Chapitre 05 : Cléofée

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Il était encore tôt. Je voyais encore la rosée matinale au travers des fenêtres du couloir que je traversais. En même temps, c'était rare que je me réveille aussi tôt le matin. Mais aujourd'hui n'était pas un jour comme les autres. En effet, j'étais plus déterminée que d'habitude et c'était pour que l'on accède à ma requête que j'avais sauté du lit. Ho, bien entendu, j'avais quand même pris le temps de me rendre totalement impeccable, comme toujours.

À la fin du couloir se trouvait le secrétariat de l'académie, ainsi que les bureaux des grands dirigeants. Ma mère en faisait partie, cela me rendait plutôt confiante quant à l'autorisation de sortie que je voulais obtenir.

— Stop ! Où comptes-tu aller comme ça ? m'interpella une voix.

Cette voix, je la connaissais depuis ma naissance. Aussi je ne fus pas étonnée de voir ma sœur aînée en me retournant. J'avais eu beaucoup de difficulté à retenir un profond soupire agacé.

— Je croyais que l'on remarquerait que je me rendais dans le bureau de maman... répondis-je de la façon la plus innocente possible.

— Évidemment... Et bien tu es venue pour rien, elle est indisponible pour le moment. Tu vas devoir patienter ou bien t'en aller... Et sache que je ne te retiendrais pas si tu décidais de débarrasser le plancher !

— Ho, mais j'ai toute ma matinée, je vais l'attendre ! répondis-je de façon effrontée, en ignorant l'invitation pressante de Méline à m'en aller.

Ma sœur avait tout de la beauté froide, je l'observais rapidement pour voir si je pourrais me moquer de son physique et ainsi baisser sa garde.

Méline avait de longs cheveux noirs et des yeux dorés. Elle se tenait droite et portait la robe couleur argent que devaient arborer les mentors de l'académie. Sa peau était blanche, si blanche qu'on aurait presque pu la confondre avec un gardien. Mais peu importait, si elle ne voulait pas faire d'UV c'était bien son problème.

Un soupir m'échappa alors que je me laissais tomber dans le fauteuil contre le mur, là où les personnes en attente d'audience s'installaient.

— Tu pourrais faire preuve d'un peu de tenue ! souligna Méline. Je me contentais de lui répondre en lui tirant la langue.

Ce fut à cet instant qu'un fracas se fit entendre dans le bureau de la mère. Aussitôt sur mes pieds, je profitais de la surprise de ma sœur pour lui passer devant et pousser avec violence la porte du bureau...

Je regrettai aussitôt mon geste, car mes yeux furent assaillis par l'image de ma mère qui avait acculé son collègue dans un coin de la pièce et qui jouait avec les boutons de la chemise de sa proie malheureuse. J'étais complètement écœurée. Ma mère en avait toujours eu après Sephan, l'oncle d'Alpha, mais je ne m'étais jamais douté qu'elle essaierait de lui mettre le grappin dessus alors qu'ils étaient dans l’exercice de leurs fonctions.

— … Cléo ! Frapper avant d'entrer n'est pas une simple recommandation ! vociféra ma tigresse de mère alors qu'elle semblait terriblement contrariée de voir son attaque sournoise interrompue.

Je crus voir dans le regard de Sephan un élan d'espoir et de soulagement. Cela me fit sourire intérieurement, voir un dirigeant se faire martyriser avait toujours un côté plaisant. J’essayais cependant de garder mon aplomb face à cette mère de mauvaise humeur.

— Je venais seulement chercher une autorisation de sortie. Je ne vous embêterais pas plus longtemps... déclarais-je en essayant de rester assurée.

— Il en est hors de question, va t’entraîner, ça te passera l'envie d'être oisive !

Ma mine s’assombrit aussitôt, mais je m'y étais attendu dès lors que j'avais croisé le regard acéré de ma génitrice. J'étais déçue de m'être levée aussi tôt pour ne pas réussir ma noble quête, car il était évident que dans ses conditions, insister m'aurait valu de nombreuses corvées que je préférais éviter. Cependant, j'étais persuadée que si je revenais demain ou après-demain sans l'interrompre dans ses tentatives agressives de drague, ma demande finirait par être acceptée. L'avoir à l'usure était l'un de mes plans.

Un « Tsss » sifflé et voilà que je repartais encore plus agacée en voyant le regard triomphant de ma sœur qui semblait plutôt satisfaite de ma défaite. Il ne me restait plus qu'à retourner dans ma chambre pour y lézarder correctement. Les couloirs étaient calmes, les jeunes devaient sans aucun doute être en train d'étudier dur pour atteindre notre niveau. Je ne me souvenais que vaguement de cette période, mais une chose était certaine, c'était que j'étais heureuse d'être arrivée à mon année de stage sans devoir trop m'acharner. La magie était délicate et un manque de rigueur ou de foi pouvait faire tout basculer, sans parler de l'affinité avec son familier.

Je tournais au coin d'un couloir et je faillis percuter Alpha qui sautillait joyeusement devant elle. Cela m'amusa et je laissais un sourire étirer mes lèvres.

— Au moins quelqu'un de bonne humeur dans cette école ! lançais-je pour saluer la demoiselle à la chevelure blonde platine.

— Comme tu dis ! ajouta-t-elle très enjouée.

— Que nous vaut l'honneur d'une telle joie ? demandais-je curieuse de savoir si je pourrais partager son enthousiasme.

— Rien de bien important... Mais... J'ai réussi à ligoter Alec ! avoua mon amie en rougissant de plaisir.

Je me retins de poser ma main sur mon front devant l'inconscience de ma camarade. Puis, je me rappelais qu'Alec était sensé être notre mentor, même s'il n'était pas beaucoup plus vieux que nous, il avait un niveau de magie qui était sensé nous dépasser incontestablement. De ce fait, je m'étranglais avant de reprendre la parole.

— Prodigieux ! Stupide, mais prodigieux ! Tu comptes faire quoi avec un mentor ligoté au juste ?

— C'est pour aller fouiller correctement dans ses affaires, comme on l'a dit dans le plan, trouver des choses compromettantes pour le faire chanter et l'obliger à nous faire cours ! expliqua Alpha en agitant les mains.

— Tu ne reculeras ne devant rien ! remarquais-je avant de la quitter pour continuer mon chemin.

— Je suis certaine que ça te soulagerait de venir lui faire la morale aussi ! me lança Alpha alors que je m'éloignais.

Je laissais un éclat de rire remplir le couloir tandis que je secouais la tête avant de me diriger vers l'extérieur du château. Les couloirs étaient toujours déserts et mes talons résonnaient contre les murs. Ce son m'apaisait, me rassurait... Bien que le manque de confiance en moi ne me caractérise pas, cela me faisait du bien de m'entendre marcher seule, loin du tumulte de la foule.

Les yeux presque clos j'avançais en ligne droite, connaissant depuis mon enfance les couloirs de la bâtisse.

— Regarde ou tu marches, rouquine ! me balança une voix en face de moi.

Ma paix brisée, je relevais les yeux en direction de la remarque agressive, le regard prêt à tuer. Mes yeux se posèrent alors sur l'une des créatures humaines que je pouvais sûrement le moins supporter, je me demandais encore comment j'avais pu me mettre en couple avec « ça » quelques années plus tôt.

— Bah alors Tarren, tu t'es perdu dans les couloirs ? Et en plus tu deviens daltonien ! C'est triste, une perte de vue si jeune ! répliquait-je d'un ton acide tout en me mettant sur la défensive.

— Ce n'est pas moi qui ai le sens de l’orientation comparable à celui d'un petit pois ! reprit-il.

Cela me vexa, je grimaçais et m'approchais d'un pas vif et le prit par le col l'obligeant à courber le dos pour que son visage soit à ma hauteur.

Magnus Tarren était beau, je n'avais jamais émis de doute là-dessus, mais, son caractère prétentieux et m'as-tu-vu gâchait tout ce potentiel. Je me préparais à lui offrir mon poing en plein visage. Cela ne le ferait peut être pas souffrir, mais au moins cela me soulagerait effectivement de quelques petites frustrations. Un sourire mauvais s'étirait sur le visage du jeune homme dont le visage n'était plus qu'à quelques centimètres du mien, du coin de l’œil, je voyais son poing qui s'était changé en pique de glace dirigée vers moi. Je devais être rapide ou bien il me blesserait au visage, et cela, je ne le lui pardonnerais jamais.

— Ça suffit ! hurla une voix à l'autre bout du couloir.

Je soupirais, car de nouveau je devinais trop facilement à qui appartenait cette voix autoritaire. Ho je l'avais souvent entendu douce et compréhensive. Mais sur le moment, c'était de l'agacement qui rompit l'échange haineux que j'avais avec le frère d'Alpha.

D'un saut vers l'arrière je m'éloignais de Magnus, qui fit de même en laissant sa glace se changer en eau et réintégrer son bras.

— Vous n'êtes que deux gamins imbéciles ! Je ne suis pas votre nounou ! Arrêtez de chercher à vous étriper dès que vous vous croisez ! C'est complètement stupide à la fin ! reprit-elle alors que son agacement allait crescendo.

J'aurais voulu m'excuser auprès de mon amie, je n'avais jamais voulu lui faire de la peine, mais il était hors de question que je m'aplatisse devant cet imbécile de Magnus.

— Oui, c'est vraiment puéril de ta part, Cléo, de toujours vouloir me frapper. ajouta le jeune homme qui m'avait agressé en premier.

Son attitude mielleuse m’écœurait et m'en coupa le souffle. Il ne manquait pas de toupet et pour cela, il aurait bien mérité mon talon aiguille entre les deux yeux. Je n'eus cependant pas le temps de réagir que l'ignoble créature c'était déjà esquivé en direction du dortoir des garçons. Je soupirais et m'approchais doucement de Liabell.

— Je ne sais vraiment pas comment tu arrives à le supporter, si j'étais à ta place je l'étranglerais chaque jour au moins une dizaine de fois. avouais-je en me plaçant à ses côtés pour prendre la direction de nos dortoirs.

Mon amie se laissa aller à rire un peu, elle ne semblait pas m'en vouloir de la petite altercation et cela me soulageait.

— Heureusement que ce n'est pas toi qui dois le voir souvent alors ! assura-t-elle amusée.

Finalement, j'avais manqué mon coup, moi qui voulais aller encourager Liabell à son entraînement des foulards rouges, voilà que c'était elle qui venait m'encourager à calmer mes ardeurs... Qu'à cela ne tienne, je pouvais prendre le temps de m'occuper de moi et de mon familier. Ce dernier serait sûrement en train de paresser derrière la fenêtre dans un rayon de soleil.

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