Chapitre 29 : Liabell

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Maintenant que j’avais la boîte entre mes mains, je ne savais pas ce que je devais en faire. Aussi rapidement et sûrement que je le pus, je revins derrière les lignes de défense alliées. J’avais été complètement folle de me lancer là-dedans. Devant mes yeux, c’était un véritable ballet chaotique de magie. Finalement, Cléofée avait retrouvé sa forme de feu follet furieux et balançait le toute sa fureur. Alpha jouait de ses ombres pour garder la ligne de mire du gardien obstruée, quant à Elinor et Zeïna, elles combinaient leurs talents pour maintenir et électrocuter l’inconnue.

L’odeur de chairs brûlées était à la limite du supportable. L’inconnu continuait pourtant de rester debout et nous renvoyait quelques sorts et alternait avec des sortilèges de protection.

Et moi, j’étais là, derrière, telle une demoiselle en détresse avec ma boîte mal fermée entre les mains. Je refermais d’ailleurs le loquet assez précipitamment lorsque je m’aperçus qu’il s’était soulevé sans que je m’en aperçoive.

À force de foudre, de flammes et de lianes épaisses, autour de nous, les murs avaient commencé à gronder. Quelques pierres tombaient du plafond, aussi dus-je pousser Zeïna pour ne pas qu’elle se fasse écraser par un plus gros bloc que les autres.

— Les tunnels s’effondrent ! hurla Zeïna, alertant le reste du groupe beaucoup trop concentré.

Si j’avais peur que ma vie se termine ici, j’vais pu calmer le regard affolé de notre adversaire. Pour lui aussi, cette nouvelle était des plus inquiétantes.

Aussitôt, qu’il eut constaté à son tour l’effondrement lent des parois, il arrêta de lutter contre nos agressions. Nous ne faisions plus partie de son univers. Il avait tourné le visage en direction de la statue d'Alister MacGodron. D’un tour de force puissant, il désintégra les plantes d’Elinor, tout comme il sembla « avaler » les ombres d’Alpha. Maintenant libéré et en pleine possession de sa vue, il se rua pour se mettre à genoux devant la statue du magicien.

— Pardonnez-moi maître, car j’ai échoué. La boîte ne vous appartient plus désormais. J’ai échoué à protéger votre bien le plus précieux... Je n’ai pas mérité votre confiance. déclara la voix grave de l’inconnu.

Le voir si affligé alors qu’il avait été si fier et vaillant quelques secondes plus tôt me brisait le cœur. Cet homme, peu importe de quelle époque il venait, ne nous avait pas battus par méchanceté, seulement par honneur et loyauté. Il n’avait fait que tout mettre en œuvre pour réaliser la dernière volonté d’un puissant sorcier auquel il avait accordé toute sa confiance.

— Lia ! Dépêche-toi avant qu’on soit tous ensevelis ! me lança la voix d’Elio un peu plus loin dans la pièce, près d’une sortie.

Il avait raison, si je ne me dépêchais pas, je finirais par ne plus pouvoir m’échapper des décombres qui tombaient de plus en plus gros depuis le dessus de nos têtes.

J’avais fait un pas en direction de mes amis, mais ma conscience m’empêcha d’en faire un second. Je m’étais immobilisée, le regard rivé sur la silhouette de notre agresseur. Soupirant d’agacement contre moi-même, je m’installai également à genoux proche de l’homme que nous avions d’abord pris pour un autre mort-vivant. Lorsque ma main se posa délicatement sur son épaule brûlée qui cicatrisait à une vitesse affolante, je me rendis compte que sa peau était agréablement chaude.

— Vous ne pouvez plus rien pour votre maître. Venez avec nous. Sortez d’ici, on vous emmènera dans une école. Il y aura d’autres magiciens, vous pourrez refaire votre vie. déclamais-je avec assez de force pour être entendu malgré tous les grondements qui tonnaient autour de nous.

Des yeux baignés de larmes, il leva son regard gris perle vers moi. Son regard souriait malgré son humidité. Visiblement, il comprenait que je ne lui voulais pas de mal, juste quitter ce lieu sans qu’il n’y ait plus de blessé.

— Je ne peux pas quitter mon maître. Lui seul est le gardien de mon âme. Mais vous êtes généreuse. Je comprends maintenant pourquoi ma force était diminuée face à votre clan.

— Mais de quoi parlez v... essayais-je de l’interrompre, perdu dans son discours.

— Clan, Coven, Groupe, Sororité, peu importe comment cela se nomme aujourd’hui, vous êtes tous soudés et êtes appelés à faire de grandes choses. La pureté de votre âme a bridé mes pouvoirs et permit à ce que vous héritiez du coffret de mon maître. Protégez ses secrets au péril de vos vies puisque je ne le puis plus. J’espère seulement que vous comprendrez avant qu’il ne soit trop tard que certains secrets ne doivent pas être révélés.

— Venez avec nous, vous pourrez nous expliquer. repris-je en lui agrippant le bras pour tenter de le relever.

Mais l’homme n’était qu’une montagne de muscle, je ne réussis même pas à lui soulever le bras.

— Je vais vous maintenir un passage pour toi et ton clan. Fuyez. m’ordonna-t-il d’une voix autoritaire.

Je n’avais pas eu peur, mais dans le ton de cet homme, tout donnait à croire qu’il fallait mieux obéir. Mon corps s’était exécuté avant même que mon esprit prenne une décision.

Je retrouvais mes amis et put remettre le coffret entre les mains de l’instigatrice de toute cette folie : Alpha. Cette dernière sembla ravie de pouvoir ranger la boîte dans son sac tout en continuant de courir en direction de la lumière du jour. Bientôt la sortie.

Voir le bout du tunnel me fit remarquer un détail. Un détail sur mon propre corps. Cela aurait pu paraître insignifiant, mais un agréable fourmillement familier me parcourait le bout des doigts, remontant le long de mes bras avant d’atteindre ma nuque. Il n’y avait qu’une seule chose qui me donnait ce genre de sensation : ma magie était revenue.

L’idée qui me traversa soudain se passa d’explication. La seconde suivante, j’ouvrais un passage vers la pièce d’Alister MacGodron. Le gardien était toujours à genoux contre la statue.

M’entendant arriver, il m’observa avec surprise. Cette fois-ci, je ne lui laissais pas le temps de s’exprimer, je l’attirais de toutes mes forces à l’intérieur de mon portail, ouvrant l’autre porte directement à l’entrée de la grotte.

L’air frai et chaud me fit réaliser que nous avions vécu pendant trop longtemps dans une atmosphère sombre et humide. Comme une fleur, je me sentis revivre tandis que le feuillage de la forêt servait de parasol naturel, nous empêchant d’être éblouis.

— Lia ! Tu es là ! Mais comme tu... Et pourquoi il... Tu peux nous expliquer ?! balbutia une Cléofée enroulée dans une couverture de fortune pour cacher sa nudité.

Je leur aurais volontiers tout expliqué, mais sur mes genoux, l’homme n’arrivait plus à tenir debout, il crachait su sang et sa cicatrisation que j’avais constaté être magique à l’intérieur, n’avait plus lieu.

— Non non non, il est en train de mourir. m’exclamais-je d’une voix dont je n’avais pu maîtriser la panique.

— Je... Je suis déjà mort... Depuis longtemps. Merci... Merci d’avoir permis que je voie une dernière fois le monde extérieur. siffla l’homme avant que tout son corps se fasse lourd et commence à se transformer en cendre.

Muette devant le choc de cette fin soudaine, je restai sans voix. Je ne sentais plus mon cœur battre. Encore une fois, la mort m’entourait. Seule la brûlure du sel de mes larmes m’indiquait que je n’étais pas en plein cauchemar.

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