23. Question de mains
- Hé ! Lâche-moi, foutre-main !
- Oh, pardon !
Je me recule prestement, pour me plaquer sur le mur d’airain. De l’autre côté des barreaux en étain, Gabriel me toise, gourdin bien en main, Bescherelle contre les reins. Pour la privauté passagère, il berce un sombre dessein, que mes dessins maladroits, gribouillés plein d’entrain sur les murs, n’allégeront pas d’un simple appui-main.
En un tournemain, il rajuste ses faces-à-main.
- C’en est fini de toi, une main courante a été déposée et d’une main de fer ! Alors, hauts les mains !
- Pas question ! Je voulais simplement faire la main sur la raison. Peut-être pourrais-je me payer par mes mains…
- Il suffit ! Ton affaire tombe sous la main de lois, maintes et maintes fois mises le marché à la main. Il faut maintenant se salir les mains, plus que par une simple poignée de main. Au bûcher !
- Ah carrément !? On ne pourrait pas se contenter d’un frappe-main pour mettre la dernière main…
- Très drôle, mais nous parlons d’une opération mains propres ! Alors au gibet !
- Au choix, je préfère passer la main.
- C’est entendu. Raoul ! Pour avoir la main leste, tu passes première main !
L’interpellé se lève du banc et gagne le parloir, accompagné de Gabriel, faisant tournoyer sa matraque d’une main experte. Toute cette histoire à belles mains armées m’a fatigué…
Je ne sais pas pourquoi, mais mes mains picotent. Et tandis que je mets la main à la plume pour un dernier trait d’esprit, voilà que je comprends enfin. Une dernière fois, la raison me force la main :
- Les pieds suffisent quand on n’a plus de mains ! (35)
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