du ciel. Et le ciel sait toujours ce que pense les Hommes. Il veille sur eux d'une manière discrète, invisible. Eux, glorieux mortels, ont connaissance de cette surveillance. Tous les matins, ils se lèvent,tous les soirs ils se couchent sous l'œil attentif de celui-ci, tantôt paré de gris, de bleu, de noir ou d'orange. Mais habitué, il ne la voit plus, ne la considère plus. Ils ont même perdu foi en ceux qui vivent par delà les nuages, les surveillant, écoutant le ciel, se faisant messager de ceux-ci. Je souris en songeant que grâce à cette oubli, ce rejet de la religion, Ophélie ne saura peut-être jamais rien de ma présence à ses côtés.

  • Je ne sais pas, Amé... Je ne sais pas...
  • Eh ben, moi, je te le dis : tu mérites mieux, avait affirmé le jeune fille en la pointant du doigt.

Un silence s'installe, les deux filles se regardent, boivent discrètement leur boisson chaudes. Une flopée d'information passent entre leurs deux regards. Elles communiquent sans parler : ce sont les mots les plus réconfortants. Elles se caressent leurs mains, se fuit, se rejoigne, se sourire, se regarde. Le lien qui les lie est puissant. Mais pas amoureux. Purement amicale. Il faut que j'en tire parti. Que je la fasse se concentrer sur ce genre d'amitié plutôt que sur une relation plus approfondie. Ophélie médite à ce qu'à dit son amie. Comme je le pensais, sa peine est déjà étouffée. Presque disparue.

  • Merci d'être là Amé... avait reniflé finalement Ophélie. Tu as toujours les mots justes.
  • Toujours là pour te ramasser à la petite cuillère ! avait souri la jeune fille. Enfin plutôt pour te sauver de la petite cuillère ! Celle qui traîne dans ton pot de Nutella !

Amélie rit un peu, Ophélie aussi, plus timidement. Puis la jeune fille au pull vert englué plonge son nez dans son café dont le nuage de lait à presque disparu dans les méandres noires. Elle paraît plus sereine. Je retiens cette façon particulière qu'à Amélie de consoler son amie. Elle lui dit la vérité. Sans détour, sans lui mentir en lui sortant des phrases types : "un de perdu, dix de retrouvé". Et ça rassure Ophélie. Je le sens, je le sais. Le ciel me le souffle.

Parce que je suis son ange gardien.

Je relève la tête vers le barman qui attend que je reprenne la parole. Mon regard s'est encore perdu. Je le lis dans les pupilles patientes de l'homme devant moi. Je soupire.

  • Ophélie aussi était perturbée. Elle pensait sans cesse au fait de trouver l'amour. C'était devenu une obsession.
  • Ça devait être compliqué pour vous, en tant qu'ange gardien,de faire son bonheur, si elle n'avait pas le droit de tomber amoureuse, avait souri le barman.
  • Ça l'était. C'est comme refuser à quelqu'un qui meurt littéralement de soif de boire. Et le pire, c'est que vous voyez tout le monde autour de vous profiter de ce que vous désirer, sans jamais y avoir droit à votre tour. Heureusement, Ophélie n'était pas toute seule.Elle avait des amis géniaux, des parents aimants... Une vie parfaite. Mais sans le grand amour.
  • Et l'on désire toujours ce que l'on ne peut pas avoir,avait affirmé le barman.

J'avais hoché la tête. C'était exactement ces mots que je cherchais.

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