Aout 2015 -25
ely
Zéphyr m’ouvrit la porte, prévenu de ma visite. Il me sourit, un panier à la main, un maillot sur les hanches et un tee-shirt trop large.
— Tu vas à la mer ?
— Oui, fit-il. Je vais rejoindre Mathys et ma sœur.
Je devinais qu’il parlait d’Adès ? La relation avec Perséphone était toujours tendue.
J’entrais comme si je ne savais pas que Tys avait passé une semaine chez eux. Evack m’avait averti qu’il partirait dans la soirée. Je n’avais rien dit, préoccupé par notre virée dans le Verdon avec Jeck et Armand. Trois jours tranquilles en camping-car. Je voulais faire le sentier Blanc-Martel. Les garçons voulaient retrouver une paix pédestre. Ils nous attendaient là-haut.
— Dans ma chambre, me signala Zéphyr.
Je ne fis pas de remarque, sachant très bien que « sa chambre » était la chambre d’ami depuis toujours. Une chambre prise d’assaut par Mathys depuis son retour en France. Il passait du temps avec Evack, mais sans vouloir me voir. Alors certains week-ends, je faisais mine de ne pas être joignable. Je m’étais arrangé avec le groupe. D’autrefois, Evack, me prévenait de venir.Mathys et moi, nous nous fuyons et je réalisai que je lui avais peut-être plus de mal que je n’aurais voulu.
Je comprenais tout à fait l’envie à Mathys de ne pas me croiser. Je n’aurais pas eu envie de me croiser non plus, à vrai dire. Putain, j’avais eu son âge. J’avais été blessé par un homme de l’âge que j’avais à présent. Il m’avait prise pour une femme que je n’étais pas. Il me plaisait, mais j’étais trop jeune. Un baiser avait été déjà trop pour lui, et je comprenais toutes ses résistances et le dégoût de lui-même quand on lui avait dit mon âge, quinze ans.
Je me dirigeai vers la « chambre » de Zéphyr et y découvris Evack la main levée vers le plafond. Il retenait une lettre, à la fois fier et en colère. Mais, victorieux de l’avoir entre les doigts.
— Qu’est-ce tu fiches ? le surpris-je.
— P’tain ! Ely ! T’mas fait peur.
Il fourra la lettre dans sa poche, histoire de rien.
Je fronçais les sourcils en secouant la tête.
— Tu ne devrais pas fouiller dans ses affaires et tu ferais mieux de remettre ce que tu as « trouvé », là où tu l’as volé.
Il hésita, se mordillant la lèvre avant de triturer son oreille recouverte de piercing. J’en avais presque autant que lui.
Il fit mine d’une urgence dans la cuisine et me passa devant, ignorant superbement ce que je venais de lui demander.
Quoi qu’il y eût d’écrit dans cette lettre, ce n’était pas cool de la lire.
J’abandonnais. Ce n’était pas mes oignons. En revanche, je faisais presser le pas à mon pote.
— On a un peu de route, Vak. Bouge-toi le cul !
Il me montra son sac.
— Je suis porteur ?
— S’t’plait.
J’attrapai le sac, comprenant qu’il me rejoindrait en bas.
Je recroissais Zéphyr au pied du bâtiment. Il était en train de faire risette à mes chiens, resté dans la voiture, fenêtres ouvertes.
En me voyant avec le sac de son frère, il secoua la tête.
— Qu’est-ce qu’il fiche ? me demanda-t-il.
Je ne répondis pas levant les yeux au ciel. Il se marra.
— J’en peux plus de lui. Toujours à labour.
— C’est clair.
Zéphyr me donna une tape sur l’épaule avant de me demander si je laissais les chiens chez ses parents. Je hochais la tête. Tout le monde savait qu’ils vieillissaient. Je ne pouvais pas les amener avec moi, surtout avec la chaleur de l’été. Puis chez les Torrens, il y avait plus de caresses qu’à la maison. Je ne m’inquiétais pas trop pour leur confort. Les parents d’Evack étaient complétement gaga de mes chiens. Et je pouvais partir serein.
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