Chapitre 17
Campement MOCH, forêt de Sqenia, Dalkia, Utopia, 6 juillet 1990, environ 9h00
Au petit matin, le commandant Kodyn sonna le début de l'opération.
— Préparez-vous ! On part dans dix minutes ! dit Grant avant de retourner dans la tente de commandement, rapidement rejoint par Zack, Olympe, Jack et Hal.
Zack voulait informer le commandant Kodyn de la présence de deux Paranormaux dans son équipe.
— Commandant Kodyn ? dit-il.
— Oui ? fit Kodyn en s'asseyant à même le sol.
— Nous avons... quelque chose à vous avouer.
— Allez-y.
Alors que Zack s'apprêtait à reprendre la parole, Hal l'interrompit.
— Jack et moi sommes des Paranormaux, dit-il d'un ton ferme.
— C'est noté, répondit Kodyn qui ne semblait pas surpris.
— Alors quoi, c'est tout ? Vous n'êtes même pas étonné ? lui demanda Jack.
Grant prit son fusil et se releva.
— Non. Même si les Paranormaux ne courent pas les rues à Dalkia, j'ai effectué des missions aux quatre coins d'Utopia et vous n'êtes pas les premiers que je vois. De plus, vous pourrez nous être utiles.
Grant marqua une pause avant d'ajouter :
— Bon, il est temps d'y aller maintenant.
Les trente-quatre commandos MOCH et les sept résistants marchèrent pendant près de trois heures vers la tour REGIS.
Sur le trajet, Hal remarqua que les MOCH, en plus d'avoir le même casque, avaient tous une arme commune. Une sorte de pistolet à silex. Hal se demanda pourquoi les MOCH transportaient tous une arme aussi rudimentaire. Sans doute une vieille tradition que les MOCH se transmettaient. Mais si c'était le cas, l'organisation devait alors exister depuis plusieurs siècles. À part ça, ils disposaient d'un arsenal qui semblait être à la pointe de la technologie utopienne. Fusil d'assaut, fusil de précision, fusil mitrailleur lourd, lance-roquette, les MOCH semblaient parés à toutes les situations.
De son côté, Olympe s'inquiétait pour son ami Jack qui semblait préoccupé. Elle le savait intrigué par son rêve. Elle s'avança vers lui.
— Tu repenses à ton rêve ?
— Oui, répondit Lorage en regardant au sol.
— Tu veux en parler ?
— Elle m'a dit de la rejoindre au "pays des rêves" lorsque tout ça serait fini, dit-il.
— Le pays des rêves ? demanda Olympe surprise.
— Oui c'est étrange, non? Je doute qu'un tel pays existe.
— En tout cas, il existe des légendes à propos de cet endroit.
Jack leva la tête vers Olympe.
— Des légendes ? Lesquelles ? Je n'en ai jamais entendu parler.
— Des histoires qu'on raconte aux enfants. Le pays des rêves serait une petite province indépendante située à l'intérieur de Pacifia, ou à côté, je ne sais plus. On dit aussi qu'il serait le seul endroit au monde n'ayant jamais connu la guerre. Aucune force militaire n'aurait foulé son sol.
— Il serait indépendant ? Mais qui le dirige alors ?
— Je n'en sais rien. Ce sont juste des légendes.
— Et dans ces histoires, à quoi il ressemble concrètement ? Je veux dire, au niveau du paysage.
— À un rêve. Ce serait l'endroit où la magie serait la plus présente. Certains pensent même qu'elle viendrait de là. On y trouverait des îles flottant dans les airs, des arcs-en-ciel sur lesquels on pourrait marcher, des maisons en forme de champignon, et d'autres curiosités de ce genre, carrément différentes de ce que l'on pourrait trouver ailleurs, notamment dans les nations humaines. D'où son nom...
— Tu te moques de moi ?
— Pourquoi je me moquerais de toi ? Je vois bien que tu es préoccupé par ce rêve. Je cherche juste à t'aider.
— Mais je n'ai jamais entendu parler de ce pays. Pourquoi on m'en parlerait dans un songe ?
— Je n'en sais rien. Simple coïncidence peut-être...
— Et s'il existait vraiment ce pays, pourquoi ne relèverait-il que de la légende ? Personne n'a essayé d'y aller, pour vérifier son existence ?
— Je n'en sais rien, Jack, je suis désolée. Peut-être que quelqu'un ne souhaite pas qu'on le découvre, ou peut-être tout simplement, que ce ne sont que des légendes et que le Pays des Rêves n'existe pas. Après tout, on n'en parle que dans les contes pour enfants...
Zack vit sa sœur discuter avec Jack. Sa curiosité le poussa à se rapprocher d'eux.
— Vous allez bien tous les deux ?
— Oui, répondit Olympe, pourquoi ?
— Juste pour savoir. Il faut donner le meilleur de nous-même afin de remporter la victoire et pouvoir envoyer le message.
— Tu crois qu'on a nos chances ? lui demanda Jack.
— Oui, on a les MOCH avec nous, ça ira.
Zack était le chef de la petite escouade résistante. Il se devait de motiver son équipe. Il savait que ça serait dur. Mais il savait aussi que si les MOCH étaient égaux à leur réputation, alors ils avaient toutes leurs chances.
***
Lorsque le groupe arriva près de Telos, Hal s'étonna de voir qu'à Dalkia les villes n'étaient pas aussi connectées les unes aux autres que sur sa planète. Télos était une ville entourée de forêts. La tour REGIS n'était pas à proprement parler à l'intérieur de la ville. Une route la reliait à elle mais Télos était encore deux ou trois kilomètres plus loin. En même temps, il aurait été très difficile de la caser en pleine ville, vues les dimensions de l'édifice, se dit Hal.
Lorsqu'ils arrivèrent à proximité de la tour REGIS, les MOCH et les quelques résistants constatèrent amèrement que le Efdéème avait considérablement renforcé les défenses de la tour.
— Merde ! s'exclama Zack. Ils ont prévu le coup.
— Bah ça y est, on est baisés les mecs ! s'énerva Dwayne.
— Je leur ai dit que l'on comptait attaquer la tour, ajouta Jack.
— Quoi ?! Mais pourquoi ?! demanda Zack furieux.
— Ils menaçaient de tuer Olympe.
— Ça ne fait rien, dit Grant.
— Comment ça "ça ne fait rien"?! s'énerva de nouveau Dwayne, regardez un peu devant vous, on est à un contre dix !
— Oui mais si on les prend par surprise et que l'on crée une diversion, ça peut fonctionner, reprit le chef des Commandos MOCH, avant de faire signe à trois de ses hommes de se rapprocher. On va placer des explosifs sur quelques-uns de leurs véhicules. On les activera en même temps. Ça les amènera ici. Ils penseront qu'ils sont attaqués et que leurs assaillants viennent de l'endroit où nous nous trouvons actuellement. Nous en profiterons pour attaquer par-derrière.
— Compris, dit l'un des trois commandos.
— Quand vous aurez placé les charges, prévenez-moi. Je vous dirais quand les faire sauter.
Les trois commandos relayèrent ensuite l'information.
— Quoi ?! Alors on n'attend pas les renforts ? demanda Zack. La Résistance devrait arriver d'un moment à l'autre.
— Justement petit. Sans vouloir t'offenser, lorsque les résistants arriveront et ils arriveront je leur fais confiance, ils attaqueront probablement bille en tête. Alors qu'avec ce plan, on aura déjà éliminé une bonne partie des défenses ennemies lorsqu'ils arriveront. Fais-moi confiance. Je souhaite que les pertes résistantes soient le moins importantes possible en détruisant les pièces d'artilleries et les tourelles anti-infanterie ennemis.
Les six commandos désignés par Kodyn s'approchaient furtivement des véhicules ennemis. Les forces efdéèmes avaient positionné des caisses, des tourelles, des mitrailleuses calibre .50, des pièces d'artilleries antiaériennes et divers véhicules de combats près de l'entrée principale de la tour. Quelques méchas, accompagnés de soldats efdéèmois, patrouillaient autour.
Les six MOCH déposèrent les explosifs sur quelques véhicules, tourelles et artilleries du Efdéème et neutralisèrent quelques soldats ennemis, le tout sans jamais se faire repérer.
Au même moment, les autres MOCH accompagnés par les sept résistants contournèrent l'installation pour se placer de l'autre côté, attendant confirmation que les charges étaient bien posées. Ce qui ne tarda pas.
— Explosifs posés, annonça l'un des six commandos.
— Compris, rejoignez-nous, lui répondit le commandant Kodyn.
C'est avec autant de discrétion que les six poseurs de bombes rejoignirent leurs coéquipiers. Ils avaient réussi à placer leurs explosifs sans déclencher l'alerte.
Grant donna alors l'ordre de tout faire exploser. Les six MOCH poseurs de bombes ayant chacun posé deux charges, ce sont donc douze déflagrations simultanées qui retentirent, faisant réagir les troupes efdéèmes qui mordirent à l'hameçon. Le plan de Kodyn fonctionna tel qu'il l'avait décrit. Les efdéèmois se déployèrent comme prévu à l'endroit d'où provenaient les explosions ne laissant que très peu d'opposition à la progression des MOCH et des résistants.
— Vite ! On a très peu de temps avant qu'ils ne se rendent compte de la diversion ! cria Grant.
Le groupe se précipita vers l'entrée arrière de la tour. Même si le gros des forces efdéèmes était parti de l'autre côté suite à la petite manœuvre des MOCH, deux Méchas et quelques soldats étaient restés pour garder l'entrée arrière.
— Abattez-moi ces deux méchas ! ordonna Kodyn en les pointant du doigt.
Deux MOCH tirèrent au lance-roquette sur les deux cibles, les détruisant toutes les deux.
— À deux heures ! cria un MOCH, signalant la présence de soldats ennemis en train d'arriver vers eux.
Les quelques efdéèmois furent abattus par les tireurs d'élite MOCH avant même d'avoir pu effectuer le moindre tir.
— C'est bon, c'est sécurisé ! dit Kodyn, on peut entrer maintenant. Mais ne baissez pas la garde !
À l'intérieur de la tour se trouvait le personnel de maintenance, ainsi que quelques soldats efdéèmois. Ces derniers ouvrirent le feu sur les intrus, créant la panique.
— À couvert ! cria Kodyn. Faites attention à vos cibles ! Ne tirez pas sur les civils !
Dans une telle situation, Jack se sentait inutile. Ne maîtrisant pas encore totalement ses pouvoirs, il avait peur de produire des éclairs ici. Il ferait probablement de nombreuses victimes collatérales. Hal lui, par contre, arrivait à faire des choses que Jack n'aurait jamais cru possibles. Dernièrement, il l'avait vu léviter. À présent il envoyait des flammes sur les Efdéèmois. Un vrai dragon se dit Jack.
L'équipe ne mit que quelques secondes à sécuriser le hall.
— Que tout le monde se calme ! cria Kodyn au personnel. Nous ne vous voulons aucun mal !
— On vient pour libérer Dalkia ! leur cria Olympe.
Kodyn la regarda. Il était étonné de voir que cette jeune femme de vingt ans était aussi déterminée à sauver son pays, au risque de sa propre vie.
Olympe n'avait plus rien à voir avec la jeune fille apeurée et paniquée qu'elle était lors de la bataille de Seed. Ces derniers jours, elle avait appris à contrôler sa peur et à se donner complétement pour sauver les siens.
— Il faut faire vite, dit Elena au commandant Kodyn. Les Efdéèmois ne vont pas tarder à se rendre compte que les explosions n'étaient qu'un leurre.
La jeune femme ne croyait pas si bien dire. En effet, quelques minutes plus tard, le Efdéème s'aperçut que les combats avaient lieu à l'entrée arrière de la tour.
Au même moment, les forces résistantes contactées la veille par Grant et Zack arrivèrent, leur accordant alors un nombre assez important de renforts qui empêchèrent les troupes ennemies de se replier.
— On a un problème ! dit Zack à Grant. La parabole est orientée vers le sud-est en direction du Efdéème. Il faut qu'elle soit orientée vers l'ouest pour contacter le Véèrème. On peut leur envoyer un message, mais s'il répondent, il y a de fortes chances qu'on ne les reçoit pas.
— Orientez-la à l'ouest dans ce cas, suggéra Grant.
— C'est justement ça le problème. Lorsque l'on est entré dans la tour, ils ont sécurisé les commandes automatiques. Il faut la réorienter manuellement. Et pour ça, il faut monter les cent vingt étages de la tour, jusqu'à arriver sur le toit. dit Zack découragé.
— Quoi ?! demanda Kodyn.
— C'est le seul moyen.
— Je vais y aller, dit Olympe.
— Je viens avec toi, insista Zack. Pas question que tu y ailles seule.
Grant réfléchit un instant. Faire pivoter la parabole manuellement était la seule solution. En même temps, le Efdéème arriva aux portes avant de la tour et se retrouvèrent entre les résistants et les MOCH.
— Commandant ! Ils sont là ! dit un MOCH.
— Allez-y, finit par dire Grant aux deux résistants. On reste ici pour vous couvrir. Faites au plus vite.
— Attendez ! cria Jack. Elena est ingénieure. En cas de problème, elle peut nous être utile.
— D'accord, emmenez-la avec vous, dit Grant avant de s'adresser à Lorage. Vous aussi. Allez avec eux. Vos pouvoirs pourraient leur être utiles.
Olympe, Zack, Elena et Jack se dirigèrent vers l'ascenseur. Même avec un ascenseur, cela prendrait du temps. Il fallait arriver sur le toit, réorienter la parabole, envoyer le message, puis redescendre. Ce qui pouvait prendre quelques dizaines de minutes. Minutes durant lesquelles les pertes résistantes et MOCH pouvaient être importantes. Et lorsque l'on parlait de la hauteur de la tour REGIS, il était hors de question que Hal utilise ses dons pour les faire léviter jusqu'au sommet. C'était bien trop dangereux. S'il venait à se prendre une balle, il perdrait le contrôle et ce serait la mort assurée pour ses amis. L'Ascenseur était la seule solution.
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