Chapitre 30 : USB
Ce matin-là, Samara avait décidé qu’il fallait rendre sa clé à la jeune fille. C’est pourquoi, Slany et elles se retrouvaient dans le froid, à chercher l’adolescente. Après plusieurs minutes de marche, elles parvinrent à l’endroit de la dernière fois.
- Tu crois qu’on va la trouver ? demanda Samara.
- Mais oui, et puis, si on ne la voit pas aujourd’hui, on reviendra demain, la rassura la rousse en se collant à elle.
- Hum…
Elles décidèrent de se promener un peu dans le parc.
- Oh ! Des chocolats chauds ! Sam’ ! s’écria Slany en sautillant.
- Oui, quoi ? s’étonna-t-elle.
- Tu m’en achètes un ? questionna l’adolescente en la suppliant du regard.
Samara tenta de résister mais c’était peine perdue, quelques minutes plus tard, elles avaient toutes les deux un gobelet de chocolat et Slany arborait un sourire éclatant.
- Merci, Sam’ ! T’es trop la meilleure, s’exclama-t-elle en soufflant sur le liquide.
Samara lui embrassa le front et rigola.
Un peu plus loin, dans son bureau, Isata bouillonnait. Dante venait de lui rapporter quelques petites choses qui ne lui avaient pas vraiment plu. Se pourrait-il que sa fille soit réellement tombée amoureuse de celle qu’il devait tuer ? Non, Samara n’était pas comme ça, elle n’était pas comme elle. Pourtant d’après ce que son bras droit lui avait dit, elles étaient vraiment proches. De plus, elles avaient quitté la planque il y a environ une heure pour se balader. Seules.
- Mais qu’est-ce qui ne va pas chez elle ?! s’exclama Isata en frappant son bureau.
- Isata… Elle est grande, tu sais. Elle est capable de se débrouiller seule, si elle l’aime, c’est quand même pas un drame, soupira Kaitlyn en s’adossant au mur.
- Toi, on t’a rien demandé alors tu te la fermes, ok ?! cracha Dante.
- Ne me donne pas d’ordre, répliqua Kaitlyn.
- Je fais ce que je veux !
- Stop ! Vous croyez que c’est le moment ! s’énerva Isata.
Il savait que Dante et Kaitlyn ne s’étaient jamais supportés, personne n’aurait jamais soupçonné qu’ils puissent être de la même famille, et pourtant, ils avaient les mêmes parents, morts lors d’une guerre de gang, lorsque Dante avait dix-neuf ans et sa sœur, quatorze. Immédiatement, sans leurs parents pour les réprimander, les deux adolescents avaient commencé à se livrer une guerre sans merci. Si Dante s’était autoproclamé bras droit d’Isata lorsque celui-ci avait succédé à son père à seulement vingt-cinq ans, la jeune Kaitlyn, alors âgée de dix-sept ans, avait su prouver sa valeur et sa loyauté au gang et Isata l’avait pris sous son aile, la protégeant ainsi des colères de son aîné. Cependant avoir comme bras droit et second, deux personnes qui se vouaient une haine profonde ne l’aidait pas. Isata ne prenait jamais le parti de l’un ou de l’autre, détestant être mêlé à leurs ennuis, il se contentait d’éviter qu’ils s’entretuent.
Dante et Kaitlyn se fusillèrent du regard tandis qu’Isata se prit la tête entre les mains. Comme s’il n’avait pas assez de choses à gérer : apaiser les tensions entre les deux, aller aux réunions avec ses deux gangs alliés, faire en sorte de ne pas se faire choper par des flics, gérer son petit trafic de drogues, s’occuper de mettre au point un plan pour descendre la jeune Ina et ses camarades par la même occasion, il fallait maintenant que sa fille tombe amoureuse d’elle ! Isata ne pouvait tout gérer, c’était impossible.
- Arrêtez de vous battre, vous me fatiguez, souffla-t-il en leur lançant un regard noir.
Kaitlyn baissa la tête et Dante sourit fièrement. Isata souffla, ce gars était tout de même vraiment dérangé, il avait beau être son meilleur ami, il n’en restait pas moins fou.
- Kate, trouve une solution pour Samara, je t’en prie, l’implora Isata.
- Je m’en occupe, lança-t-elle.
- Dante, il faut qu’on parle, assura-t-il.
Dans le parc, les deux amantes parlaient en riant, se tenant la main. Après quelques minutes de marche, elles aperçurent une jeune fille brune, qui lisait un livre sur un banc, des lunettes sur le nez.
- Sam’, c’est elle ! s’exclama Slany en lui tirant la main pour la faire avancer.
- Euh… bah, vas-y, vas lui donner, souffla l’adolescente en rougissant.
- Non, non, tu vas lui rendre toi. Et t’excuser par la même occasion, assura la rousse.
Elles se plantèrent devant la brune qui releva la tête et recula contre le ban en sursautant.
- Arrêtez ! J’ai rien dis à personne, je vous le jure ! J’ai rien dis ! paniqua-t-elle.
- On veut pas te faire du mal. Je suis désolée pour ce qui s’est passé, je contrôlais plus rien, soupira Samara en se grattant la nuque.
- Rien à faire de tes excuses, tu m’as tabassé alors que j’avais rien fait, et en plus à cause de toi, j’ai perdu un truc, lança rageusement la jeune fille.
- Justement, je voulais te rendre ça, tu l’as fait tomber dans la poche de la veste de ma copine, indiqua-t-elle en lui tendant la précieuse clé USB.
- Ma clé ! s’exclama Addie en jouant la comédie.
Elle s’empressa de l’attraper et de la ranger dans la poche de la veste en cuir qu’elle portait, avant de fusiller les deux filles du regard. Une sensation étrange l’envahissait peu à peu, elle détourna le regard au moment où la rousse s’approcha d’elles pour passer son bras autour de la taille de l’adolescente aux cheveux rouges. Addie partit rapidement rejoindre Jon et Timothée dans leur appartement.
Slany fronça les sourcils, elle en était pratiquement sûre, c’était sa veste que portait la brune. Sa veste. La sienne. Elle avait mis sa veste. Pourquoi ? Tourmentée, la jeune fille se tourna et embrassa sa petite-amie, espérant penser à autre chose.
Isata et Dante étaient pris dans une discussion importante, ce qu’ils ne savaient pas, c’est que la jeune Pantuso écoutait leur conversation derrière la porte.
- Dante, je veux que ça ait l’air d’un accident, pas que tu l’assassines devant tout le monde, compris ? soupira Isata, fatigué de répéter à son bras droit la même chose.
- Mais enfin, Isata, on pourrait faire une exécution publique, pour montrer ce qui arrive aux traitres ! bougonna Dante.
- On pourrait mais non, puisque ce n’est justement pas une traitresse, c’est pour ça que je te demande de le faire, discrètement, fit-il en appuyant bien sur le dernier mot.
- Discrètement, répéta Dante en râlant.
- Ecoutes, si ça ne te conviens pas, je peux demander à Kaitlyn de s’en charger, lança Isata, sachant que cet argument le convaincrait.
De l’autre côté de la porte, Kaitlyn hochait la tête de gauche à droite, pas question. Elle n’était pas une meurtrière et l’idée même de tuer un membre de son clan la répugnait. Elle devait agir, elle ne pouvait pas laisser son horrible frère tuer cet fille dont s’était éprise sa petite sœur.
- C’est bon, Isata, je m’en occuperais dès que tu men donneras l’ordre, souffla le grand baraqué.
En entendant les pas lourds de son frère, Kaitlyn se redressa et s’appuya contre le mur, à côté de la porte. Il sortit et la fusilla du regard.
- Qu’est-ce que tu fous là ?! grogna-t-il.
- Je dois parler à Isata.
Dante partit en lui lançant un regard noir, Kaitlyn soupira puis entra à son tour dans le bureau.
- Isata ? appela-t-elle.
- Hum ?
- Samara n’est pas encore rentrée. Je verrais avec elle plus tard, ok ? lança-t-elle.
- Ouais. Bon, préviens les deux nouveaux qu’ils doivent venir me voir, immédiatement, ordonna-t-il sans la regarder.
- Bien.
La jeune femme quitta la pièce pour se rendre dans le repère des jeunes, elle y trouva les deux adolescents.
- Maxence, Julian. Suivez-moi, le boss veut vous parler, fit-elle en leur faisant un signe.
Lorsqu’ils se levèrent, elle put apercevoir ce qu’ils faisaient. Allongée sur son matelas, la jeune fille aux cheveux châtains dormait, prise dans un sommeil agité.
- Comment elle va ? demanda Kaitlyn, intriguée.
- Bof, elle va s’en remettre, elle est forte, déclara Maxence en déposant un baiser sur son crâne avant de la suivre.
- Qu’est-ce qui lui est arrivé ? questionna-t-elle.
- Bah, le bras droit du boss, Dante, c’est lui qui lui a fait ça, quand il est revenu de sa mission top secrète, affirma Alexander en la fixant.
Kaitlyn déglutit, elle avait l’impression que le jeune homme lisait en elle. Et ça ne lui plaisait pas vraiment.
- Quel nul, souffla-t-elle en entendant que son frère était responsable de l’état de Lise.
- Dante ? Carrément. Vous le connaissez depuis longtemps ? demanda Lenny.
La jeune femme rigola nerveusement en se frottant le bras droit, là où se trouvait la cicatrice des premières violences de son frère.
- C’est mon frère, fit-elle tout bas, laissant les deux garçons sans voix.
Ils arrivèrent devant le bureau d’Isata.
- Approchez, ordonna l’asiatique en fermant le dossier sur lequel il travaillait.
Alex et Lenny entrèrent. La porte se referma derrière eux. Isata leur sourit en posant ses mains sur le porte-documents. Les agents auraient-ils pu se douter que cette pochette contenait la photo de leur coéquipière ainsi qu’une multitude d’informations sur elle ? Qu’Isata savait depuis un moment déjà qui ils étaient réellement ? Qu’ils ne s’appelaient pas Maxence et Julian mais bien Léonard et Alexander ? Comment auraient-ils pu se douter que cet homme qui les avait acceptés dans son gang souhaitait les tuer pour amasser toujours plus d’argent ?
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