Direction le royaume de la terre

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Le roi de l'eau est toujours inconscient, dans son lit, entouré de médecins. Ces derniers l'examinent tout en discutant entre eux. L'un d'eux finit par se tourner vers moi pour déclarer :

- Il a une forte fièvre qui doit être causée par les nombreuses heures qu'il a passées dehors dans le froid. Il devrait bientôt se rétablir si on lui offre les soins nécessaires.

- Il faut préparer un remède à base d'écorce de saule, déclare son confrère. C'est ce qu'il y a de mieux contre la fièvre.

Non, l'écorce de saule sera inutile, je le sais. Cette violente fièvre est causée par le fruit d'un démon. Un simple arbre ne peut rien contre cela. Oh, mais que faire alors ? !

J'enfouis mon visage dans mes mains. Je me sens si mal . . . Je regrette tant ce que j'ai fait ! Le roi de l'eau est en danger de mort par ma faute ! Il faut absolument que je répare mon erreur, mais comment ?

Je ne sais pas ce que je dois faire et je n'ai personne à qui demander conseil . . .

Un instant ! Si, il y a peut-être quelqu'un . . .

Je quitte la chambre de mon époux et me précipite dans mes appartements. J'entre dans ma chambre à la volée et ouvre le tiroir de ma table de chevet. La voilà ! La corne que m'a offerte mon amie Éoline.

Je la prends et me dirige vers mon balcon, puis souffle dedans de toutes mes forces. Le son que je produis résonne dans les environs avant de se perdre en un long et lointain écho. J'observe le ciel, priant de toutes mes forces pour qu'elle arrive au plus vite.

Quelques minutes plus tard, je vois un immense aigle approcher. Il se pose gracieusement sur mon balcon et la Gardienne de la cité de l'air en descend. Elle me serre dans ses bras en m'adressant chaleureusement ces mots :

- Bonjour, Oriane. Comment vas-tu ?

- Je vais bien, mais ce n'est pas le cas de mon époux.

- Le roi de l'eau Kaï ? Qu'est-ce qu'il a ?

- Oh, Éoline ! J'ai commis la plus grave erreur de toute ma vie !

- Raconte-moi, que s'est-il passé ?

- L'objectif de mes parents était de profiter de ce mariage pour se débarrasser du roi de l'eau. J'ai reçu d'eux un colis, hier. Il contenait plusieurs pêches, parmi lesquelles une qui est un don du démon du feu. Je l'ai faite manger à Kaï et il est maintenant souffrant ! Il ne lui reste plus que six jours à vivre !

Les yeux bleus de mon amie s'écarquillent d'horreur à l'entente de cette annonce. Elle s'exclame :

- C'est terrible ! Il faut agir au plus vite !

- Oui, mais je ne sais pas ce que nous pouvons faire pour le sauver.

Un silence pesant s'installe. Chacune de nous réfléchit de son côté aux options que nous avons. Éoline finit par déclarer :

- Je sais ce que nous pouvons faire. Nous devons nous rendre au royaume de la terre.

- Pour quoi faire ?

- C'est la terre qui conserve la mémoire de notre histoire. Ce n'est pas en contemplant l'eau, le feu ou l'air que l'on découvre et comprend notre passé, mais en observant la terre. Je suis sûre que c'est le seul endroit où nous en saurons plus sur ce fruit et les moyens de contrer son effet.

- Ne serait-il pas plus logique de nous rendre à l'Empire du feu ? C'est de là que vient cette pêche après tout . . .

- Est-ce que tu penses que tes parents accepteront de nous révéler le moyen de sauver leur ennemi ?

- Non, mais . . .

- Fais-moi confiance, dit-elle en prenant mes mains dans les siennes. Je ferai tout pour t'aider à sauver le roi de l'eau Kaï.

Son visage dégage une expression de pleine assurance. Je ne peux que la croire. C'est l'une des particularités d'Éoline : quelle que soit la situation, elle reste calme et réfléchie et on ne peut que se sentir apaisé à ses côtés.

Elle poursuit :

- Nous devons partir au plus vite. Nous décollerons dès que tu seras prête.

- D'accord, j'arrive. Laisse-moi juste un instant.

Je tourne les talons et me rend dans l'antichambre du roi où sont réunis tous les courtisans et toutes les courtisanes, visiblement inquiets pour leur monarque. Je m'approche de ma dame d'honneur, qui attend patiemment des nouvelles du souverain aux côtés de sa fille, et lui dis :

- Madame Delaigue, j'ai à vous parler.

- Oui, Votre Majesté ? m'adresse-t-elle en me faisant la révérence.

- Je vais partir pour le royaume de la terre avec mon amie la Gardienne de la cité de l'air Éoline afin de chercher un remède pour le roi de l'eau. En attendant, je compte sur vous pour veiller sur notre pays.

- Votre Majesté, je ne suis pas qualifiée pour un tel rôle . . .

- Si, vous l'êtes. Vous êtes la femme la plus sage et la plus sensée de ce royaume. Je ne peux confier une telle tâche à n'importe qui d'autre. Je compte sur vous, Madame Delaigue.

- Je ferai tout mon possible, Votre Majesté, mais, si vous me le permettez, vous ne devriez pas voyager sans une garde. Le roi de l'eau ne voulait jamais sortir avec la sienne et voyez le résultat . . .

- Je ne serai pas seule et une garde me ralentirait. Faites-moi confiance, tout comme je vous fais confiance.

Elle me fixe, bouche bée, visiblement surprise par mes compliments et la foi que j'ai en elle. Cependant, elle en semble aussi touchée. Les autres courtisans nous observent avec des yeux ronds, médusés.

Je tourne les talons et retourne précpitamment dans mes appartements. Je me rends dans ma garde-robe pour prendre une cape que j'enfile, puis vais sur mon balcon où m'attend toujours Éoline avec son aigle. Elle me demande :

- Ça y est ?

- Oui, c'est bon. Nous pouvons y aller.

- Bien, monte, dit-elle en me tendant la main.

Je la prends et elle se sert de sa maitrise de l'air pour nous propulser sur le dos de son majestueux animal. Elle attrape ensuite les rênes et donne deux légères tapes sur le dos du volatile, qui déploie aussitôt ses ailes pour s'envoler dans le ciel.

Il fait bien plus froid en altitude et je resserre le tissu de ma cape contre moi pour m'en protéger. Le vent fouette nos visages et joue avec nos longs cheveux. Je ferme les yeux en espérant que le voyage jusqu'au royaume de la terre ne sera pas trop long et qu'on y trouvera ce qu'on cherche. Il le faut car le temps nous est compté. Il ne nous reste plus que six jours pour sauver le roi de l'eau Kaï . . .

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