(2017) Hiver
Le garçon marchait dans le milieu du chemin, les bras ballant et l’air hagard. Simplement vêtu d’une chemise élimée et d’un pantalon de toile trouée, il allait pieds nus, s’enfonçant dans la neige jusqu’aux genoux. Ses mains et sa peau, rougies, par le froid, et ses lèvres teintées d’un tendre indigo [lui donnaient un air de clown].
Tandis qu’il cheminait péniblement, vacillant à chacun de ses pas, de nouveaux flocons de neige tourbillonnaient dans le vent et achevaient leur course sur ses frêles épaules et les cheveux corbeaux qui couronnaient son chef. La poudreuse enveloppait le paysage environnant d’un lourd linceul blanc, estompant les sons jusqu’à les faire disparaître. Tant et si bien que seule la difficile respiration du garçon concurrençait le sinistre chant des courants d’air. S’il avait fallu trouver un (autre) être aussi misérable que lui, seuls les arbres auraient répondu à l’appel : longeant la voie pavée comme s’ils en étaient les gardiens, ils dressaient leurs branches nues vers le ciel, semblant ainsi supplier les cieux de cesser leurs pleurs glacés.
Le garçon leva brutalement la tête, cherchant du regard un quelconque point de repère qui lui aurait permis de savoir s’il approchait de son but. Malheureusement, la chape blanche recouvrait tout, atténuant les contours et effaçant les formes. Le garçon s’arrêta, soupira doucement, puis reprit la route de son pas lent et plus chancelant que jamais. Un pas après l’autre, il luttait contre la neige, le froid et les assauts répétés de la brise glacée. Celle-ci, justement, gagnant en force, faisant tourbillonner de plus belle les flocons de neige et les envoyant se fracasser sur la frêle carcasse du garçon. Il frissonna une fois, longuement, puis s’effondra. Il se releva, tomba de nouveau, tomba encore. Une fois, deux fois, il parvint à se relever. Puis il n’y parvint plus.
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