Chapitre 04 : Zeïna

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J'étais épuisée. Prendre l'air était l'une des activités qui me pompaient l’énergie. Je ne savais pas comment faisait l'air pur pour me vider ainsi de toutes mes forces, mais cela n'empêchait pas que j'étais fatiguée alors que je n'étais sortie qu'un seul après-midi.

Entraîner Liabell n'était jamais une corvée et pour tout dire, j'aimais beaucoup la voir sautiller et tenter de nouvelles choses avec son pouvoir béni. Au moins, elle faisait des efforts pour être à la hauteur des attentes que l'on plaçait sur elle. Ho bien sûr, ce n'était certainement pas pour moi que je me faisais du souci, je me servais de mon pouvoir de la foudre quand bon me le semblait et je n'avais jamais eu de difficultés avec cela.

Je refermais la porte du bureau de mon père avec autant de calme qu'il m'était possible d'avoir. Comme me l'avait signalé mon amie, mon absence du jour avait été remarquée par Méline qui s'était empressée d'aller tout rapporter à mon paternel. Et dire que ce dernier croyait encore pouvoir me faire culpabiliser avec de vaines paroles... Cela ne marchait plus depuis que j'avais environ une dizaine d'années.

Mais, je laissais derrière moi ces pensées désagréables, je devais presser le pas afin de ne pas manquer l'heure du dîner. Je l'avais promis à mon groupe d'étude et il était hors de question que je ne tienne pas l'une de mes promesses. Surtout que cela faisait bien trois jours que nous ne nous étions pas vus toutes réunis. La faim me tenaillait les entrailles et j’étais d'autant plus contente de me rendre à la table rectangulaire qui nous était réservée. Tous les yeux se levèrent vers moi alors que je m'installais en bout de table. Cette place était normalement réservée à notre mentor. Cependant, j'avais pris l'habitude, en l'absence d'Alec, de prendre sa chaise. Après tout, personne n'irait me blâmer de prendre mes aises et surtout pas Alec qui jouait trop souvent aux abonnés absents. Je ne fus pas surprise d'arriver en plein milieu d'une conversation. C'était Alpha, qui comme à son habitude soulignait les défauts de notre mentor.

— … Je ne dis pas qu'il faudrait que l'on change de mentor... Mais ligoter Alec avec un bon sortilège devrait être efficace ! expliqua la jeune femme aux cheveux presque blancs.

— Ho une revenante, salut, Zeï... Tu veux un verre de rouge ? Ça te requinquera, t'as une petite mine. remarqua Cléofée qui pointait du doigt la bouteille de vin.

Je secouais négativement la tête avant d'attraper la bouteille de vin blanc. Je l'avais toujours préféré au rouge, beaucoup plus frais et printanier à mon goût. Je me servis une bonne rasade et en pris trois bonnes gorgées. Cela m'aiderait sûrement à me détendre de toute cette infecte journée.

— Cléo, n'en rajoute pas une couche... C'est bon... morigéna Liabell.

— … Et… Plus personne ne m'écoute... Ho Zeï ! Alors comme ça, t'as été viré de la bibliothèque ?! C'est vraiment pas de bol pour toi... enfin je veux dire, vraiment pas sympa de la part du nouveau et... continua Alpha malgré mon regard agressif dans sa direction.

— Liabell ? Puis-je savoir pourquoi tout le monde est au courant de ce fâcheux incident ? questionnais-je les dents serrées.

Pas que je fus réellement en colère, c'était plutôt du mal-être. J'étais encore pleinement vexée par le comportement déplacé de ce bibliothécaire du dimanche.

— Je leur avais pourtant dit de ne pas ramener ça sur le tapis... Mais t'en fais pas, tu pourras sûrement y retourner demain...

— Je ne suis pas sûre qu'elle soit du genre à attendre demain, je la vois déjà y courir après dîner... et si ça n'est toujours pas ouvert, elle campera sûrement devant la porte.

Voilà, j'étais agacée, et un petit éclair bleu jaillit de mon index pour toucher Cléo en plein front. Cette dernière fit un bon sur sa chaise avant de se tenir fermement le front. Une petite marque de brûlure à l'endroit où avait atterri la décharge resterait pendant une bonne vingtaine de minutes. J'aimais beaucoup Cléo, mais elle avait tendance à trop se laisser aller, je me faisais alors une véritable mission de la recadrer, elle et Alpha quand elles dépassaient les limites de ma patience.

Cléofée ne s'excusa pas, mais au moins, elle devint silencieuse tandis qu'Elinor ricanait derrière sa main. Voir cette dernière de bonne humeur me tira un simple sourire avant que je ne commence à manger.

— Et mon plan pour avoir un véritable mentor alors ? Zeï, tu as une idée ? reprit Alpha la bouche encore pleine.

— Je suppose que lui parler n'a aucun effet. Peut-être que s'il avait un peu plus de pression ou d’intérêt à nous donner ses enseignements cela le retiendrait plus longtemps.

— Oui... D'accord, mais comment pour pourrait faire ça ? Je veux dire, c'est pas comme si nous avions un quelconque pouvoir sur lui... souligna Elinor.

— Ou alors, on cherche des petits éléments compromettants dans sa chambre, style des magazines cochons avec des pages collées et on le fait chanter...

— … Cléo, je me demande parfois ce que tu peux bien faire de ton temps libre... soupira Liabell.

— Ho... et bien, je suis parfaite... Et de ce fait, toutes mes activités secrètes le sont... Ça te va comme réponse ?

— Pas vraiment.

— On va oublier ton idée Cléo, tu nous en veux pas ? déclara la rouquine du groupe en tapotant l'épaule de sa voisine.

— Les génies ont toujours été incompris... J'accepte mon statut avec humilité...

— Alpha, il semble me rappeler que ton oncle a été le mentor d'Alec... Peut-être que si tu lui faisais un petit rapport qui les manquements d'Alec, il pourrait lui, lui parler et le remotiver.

— Ça me semble une plutôt bonne idée, je vais faire ça alors ! se réjouit la concernée qui venait de terminer son assiette.

Cela faisait quelques jours que j'y pensais, il m'avait seulement fallu une occasion de donner mon idée. Qu'elle ait du succès n'était pas surprenant.

Je me tapotai le coin des lèvres avant de me lever. J'avais terminé mon assiette de choux farcis et me sentait repue, prête à aller dormir comme une souche. Enfin, si Alator daignait ne pas griffer ma fenêtre à trois heures du matin... Mais avant tout, il faudrait que je fasse une petite chose qui me tenait à cœur et pour cela j’avais besoin des pouvoirs d'Elinor.

— Elinor, tu pourras venir avec moi dans ma chambre, j'ai un service assez spécial à te demander.

Elle accepta avec curiosité et il ne m'en fallait pas plus pour être satisfaite pour le moment.

Ce fut donc avec patience que j’attendis que mon amie aux cheveux roux termine sa mousse au chocolat en chantonnant. Nous étions plus que toutes les deux, sans compter Elio. Ce dernier semblait somnoler à la table, bien qu'un gardien n'ait pas besoin de sommeil.

Quand Elinor eut terminé son repas, ce fut avec mon pas rapide que je pris la tête de notre expédition. Devant la porte, avant de l'ouvrir, je fis volte-face pour toiser le gardien.

— Comme c'est une entrevue entre filles, je pense que l'on pourra se passer de ta présence, cela ne te dérange pas trop ? demandais-je en essayant de me montrer compréhensive.

— Non... Je vous souhaite une bonne nuit à toutes les deux... À demain matin Elinor... déclara Elio avant de se transformer en un petit nuage de fumer et de disparaître.

J'ouvrais alors la porte et allumait la lumière en attendant que la rousse entre. Puis je refermais vivement la porte en y mettant le verrou.

— Un truc entre filles ? C'est la première fois, je peux savoir ce qui t'a motivé à m'inviter ?

— Ho ça... non c'était juste pour qu'Elio parte sans poser de question. J'ai besoin de tes pouvoirs. Parce que…

Je retirais mon torchon blanc de ma poupée d'ensorcellement. La poupée avait été faire avec un morceau de bois entouré d'un chiffon imbibé de vinaigre. Le tout trempait dans une solution salée. Mais pour que ma petite vengeance soit effective, j’avais besoin des pouvoirs de la terre d'Elinor.

— Il faut que tu traces, ce symbole autour de l'effigie... Tu peux le faire ? suppliais-je pratiquement.

Mais Elinor resta un instant muette à me regarder en alternance avec la statuette. La voyant ne rien dire, et répétant les mêmes mouvements, je me permis de la secouer après l'avoir attrapée par les épaules.

— Rho... ça va, je ne te demande pas de tuer quelqu'un... C'est seulement pour lui donner une migraine assez forte pour empêcher son sommeil... Le temps d'une nuit. expliquais-je pour ma défense.

— Tu sais... Faire du mal à une personne... ce n'est vraiment pas bien... Je n’ai pas envie de le faire souffrir... Hum... tu parles de qui déjà ?

— Si je te dis : Astrid... tu le fais ?

Elle me répondit par une moue mignonne. C'était un mensonge évidemment, faire du mal à une fille de l'autre groupe ne m'intéressait absolument pas. Ce que je désirais par-dessus tout en ce moment, c'était d'empêcher ce rustre de travailler correctement l'en empêcher si fort pour qu'il ne puisse plus toucher aux livres fragiles qu'il avait cadenassés pour sa seule consultation. Je m'en serais presque voulu de mentir à Elinor, mais c'était le seul moyen pour qu'elle accepte de m'épauler, et ensuite, parce que ma petite vengeance était d’utilité publique, pour tous les étudiants qui avaient été interdits de séjour à la bibliothèque aujourd'hui !

Finalement, Elinor accomplit les deux dernières étapes du rituel avant de s’essuyer le doigt sur le torchon.

— Voilààà ! Parfait ! Merci d'être passé ! C'est toujours un plaisir de t’accueillir dans mon humble chambre. Lançais-je pour annoncer que notre petite sauterie était terminée. Je passais un bras dans le bas de son dos pour l'aider à se diriger vers la porte.

— Rentre bien et ne te perd pas en chemin ! ajoutais-je d'une voix presque chantante.

— Ça va, j'ai compris, je m'en vais, pas la peine de pousser.

— Merci encore une fois !!!

Après mon dernier remerciement, je refermais et toute souriante je m'allongeais sur mon lit. Je pensais pouvoir faire quelques plans machiavéliques quand Alator se mit à gratter à ma fenêtre. Je soupirais et me lever aussitôt pour laisser entrer mon lynx ailé de douze kilos. Aussitôt entrer, il s'étira avant d'aller s'installer près de mon oreiller, sa place qu'il s'était attribuée à sa naissance. Il commença à y faire sa toilette aussitôt. Je ne le dérangeai pas en papouille inutile, il ne les appréciait pas de toute façon.

— On verra quelle tête aura cet ahuri de Térham demain matin !

— Tu as terminé ton enchantement ?

— À l'instant !

Mon familier émit un léger ronronnement.

— Nous irons voir ça demain, il me tarde de voir comment il aura géré son insomnie... annonça l'animal en terminant de se mordiller un morceau de queue.

Il me tardait aussi de voir comment ce bibliothécaire du dimanche allait supporter sa migraine carabinée... J'en ronronnais d'avance, tout comme le faisait Alator.

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