Le Bal Des Aveugles
Un seul regard sur cette merveille et ils deviennent fous. Envieux de cette rivière d'or qui se jette négligemment sur ses épaules, de ces perles bleues pales, incrustées dans son visage, de la lumière qui semble jaillir de sa peau; D'un battement de cils, ils oublient leurs manières, délaissent leurs compagnes.
Elle reste au milieu de la piste les yeux dans le vide, le vague à l'âme, l'âme sur d'autres rives et elle danse, elle tourne, elle caresse de ses pas le sol de platine. Le monde tourne autour d'elle comme un manège d'yeux ouverts, rivés sur elle ou bien non, le voilà le problème.
Au bal des aveugles, personne ne la voit, leurs regards de plomb pèsent sur sa chair tandis qu'elle tourne comme une ombre sur un cadran solaire. Damnés soient ces aveugles, insensibles à son parfum, ils s'arrêtent aux pétales sans pouvoir voir plus loin.
Et notre fleur devant leurs yeux vides se fane peu à peu, elle chancelle et tombe, vide sa rancœur sur le sol de platine.
A cet appel au secours les aveugles restent sourds, et ils se tournent pour ne plus voir ses larmes, ne plus entendre ses plaintes, ne plus sentir son parfum. Au bal des aveugles la beauté ne luit pas, elle y meurt, damnés soient ces aveugles, damné soit l'humain et ses manières tout court.
Annotations