L'impasse

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Trois mois avaient passé depuis la première réunion dans le bureau majestueux du Recteur. Les participants se retrouvaient, chacun portant en lui l'attente des résultats, l'excitation de la découverte ou la crainte de l'invalidation.

Johanna, mêlant excitation et anxiété, arriva en avance sur le campus. Dans l'attente, elle se dirigea vers la cafétéria. Là, elle repéra John, en pleine discussion avec la serveuse, peut-être celle qu'il avait défendue contre l'étudiant en droit indélicat. Semblant ignorer l'heure de la réunion, John était plongé dans une conversation animée. Elle s'approcha discrètement, tentant d'intercepter quelques mots de leur échange.

John, avec un sourire en coin, lança à la serveuse : "Vous savez, le café est mon antidote préféré aux théories qui volent en éclats. Une tasse, et tout s'éclaire, même les mystères de l'univers !" La serveuse, amusée, répliqua : "On dit que la vérité est au fond de la tasse. Peut-être que votre théorie y prendrait racine avec une cuillerée de sucre en plus !"

Un quart d'heure avant la réunion, Johanna se dirigea vers le bureau du Recteur, hésitant à rappeler l'heure à John. Finalement, craignant d'être intrusive, elle abandonna l'idée. Devant le secrétariat, elle fut rapidement escortée dans le bureau du Recteur. Elle entendait des brides de conversation entre le Recteur et le Dr Richardson qui provenaient de l'antichambre.

Quelques instants plus tard, les deux hommes la rejoignirent. Le Recteur, regardant sa montre, indiqua qu'ils attendaient toujours John. Johanna regretta de ne pas l'avoir interpelé plus tôt. Elle s'apprêta à dire qu'elle avait vu John se dirigeant vers le bureau du Recteur pour gagner du temps. Elle se ravisa car John entra, les mains dans les poches, semblant inconscient de l'heure.

Les salutations d'usage passées, le Dr. Richardson, regardant Johanna avec un air triste, avoua qu'il n'avait pas de bonnes nouvelles. Sur la table de conférence étaient étalés des documents d'archives et des images grand format. Le Dr Richardson commença d'une voix calme et posée : "Johanna, après avoir croisé et comparé les travaux de votre père avec de nombreuses sources, je n'ai trouvé aucune corrélation scientifique ou historique. Je n'ai trouvé aucune mention d'une telle hypothèse dans la documentation académique et scientifique."

Johanna, cherchant des réponses, demanda : "Mais avez-vous vérifié toutes les sources possibles? Mon père croyait en cette théorie."

Le Dr. Richardson, tentant d'expliquer, répondit : "J'ai fouillé autant que possible, mais aucune base scientifique ne soutient cette hypothèse. Il est difficile de remettre en question des décennies de connaissances établies."

Le Dr Richardson, visiblement concerné par la tournure de ses découvertes, regarda Johanna avec une lueur de déception dans les yeux : "Johanna, j'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour vérifier la validité de la théorie de votre père. Par acquis de conscience, j'ai consulté plusieurs collègues dans d'autres universités et instituts de recherche. Leurs réponses ont été unanimes : aucune trace de théories similaires dans les articles académiques."

Johanna, espérant un éclaircissement, interrogea : "Avez-vous trouvé quelque chose d'exceptionnel dans vos recherches?"

Le Dr Richardson, secouant légèrement la tête, répondit : "Quelques collègues ont évoqué des films documentaires qui présentent des théories sur des civilisations avancées disparues. Ces documentaires suivent toujours une trame similaire : un monument extraordinaire ou une machine mystérieuse, suivi immédiatement de spéculations sur des techniques avancées ou des interventions extraterrestres. J'ai pris la peine de contacter les producteurs de ces documentaires, mais leurs bases scientifiques sont fragiles. Ils négligent les analyses contraires et sélectionnent uniquement ce qui confirme leur théorie."

Il continua : "Par exemple, ils prétendent que des cités ef des monuments ont été construits le long d'une parfaite ligne droite traversant continents et océans. Pour prouver leur théorie, ils prennent 3 ou 4 cités et monuments importants effectivement alignées, mais négligent les 10 autres qui ne sont pas alignés du tout. On ne montre que ce qui valide la théorie, ce qui est contraire à toute preuve scientifique."

Johanna, perplexée, demanda : "Y a-t-il des éléments dans ces documentaires qui pourraient soutenir la théorie de mon père?"

Le Dr Richardson, baissant les yeux, expliqua : "Malheureusement, non. Même en tenant compte de leurs sélections partiales, aucune preuve solide ne corrobore la théorie du Dr Anderson. Après une analyse scientifique approfondie, je n'ai rien trouvé de plausible."

Le soupir du Dr Richardson résonna dans la pièce, signifiant la déception d'un scientifique face à l'absence de validation pour une théorie autrefois prometteuse.

Le Recteur, curieux mais réservé, se tourna vers John, qui, un instant hésitant, cherchait la meilleure manière de commencer sa démonstration.

John, se raclant légèrement la gorge, entama : "Face à l'absence de preuves tangibles, j'ai tenté de recréer la situation de la météorite avec des simulations. Permettez-moi de vous montrer."

N'ayant aucun document, il demanda l'autorisation d'utiliser l'installation de projection. Le Recteur s'apprêtait à appeler le secrétariat pour enclencher le dispositif de projection quand John, pressant une série de boutons et sortant son mobile, prit les devants. Quelques secondes plus tard, une image 3D du globe terrestre tournant sur son axe se stabilisa sur l'écran de projection, semblable à l'image que l'on voit sur Google Earth.

John, animé, expliqua : "Ce globe en 3D n'est pas uniquement un assemblage d'images satellite, mais aussi une simulation de notre planète, avec des représentations estimées de la densité et du volume de la croûte terrestre, des océans, du manteau et du cœur de notre planète." Il dirigea ensuite son pointeur vers un objet sur la droite de l'écran : "Et voici la météorite, modifiable en densité, volume, vitesse, position et angle de chute."

Il lança la première série de simulations avec une petite météorite de la taille d'une orange : "Regardez bien, la météorite pénétre profondément dans le sol en créant un petit cratère en surface."

Dans un dialogue avec le Recteur, John expliqua : "Aucune variation d'angle ne change fondamentalement le résultat, si ce n'est la forme du cratère et la trajectoire de la météorite dans le sol."

Johanna, intriguée, interrogea : "John, est-ce que la taille de la météorite influence la profondeur du cratère de manière significative?"

John répondit doctement: "J'y viens". Il poursuivit avec une deuxième série de simulations en prenant cette foi-ci une grosse météorite de la taille d'une montagne : "voyez, l'impact provoque une explosion au sol en créant un cratère de plusieurs kilomètres de diamètre et détruit tout ce qui se trouve dans la périphérie du cratère comme si une bombe nucléaire avait explosé. Notez l'impact dévastateur, mais aucun glissement de terrain périphérique, même avec des angles de chute différents."

Johanna, cherchant à comprendre, demanda : "John, dans ces simulations, avez-vous pris en compte d'autres facteurs qui pourraient influencer le glissement de terrain, comme la composition du sol?"

John pris un air admirateur du genre "Bien vu mon cher Watson !" pour continuer : "J'ai utilisé pour le simulation des paramètres secondaires tels que la composition des couches géologiques, leur viscosité, leur température, etc."

En terminant la dernière série de simulations avec une météorite de plus en plus grande, John conclut sa démonstration : "J'ai lancé des simulations pendant 48 heures en faisant varier de manière aléatoire densité, volume, vitesse et angle de chute de la météorite. Aucune simulation n'a provoqué le moindre glissement de terrain."

Le silence s'installa, chaque mot de John résonnant dans la pièce, marquant la fin d'une quête infructueuse.

Le Recteur résuma la situation : "Johanna, les recherches du Dr. Richardson et les simulations de John n'ont malheureusement pas permis de valider la théorie de votre père." Il réfléchit un instant avant de poursuivre : "Pour ma part, je m'étonne que, si une civilisation avancée avait existé, elle n'ait pas laissé de traces ailleurs en se disséminant sur d'autres territoires comme l'on fait d'autres civilisations."

Il demanda aux participants leur point de vue concernant la suite à donner à leurs analyses et attentes.

Johanna, reconnaissante du sérieux accordé par l'université à la théorie de son père, pris la parole la gorge un peu serrée : "Monsieur le Recteur, Professeur Richardson, John, je vous remercie de tout coeur au nom de mon père du professionalisme du sérieux avec lesquels vous avez étudié la théorie de mon père. Au fond de moi, j'espérais que sa théorie soit validée et reconnue par ses paires, mais je suis maintenant apaisée sachant que son hypothèse ait été prise au sérieux. Je ne veux pas m'acharner dans une quête sans fin et vous propose par conséquent d'arrêter les recherches."

Les autres participants acquiescèrent, et l'hypothèse du Dr. Anderson fut ainsi refermée, emportant avec elle l'ombre persistante d'une énigme irrésolue.

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