Chapitre XLVII (1/2)

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Le réveil fut difficile… Très difficile, même ! Mon esprit avait la célérité d’une limace, mon cerveau semblait se débattre dans du coton baigné d’acide sulfurique et j’avais dans le crâne une barre brûlante comme la vergue de grand-voile sous un soleil de canicule. Lorsque j’ouvris péniblement les yeux, je perçus vaguement les lumières du dehors à travers la porte ouverte de la voilerie, et une voix, mi-inquiète, mi-moqueuse, qui répétait mon prénom comme on perd gentiment patience devant un enfant capricieux.

Orcinus était assis près de moi, sa main gauche tentait de me faire émerger du sommeil en me touchant l’épaule, tandis que de la droite, il tenait un petit plateau sur lequel reposaient un verre à anse, une assiette alléchante et une petite cruche en terre cuite.

« - Lumi… Tu m’entends ? Lumi !

- …

- Allez, réveille-toi.

- Hmmmm…

- Tu vas être en retard à l’école.

- Voilà une phrase que je n’avais pas entendue depuis mon enfance ! Et encore, l’école était à la maison, il était très facile d’être à l’heure… D’ailleurs, c’est pareil ici, je n’ai que dix mètres à faire.

- Si tu arrives à te lever, oui. Parce que tu n’as pas l’air en forme. Tu veux que j’aille demander à Milos quelque chose pour te requinquer ?

- Non… Merci, Orci, ça ira. Milos a certainement déjà du travail avec Perkinsus et Tempetus !

- Ah ! Vous avez bien profité de votre soirée ?

- Oh oui ! Je les aime beaucoup, tu sais.

- …

- Tu as apporté à manger ?

- Oui. Je me suis dit que tu aurais besoin d’éponger un peu… Tiens.

(Il posa le plateau sur mes genoux : lait de baleine bleue, rillettes de saumon et pain de maïs grillé. J’entrepris, très doucement, en me forçant un peu, de grignoter quelques grammes. Puis n’en pouvant plus, je posai le tout au pied du lit et pris la main d’Orcinus.)

- Merci pour le petit-déjeuner…

- De rien.

- …

- Je t’ai cherchée, hier soir.

- Vraiment ? Alors viens là…

(Je l’attirai vers moi, il s’allongea tout près et je le pris dans mes bras. Il enfouit son visage dans le creux de son cou et je souris sous la chatouille de son souffle.)

- …

- Tu sais, hier, Alexandrius m’a dit que je n’avais plus besoin de cours de langue.

- Il a raison, tu t’exprimes de mieux en mieux… Je vais pouvoir te parler Lointain, alors.

- Si tu veux… D’ailleurs, et toi, pourquoi parles-tu si bien le champarfaitois ? Ton accent est bien plus léger que celui des autres, par moments on le devine à peine.

(Il répondit en Lointain, son phrasé se fit plus doux, plus mélodieux.)

- Je l’ai appris à l’école, comme tes petits élèves aujourd’hui, même si notre professeur n’était pas un natif, contrairement à toi. Et puis j’ai toujours entendu plusieurs langues autour de moi, peut-être que ça aura joué.

- Tu parles aussi la langue de Muraena ?

- Oui.

- Et celle de Milos ?

- Pas trop mal.

- Et l’héliopoli ?

- Bien sûr. Nous apprenons tous l’héliopoli et le champarfaitois, puisque ce sont les pays où nous jouons le plus, où nous nous arrêtons le plus.

- Ça fait toutes les langues du monde !

- Du monde connu, en tout cas.

- Moi, je ne parle que le champarfaitois.

- Et le Lointain, désormais ! C’est très rare, tu sais : nous apprenons les langues des autres mais la réciproque n’est pas vraie.

- …

- A propos de langue, Lumi… »

Il m’embrassa d’un air innocent fort peu crédible, et je le serrai encore plus fort contre moi, laissant mes mains explorer ses hanches et le creux de son dos avec une pudeur toute relative.

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