Retour au château

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J'ouvre les yeux. Le soleil brille dans le ciel et ses rayons nous parviennent à travers les branches des pins qui nous entourent. En tournant la tête, je vois Kaï, qui me tient toujours serrée contre lui. Il est déjà réveillé et contemple silencieusement l'horizon. En me sentant bouger, il se tourne vers moi et m'adresse avec un sourire :

- Bonjour. Vous avez bien dormi ?

Quelque chose ne va pas . . . Son regard n'est pas aussi calme et paisible que d'habitude et son sourire semble un peu forcé. De plus, sa respiration est un peu plus forte qu'à l'ordinaire. Je pose une main sur son front. Il est si chaud ! Je demande à mon époux, inquiète :

- Comment vous sentez-vous ?

- Bien, pourquoi ?

- Vous mentez . . . lui dis-je sur un ton de reproche.

Il a un petit rire qui sonne faux et répond à ma phrase par ces questions :

- Pourquoi vous mentirais-je ? N'ai-je pas toujours été franc avec vous ? Pourquoi doutez-vous de moi maintenant ?

Il ne me laisse pas le temps de rétorquer en se levant et en déclarant :

- Nous ferions mieux de reprendre notre marche si nous voulons rentrer rapidement au château.

Il tourne les talons et s'éloigne. Je me lève à mon tour et lui emboite le pas.

Nous quittons la forêt et retournons au bord du fleuve pour continuer à le longer comme nous l'avons fait la veille. La neige craque sous nos pas et le vent nous fouette le visage, nous assaillant de son froid mordant.

La faim se fait bientôt sentir. Nous n'avons rien mangé depuis les pêches de la veille et celle qu'a avalée le roi de l'eau semble commencer à faire effet car il semble de plus en plus essoufflé. Je repense au message de mon père et m'arrête net. Dans une semaine, c'en sera fini de lui . . .

En remarquant que j'ai cessé d'avancer, mon époux s'arrête à son tour et se tourne vers moi pour me demander :

- Est-ce que tout va bien ?

- Oui, répondé-je d'une voix tremblante.

Il s'approche de moi et dit d'un air sérieux :

- On ne dirait pas . . .

Il fronce légèrement les sourcils. Je le fixe du regard sans rien dire. Se doute-t-il de quelque chose ? Il poursuit d'un air plus détendu :

- Vous avez faim, n'est-ce pas ?

- Oui, enfin, juste un peu . . .

- Suivez-moi.

J'obéis et il se dirige à nouveau vers la forêt. Il examine quelques arbsutes avant de déclarer :

- C'est bon, j'ai trouvé. Venez voir.

Je m'approche et il cueille une baie bleue qu'il me tend :

- Tenez, vous pouvez en manger. Je sais que ce n'est pas un repas très copieux, mais la nourriture se fait rare en hiver. Désolé.

- Ne vous excusez pas. Ce n'est pas de votre faute.

Je prends le fruit qu'il me tend et le mets dans ma bouche. Nous mangeons de ces baies jusqu'à calmer notre faim. Nous sommes sur le point de repartir lorsque nous entendons un grognement dans notre dos. Nous nous retournons pour faire face à un grand loup au pelage gris. Il nous observe de ses petits yeux sombres en montrant férocement les crocs. Nous constatons bientôt qu'il n'est pas seul. Ses congénères sortent de derrière les arbres et nous encerclent.

Kaï déclare :

- C'était à prévoir. Le gibier se fait si rare en hiver que les loups finissent par s'en prendre aux hommes qu'ils fuient d'habitude.

- Que faire ? lui demandé-je dans un murmure.

- Il ne faut surtout pas fuir. C'est ce qu'ils attendent de nous. Les loups chassent par la traque, en poursuivant leurs proies jusqu'à leur tomber dessus.

- Il ne nous reste donc plus qu'une seule option . . .

- Oui, leur faire face jusqu'à ce qu'ils se détournent de nous.

Je peux lire courage et détermination dans le regard de mon époux. Il est si brave ! J'admire son attitude.

Les loups continuent de se rapprocher lentement en grognant de façon menaçante. Il suffit d'un seul mouvement de notre part pour qu'ils passent à l'attaque. Nous restons donc immobiles, attendant patiemment qu'ils s'éloignent, mais ils n'en font rien. Au contraire, ils se rapprochent inexorablement. Je me dis alors que s'ils sont vraiment affamés et qu'ils ont des petits à nourrir, ils n'hésiteront pas à se jeter sur nous, peu importe ce que nous ferons. Il n'y a qu'une seule chose qui les fera fuir . . .

Sans crier gare, je me sers de ma maitrise du feu pour faire apparaitre un long fouet brûlant avec lequel je balaye les environs. Les animaux reculent en sursaut et leurs oreilles s'abaissent, signe qu'ils sont à la fois contrariés et effrayés. Je ne m'arrête pas et finis par en toucher un dont le pelage prend feu. Il hurle de douleur et se roule dans la neige pour éteindre la flamme qui le consumme, avant de rejoindre ses congénères qui s'éloignent en courant.

Je me tourne ensuite vers le roi de l'eau, qui me fixe avec étonnement. Il ne s'attendait visiblement pas à une telle réaction de ma part, mais finit par me féliciter en souriant :

- Bien joué, Oriane. Vous avez eu le bon réflexe. Merci beaucoup.

Ses mots me font plaisir, mais je ne parviens pas à m'en réjouir en remarquant la façon dont il les prononce. Il semble exténué, lui qui est d'ordinaire si plein d'énergie !

Il tourne les talons et quitte la forêt pour continuer à longer le fleuve. Je le suis et nous continuons ensemble notre progression. Je remarque cependant que plus le temps passe, plus il ralentit la cadence. Je vais à son rythme pour rester à ses côtés.

Nous apreçevons bientôt le château de glace à l'horizon. Je m'exclame alors à l'intention de mon époux :

- Regardez ! Nous sommes presque arrivés !

Il se contente de sourire, mais continue à avancer. Ce n'est que lorsque nous arrivons devant les deux fontaines gelées qui délimitent l'entrée des jardins qu'il dit enfin, en souriant :

- Nous sommes arrivés. Je vous ai ramenée à la maison.

Il s'effondre aussitôt, tombant lourdement sur l'épaisse couche de neige. Je pousse un cri de surprise et m'agenouille précipitamment à ses côtés en l'appelant :

- Kaï ! Kaï ! Vous m'entendez ? ! Répondez-moi, je vous en prie !

Il ne réagit pas. Je le prends dans mes bras et touche son front. Il est brûlant et couvert de sueur ! C'est à se demander comment il est parvenu à rester debout jusqu'à là !

Prise de panique, je crie de toutes mes forces :

- À l'aide !

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