Juillet 2016 -40

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Mathys

Lea suivre n’avait pas été l’idée du siècle et j’en avais encore la nausée. Je comprenais les raisons pour lesquelles, iel me repoussait, cependant, Jupiter avait trois ans de plus que moi. Il n’était pas aussi mature que son aspect pouvait laisser croire. C’était un gamin dans le corps d’un jeune homme. Ely n’avait été qu’un défi puérile avec quelques amis. Je ne doutais pas qu’iel était au courant, pourtant iel était allé jusqu’au bout avec Jupiter.

Je lea vois encore l’entrainer jusqu’à la véranda et le pousser contre le divan, retirant sa chemise qu’iel portait à la perfection. J’étais resté là, à regarder la maladresse épouvantable de Jupiter et le mouvement expert d’Ely. J’étais resté caché dans un angle, mangé par l’obscurité, sans la moindre honte. J’avais besoin de voir, même si cela signifiait que j’étais un pervers. J’étais conscient du mal qu’aurait éprouvé Ely à me savoir l’admirer. J’aurais dû faire demi-tour comme n’importe quelle personne blessée. Et maintenant, j’avais l’image de Jupiter dansant chaotique contre Ely. L’image ne voulait pas s’effacer.

En marchant derrière iel, je me remémorais ses formes androgynes. Je ne l’avais jamais vu complétement nu et cela m’avait impacté. À la fois que je lea désirais, je me détestais d’avoir épié ce moment intime auquel je n’étais de toute évidence pas invité. J’avais violé son intimité et cela me rongeait. Je ne parvenais plus à soutenir son regard quand iel le posait sur moi. Je n’osais plus m’en approcher. J’étais apeuré de ce que je lui avais fait, alors que je connaissais son vécu. De nous deux, n’était-ce pas moi la monstruosité ? Je ne voulais pas l’aimer comme cela. Plus jamais ?

— Mathys, aide Ely, au lieu de dormir les yeux ouverts.

La voix d’Evack me réveilla. Je suivis son regard. Le pied d’Ely glissait sans pouvoir lea soutenir, alors je plaçais le mien sur sa trajectoire pour qu’iel puisse se maintenir et attraper la roche pour se hisser avec le reste du groupe.

Nous avions programmé une randonnée, Armand, Jeck, Evack, Ely et moi, pour retrouver le rythme pour une ascension prévue pour la fin des vacances. Il nous restait encore deux semaines en Auvergne. C’était juste histoire de se décrasser des derniers jours. Il y aurait encore des petites randonnées matinales comme cela.

Ely se réceptionna, restant suspendu au rocher. Iel me fixait, attendant que je m’aventure derrière iel. Je baissais la tête en croisant son regard marron éclaté de vert. En temps normal, je l’aurais soutenu, m’imprégnant de sa dureté. Quand Ely observait, iel déshabillait l’autre avec une force ténébreuse. Iel forçait le passage, comme un aigle trouvant sa cible. C’était un regard perçant, vif, dur et observateur. Iel ne cherchait pas dans l’âme. Non. Iel détaillait l’œuvre qui ellui faisait face.

Je rencontrais le même problème qu’Ely un instant plutôt, et si j’avais été attentif, j’aurais sans doute remarqué que nous avions tous glissé sur cette roche.

Ely me tendit sa main. Ses doigts longs où quelques cicatrices se dessinaient m’avaient appris, il y a longtemps, qu’iel était manuel.le.

Je refusai son aide. Je ne pouvais pas lea toucher sans repenser à ce soir dans la véranda.

— Mathys, ta main. Maintenant.

Sa voix n’avait pas été dure, mais impatiente. Je lui obéis et me laissai tirer à iel avant que nous rejoignions les autres.

Nous reprîmes les sentiers sur lesquels nous avions déjà marché. Le pas d’Ely ralentit. Iel nous éloignait des oreilles indiscrètes.

— Qu’est-ce qui ne va pas, Tys ? demanda-t-iel sans se retourner.

— Rien.

— C’est rare de te voir si perdu, continua-t-iel.

Je restais silencieux profitant d’écouter nos pas. Depuis que je marchais derrière iel, j’avais appris son rythme, m’y étais aligné naturellement.

— Tu confonds. Je ne suis pas perdu, je suis…

Si je lui disais, iel ne me parlerait plus. C’était une certitude.

— Tu es ?

Iel portait si bien sa curiosité. Après tout, je pouvais bien lui dévoiler un morceau de vérité sur mon trouble. J’aimais pouvoir partager un moment, où seuls, nous pouvions échanger.

— Je suis honteux d’un comportement que j’ai pu avoir avec une personne que j’aime.

— Prune ? Que s’est-il passé ?

Je lâchais un rire qui n’en était pas un. Pourquoi aurait-iel pensé à quelqu’un d’autre ?

— Non.

— Qui alors ?

— Pouvons-nous ne pas en parler ?

— Comme tu veux.

Ely s’arrêta pourtant brusquement. Je faillis lui rentrer dedans en stoppant ma marche trop tard. Il me fut impossible de détourner mes yeux des siens. Je n’eus pas la rapidité nécessaire avant qu’iel ose attraper mon menton entre ses doigts. C’était la première fois qu’iel me touchait de cette manière. Et cela me fit comme une décharge électrique dans tout le corps. J’en appréciais chaque crépitement.

— Quand il est question de ton regard sur moi, je ne me trompe jamais, commença-t-iel. Qu’est-ce que tu as vu exactement et combien de temps ?

Mes lèvres tremblèrent et une vague de honte enroula tous mes muscles. Je n’osais pas respirer. Sûr de moi ? Je ne l’étais plus, sous le regard sauvage d’Ely. Pourquoi devinait-iel si aisément mes idioties ? Est-ce que cela ne prouvait pas ce que j’avançais ? Nous étions faits pour nous comprendre et nous aimer.

— Qu’as-tu vu, Tys ? répéta-t-iel.

Iel me détestera. Iel ne voudra plus s’approcher de moi, furent mes premières pensées.

Cette possibilité me terrifiait à m’en faire perdre tous mes moyens, et pour la première fois, je sentis mes yeux brûler devant Ely.

— Putain. Pourquoi tu ne réponds pas ?

— Je n’y arrive pas. Merde, ça prouverait ma culpabilité à avoir fait ce que j’ai fait. Je me sens sale de…

Ely pâlit en comprenant la signification de cette seule phrase.

— Alors c’était bien toi. Bordel, Mathys !

Ely lâcha mon menton. Je baissais la tête, le cœur tombant en miette. Je l’avais aimé si mal ce soir-là. Je l’avais voulu pour moi, alors j’étais resté planté devant la fenêtre comme j’aurais pu regarder un film érotique sur mon ordinateur.

— Qu’est-ce qui te passe dans la tête ? souffla-t-iel avec une lointaine douceur.

Je m’écroulais à genoux devant iel, m’empêchant de verser une seule larme. Je ne voulais pas qu’iel puisse voir la sensibilité qui me noyait parfois lorsque je l’aimais trop. Quand je pensais lea perdre.

Iel s’accroupit, cherchant à capter mon regard. Je ne lui donnais pas la possibilité, mais Ely murmura de lea regarder. C’était la première fois.

— Tu vois dans quel état ça te mets de faire le grand. T’aurais pas dû voir ça.

Il n’y avait pas d’énervement dans ces mots. Ils possédaient la même tempérance que ceux servis à un enfant grondé avec souplesse. Son attitude me blessa, mais pas autant que ce que je décryptais. Est-ce qu’Ely avait su dès le début que je regardais ? Cela aurait été puéril et cruel.

— Tu… crois que c’est parce que ça m’a choqué de te voir le faire… ? Bon Dieu Ely, je suis sexuellement active depuis mes quatorze ans. Pourquoi tu es toujours à côté de la plaque ? Tu le fais exprès ou bien tu es vraiment aveugle ?

Si son regard restait dur, le mouvement de sa main lea trahit, comme l’accélération de son rythme cardiaque visible par la veine jugulaire de son cou. J’étais bien trop près pour la manquer. Je ne savais pas, cependant, quelle information lui avait fait crisper la mâchoire.

— OK. On va s’arrêter là. Et on ne va plus jamais en parler.

Iel remit de la distance entre nous, avant de reprendre le sentier devant nous.

J’avais eu envie de lui demander si c’était mon regard sur iel ou les « capacités » de Jupiter qui lui avait fait prendre son pied. J’avais toujours honte de l’avoir épié comme un criminel, mais j’en revenais toujours à la même conclusion : Ely serait toujours trop enfoncé.e dans mon cœur pour l’en déloger, et sans doute que je ferais encore des conneries pour qu’iel me regarde. Pour qu’iel sache que je me tiendrais toujours à ses côtés.

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