Résoudre les malentendus
Le soleil brillait sur mes vieux volets, et je me réveillai doucement, profitant de la chaleur qui inondait la pièce. C'était dimanche, une journée sans rendez chez le psychiatre ni devoir à rendre. Une journée pour profiter de New York et de mes amis. Je me levai de mon lit et m'approchai de la fenêtre pour observer les passants matinaux. Les feuilles dorées des arbres dansaient au gré du vent et du passage irréguliers des voitures dans la rue.
Je pris mon téléphone qui reposait sur ma table de chevet. Trois messages et un appel manqué attendaient mon attention, mais je n'avais pas encore le courage de m'y attarder. Mes pensées retournaient à la soirée précédente à la réaction excessive de Julie envers Tiffany. Je me sentais responsable de cette situation. Le son de la guitare d'Adam émanait de sa chambre. Je pris le livre que je lisais actuellement et me plongeai dans sa lecture.
Le soleil frappait maintenant sur ma fenêtre, et j'étais plongé dans ma lecture de Macbeth depuis une heure lorsque Adam apparut à ma porte.
- Mec, j'ai une proposition à te faire, annonça-t-il avec entrain.
- Je t'écoute, répondis-je, le regard fixé sur la page que je lisais.
- On est dimanche, il fait beau. Est-ce que ça te tente d'aller bruncher à l'extérieur ? On invite nos amis et on passe une bonne journée.
- Bonne idée. Tu te charges de contacter Matthew et Chloe et je m'occupe de Gwen, Julie et Tiffany.
- Euh, tu es sûr pour Tiffany ?
- Oui, j'ai parlé avec Julie avant de m'endormir.
- D'accord, je te laisse t'en occuper, répondit-il en refermant la porte.
Je terminai le chapitre de mon livre que je posai sur la table de chevet en prenant mon téléphone. Il était temps de m'occuper de mes notifications, de gérer ma sociabilité. Je décidai de commencer par l'appel manqué. Il s'agissait de ma mère évidemment.
- Coucou, mon chéri, comment s'est passée ta semaine ? s'empressa-t-elle de demander.
- Coucou, maman, j'ai passé une très bonne semaine. J'ai décidé de me faire suivre par un psychiatre depuis notre dernier appel, et j'ai rencontré une amie qui s'appelle Tiffany. On fait du jogging ensemble tous les samedis matin.
- C'est génial, tu as beaucoup progressé depuis que tu vis à New York, répondit-elle.
- Merci, maman. Et je voulais te dire que je suis ravi que tu sois avec Andrew.
- Merci, mon chéri. Je te laisse, je dois me rendre au restaurant. Je t'aime.
- Je t'aime.
Je soufflai. Ce court instant n'avait pas été facile à vivre. Immédiatement, je me demandais si j'avais inquiété ma mère en parlant de mes rendez-vous avec le psychiatre. Je n'aurais peut-être pas dû lui en parler. Je repensai au fait que l'on s'était promis de ne rien se cacher depuis mon harcèlement, et je me retrouvais en porte-à-faux face à ma culpabilité grandissante.
Je repris une grande bouffée d'air pour me plonger maintenant dans les messages que j'avais reçus. Il y avait deux messages de Tiffany et un de Gwen. Pourquoi avais-je un mauvais pressentiment ? Je commençai par celui de Gwen, qui était court mais efficace.
Marc, tu fais le con !
Simple, rapide, direct. Elle devait probablement parler de la situation d'hier soir. Ce n'était qu'un malentendu, surtout que l'on avait échangé avec Julie depuis. Devais-je me sentir responsable voire coupable de quoi que soit d'autre ? Dans le doute, une seule réponse convenait.
Pourquoi ?
Quelques secondes plus tard, elle avait répondu par un seul et unique mot.
Tiffany !
C'était donc toujours cela le problème. Je décidai de donner la réponse la plus sincère et véridique possible.
C'est une amie ! Je n'ai pas les mêmes sentiments pour Julie et je pense que tu t'en doutes, non ?
Quelques minutes plus tard...
Tu en es sûr ? Bon, je te crois, mais si tu lui fais du mal, je m'occuperai de toi !
Décidément, elle n'était pas du genre à se laisser marcher sur les pieds, et je trouvia cela très touchant qu'elle se préoccupe du bien-être de sa meilleure amie. Il restait maintenant que deux messages du même et unique destinataire : Tiffany.
Marc, je pense qu'il ne faut pas que l'on revoie à l'avenir.
Un premier message qui me fit extrêmement mal. Un sentiment d'abandon, la révélation d'échec apparut à mesure que je lisais ses mots. J'entrepris de lire la suite.
J'ai été ravie de te porter secours et j'ai passé une bonne matinée à courir avec toi. J'étais seule à New York et pouvoir partager cet instant avec quelqu'un était agréable. Mais, j'ai très mal vécu la soirée. Julie ne semblait pas m'apprécier, et je l'ai bien ressenti.
La solitude me frappa en pleine face. Je lui avais fait vivre la même situation que j'avais vécue lors de mes années de College. Elle avait été jugée, observée et dénigrée, et je n'avais rien fait, participant involontairement à cette sentence. Les remords me bouffaient les entrailles, les souvenirs remontaient à la surface, les regards pesants de mes bourreaux tournaient autour de moi. Je ne pouvais pas laisser la situation s'éterniser, mais je ne pouvais agir seul. Adam aurait probablement les mots justes pour m'aider à désamorcer le conflit.
Je me levai et me dirigeai immédiatement vers sa chambre. Il était déjà en train de se préparer, mettant du gel dans ses cheveux.
- Alors, me lança-t-il.
Je lui montrai mon téléphone avec les messages que j'avais reçus de la part de Tiffany.
- Je t'avais prévenu, conclut-il en me regardant.
- Qu'est-ce que tu veux déjà, dit-il d'un ton paternaliste.
- Je ne veux pas perdre Julie.
- Donc, oublie Tiffany, balança-t-il sans remords.
- Mais je l'apprécie en tant qu'amie, et elle m'a secouru. Je ne vais pas l'abandonner, lançai-je comme argument.
- Tu as rassuré Julie à ce sujet ? me questionna-t-il.
Je lui montrai le message que je lui avais envoyé.
- Bon, ce n'est pas si catastrophique, mais tu vas devoir lui prouver par des gestes. Les mots, c'est bien, mais cela peut rester des paroles en l'air.
- D'accord, mais je réponds quoi à Tiffany ?
Adam se mit à faire les cent pas dans le petit espace qui était disponible. Un silence pesant emplit la pièce, et je n'osais rien dire en attendant qu'il trouve une solution à mon problème. Ce fut qu'au bout de cinq minutes qu'il s'arrêta. Il se mit alors à taper sur mon téléphone à toute vitesse puis me le rendit, je regardai l'écran :
Coucou Tiffany, je suis désolé et je t'avoue ne pas avoir compris le comportement de Julie. J'en ai parlé avec elle cette nuit car tu comptes à mes yeux et je n'ai pas apprécié son comportement. Est-ce que tu veux venir avec nous tous pour un brunch ? Je t'assure que ce ne sera pas comme hier soir.
C'était parfait, il n'y avait pas à dire, Adam était bien plus doué que moi concernant la sociabilité. Ma naïveté m'avait amené dans une situation complexe à résoudre, et mon colocataire m'apportait une solution en quelques minutes. J'appuyai sur le bouton, mon message partit, et mon anxiété me frappa le visage immédiatement. Des secondes s'écoulèrent, des minutes, et je restai là immobile à attendre une réponse. Adam, lui aussi, n'osait pas bouger. Mon téléphone vibra.
Je ne sais pas. En es-tu sûr ? Je ne veux pas me retrouver dans la même situation.
J'étais dans de beaux draps... Je montrai le message à Adam, qui me sourit en le lisant.
- Eh bien, voilà, s'exclama-t-il.
Il me prit le smartphone des mains et se mit à tapoter à vive allure, puis me le rendit tout fier. Je regardai l'écran avec curiosité.
Promis, tout se passera bien.
Quelques secondes...
Ok, envoie-moi l'adresse. A tout à l'heure, bisous.
Je soufflai de soulagement, reconnaissant le talent d'Adam pour résoudre les problèmes sociaux. J'avais maintenant une chance de rectifier la situation. Mon amitié avec Tiffany n'était pas perdue, et j'avais l'espoir de regagner la confiance de Julie. La journée s'annonçait pleine de défis, mais au moins j'avais une opportunité de faire les choses correctement.
- Merci, mec. Tu as vraiment l'art de gérer les situations sociales, le remerciai-je chaleureusement.
Il haussa les épaules avec un sourire.
- C'est ce que les amis sont censés faire, non ? Maintenant, il faut que tu t'assures que tout se passe bien lors du brunch. Sois à l'écoute, réconforte Tiffany, et montre à Julie que tu es sincère.
Je hochai la tête, déterminé à suivre ses conseils. J'envoyai rapidement l'adresse du lieu du brunch à Tiffany et la rassurai une fois de plus que tout se passerait bien.
Après cela, j'entendis Adam prévenir Matthew et Chloe de notre plan pour le brunch. La journée s'organisait rapidement, et l'excitation grandissait.
Pendant ce temps, j'avais encore deux messages en attente, un de Gwen et un de Julie. J'ouvris d'abord le message de Gwen.
Envoie-moi l'adresse du brunch. On règle ce problème une bonne fois pour toutes.
Je souris, reconnaissant sa détermination à régler la situation et à protéger son amie. J'envoyai rapidement l'adresse du restaurant, et elle me répondit pour confirme sa présence. Les choses semblaient avancer.
Puis, je me tournai vers le message de Julie, appréhendant sa réaction.
Marc, je suis heureuse avec toi, et je te fais confiance. J'espère que tu dis la vérité. Je ne veux pas te perdre.
Je fus soulagé de voir que Julie était prête à me faire confiance. Je pris quelques secondes pour lui répondre :
Je suis heureux aussi. Je ne te décevrai pas, je te le promets.
La matinée se déroula rapidement, et bientôt l'heure du brunch arriva. Nous nous retrouvâmes tous au lieu convenu, Tiffany incluse. L'ambiance était détendue, et tout le monde semblait prêt à laisser derrière eux les malentendus de la vieille.
Tiffany et Julie se retrouvèrent face à face, et elles eurent une conversation privée pour dissiper les malentendus et les tensions. Pendant ce temps, le reste d'entre nous échangea des anecdotes amusantes, riant et appréciant la journée ensoleillée.
A la fin du brunch, les filles semblaient être sur de meilleures bases. La journée s'était déroulée sans accroc, et je sentais un grand soulagement en réalisant que j'avais pu corriger la situation. J'avais retrouvé la confiance de Julie et le début de notre amitié avec Tiffany était sain et sauf.
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